LGBTphobieÀ Biarritz, les propos homophobes du président du club de rugby ne passent pas

Par Timothée de Rauglaudre le 20/02/2020
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Dans le contexte de tensions à la veille des élections municipales, le président du club de rugby Biarritz Olympique a proféré des propos à caractère homophobe à l'encontre de deux élus. Jointe par TÊTU, la Ligue nationale de rugby condamne, ce qui n'est pas le cas de tous les politiques locaux...

Biarritz a beau être la capitale du surf, le club de rugby du Biarritz Olympique est une institution. Et comme toute institution, elle devrait montrer l'exemple. Pourtant une sortie récente de son président, Jean-Batiste Aldigé agite la station balnéaire.

Vendredi 14 février, l'ex-joueur de l'équipe hongkongaise s'en prend à un élu de la Ville, Guillaume Barucq, tête de la liste sans étiquette "Biarritz Nouvelle Vague" aux élections municipales, qui commentait un post sur Facebook : "Comment peux-tu oser pointer ton nez ici ? Elle [la prestation sportive du club face à Vannes la veille, ndlr] est pour toi et ta copine Amigorena ce soir #fossoyeurs." François Amigorena est un autre conseiller municipal biarrot. Sur son compte Twitter, Barucq dénonce dès le lendemain matin des "insinuations homophobes".

À Biarritz, les propos homophobes du président du club de rugby ne passent pas
Capture réalisée par Guillaume Barucq

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Le contexte ? Des tensions croissantes à Biarritz à la veille des municipales. Lorsqu'il a été nommé à son poste, en juin 2018, par la famille Gave (dont Charles et Emmanuel Gave, anciens proches du parti Debout la France de Nicolas Dupont-Aignan), propriétaire du club, Aldigé a hérité des manettes d'une structure en grande difficulté financière. C'est pourquoi, à la veille des municipales, il a demandé un investissement de la Ville à hauteur de 12 millions d'euros pour aménager un terrain constructible et en faire un centre de formation accompagné de logements, de boutiques ou encore d'une brasserie. Il laisse entendre que, si le projet n'était pas approuvé, le club pourrait disparaître. La semaine dernière, le conseil municipal a adopté une "résolution de principe qui n'engage pas la collectivité" pour approuver ce projet. Résolution critiquée par Guillaume Barucq.

Vidéo homophobe

Le lendemain du post, l'association LGBT+ du Pays basque, Les Bascos, a vivement réagi sur son compte Facebook en attribuant à Jean-Baptiste Aldigé un "carton rouge" : "Quel sens a pour lui le mot homophobie ? Sa définition de l’homophobie n’est-elle pas à géométrie variable et totalement opportuniste ? L’association des Bascos rappelle que la ville de Biarritz subventionne fortement ce club et demande à l’ensemble des élus et candidats aux élections municipales de siffler la fin de cette pathétique séquence ! La quête de voix ne saurait justifier un silence complice."

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L'usage de l'expression "à géométrie variable" fait référence à un passif bien précis. En mars 2019, Aldigé avait été victime d'une vidéo diffusée par des supporters du club voisin et concurrent de l'Aviron Bayonnais, le traitant de "pédé". Le joueur international avait alors déposé une plainte pour "injure publique envers un particulier en raison de son orientation ou identité sexuelle".

Les Bascos rappellent qu'à l'époque, l'association avait dénoncé la vidéo et s'était empressée de "[proposer] aux clubs locaux d’engager une campagne contre l’homophobie dans le sport". Si, avec l'Aviron Bayonnais, une convention a été signée et un débat à ce sujet est à venir, le président du Biarritz Olympique a, d'après Les Bascos, "systématiquement décliné cette proposition". "Comment quelqu’un qui se dit victime d’homophobie peut-il tenir de tels propos ?" s'interroge encore l'association LGBT+

La Ligue nationale de rugby condamne

Interrogé par Sud Ouest mardi 18 février, le président de club incriminé, s'est défendu de toute accusation d'homophobie, qu'il qualifie de "procès d'intention" : "Je réitère ce que j'ai dit : cela n'a rien d'homophobe. J'assume." Pourtant, contactée par TÊTU, la Ligue nationale de rugby n'est pas du même avis et condamne les propos de Jean-Baptiste Aldigé : "C'est peut-être moins évident pour la plupart des gens que quand des termes plus crus comme "pédé" ou "enculé" sont utilisés, mais ça reste à connotation homophobe. On utilise la féminisation pour parler de personnes masculines : c'est souvent ce qu'on fait pour dénigrer les homosexuels."

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Du côté des candidats aux municipales, la condamnation des propos homophobes d'Aldigé n'est pas unanime, comme l'a relevé Sud Ouest. L'ancienne adjointe à l'urbanisme passée dans l'opposition Nathalie Motsch a très vite soutenu Barucq et Amigorena, les élus visés par le président du club. Tout comme la liste d'union de la gauche et des écologistes.

En revanche, Maider Arosteguy, tête de la liste "Notre Biarritz" et membre des Républicains, favorite de l'élection, refuse de condamner et renvoie dos-à-dos Jean-Baptiste Aldigé et les élus insultés. Elle a pourtant, comme les autres candidats à la mairie, signé le 25 janvier le pacte de lutte contre les discriminations proposé par Les Bascos, qui indique notamment que "les élus favorisent l'engagement des clubs sportifs en faveur d'une véritable politique de lutte contre les discriminations". Tous les candidats présents s'étaient alors accordés sur l'importance de faire de la prévention en la matière auprès du Biarritz Olympique.

 

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