EuropeLa carte des collectivités françaises jumelées à des "zones sans LGBT" en Pologne

Par Timothée de Rauglaudre le 20/02/2020
zones sans lgbt

Une commune du Loiret a suspendu vendredi dernier ses "relations officielles" avec sa ville jumelle en Pologne, qui fait partie des 88 "zones sans LGBT". TÊTU a recensé dans une carte interactive les communes, départements et régions en France qui ont des jumelages ou des accords de coopération avec des "zones sans LGBT" polonaises.

Depuis début 2019, au moins 88 localités polonaises ont adopté des résolutions qualifiées à l'étranger de "zones sans LGBT". Il s'agit de communes, de districts (équivalent des départements français) et de voïvodies (équivalent des régions françaises), dans lesquelles des services privés peuvent par exemple être refusés à des personnes LGBT+ pour des motifs religieux. Dans ce pays européen où le mariage des couples de même sexe est illégal, la communauté LGBT+ a en effet vu ses droits menacés depuis le retour au pouvoir, en 2015, du parti ultraconservateur Droit et justice (PiS), très lié à l’Église catholique. D'après le site "Atlas de la haine" ("atlas nienawiści"), créé par des chercheurs et militants qui ont recensé ces localités, 31 % de la population polonaise vivrait désormais dans une "zone sans LGBT".

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Le 18 décembre 2019, le Parlement européen condamnait, dans une des recommandations d'une résolution sur les droits LGBT+, ces mesures qui incitent les élus locaux polonais "à s’abstenir de toute action visant à encourager la tolérance à l’égard des personnes LGBTI et à ne pas fournir d’aide financière aux ONG qui œuvrent en faveur de l’égalité des droits". L'ex-tête de liste LR François-Xavier Bellamy s'était abstenu durant le vote de la résolution ; quant aux eurodéputés RN, une moitié s'était abstenue et l'autre avait voté contre.

Saint-Jean-de-Braye, ville pionnière

Vendredi 14 février, comme l'a raconté TÊTU, le conseil municipal de la ville de Saint-Jean-de-Braye, dans le Loiret à côté d'Orléans, a adopté un vœu visant à suspendre les "relations officielles" de la commune avec sa ville jumelle de Tuchów, une des 88 "zones sans LGBT" en Pologne. "Élus de Saint-Jean-de-Braye, nous réaffirmons que les droits de l’Homme doivent s’appliquer sans discrimination à chaque être humain, indépendamment de son orientation sexuelle ou de son identité de genre, développe le texte. Nous demandons que les libertés individuelles de tous s’appliquent sans entrave." Saint-Jean-de-Braye conserve toutefois son jumelage avec Tuchów, mais n'aura plus aucune relation avec elle tant que ses élus n'auront pas retiré la résolution votée par le PiS.

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À la suite de cette première prise de position symbolique, le site d'investigation polonais OKO.press a lancé jeudi 20 février un appel à 53 localités européennes à rompre leurs relations avec treize des "zones sans LGBT". "La dénonciation civique est l'expression de la conviction que tout doit être fait pour arrêter la haine homophobe en Pologne et en Europe avant qu'il ne soit trop tard", clame le média. Il incite à "réagir sans ambiguïté, à mettre fin à la coopération ou à la suspendre jusqu'à ce que la résolution soit retirée". Le jour même, interpellé par le compte Twitter @ParisPasRose, le maire de Nogent-sur-Oise Jean-François Dardenne a indiqué qu'il allait "interpeller les autorités de notre ville jumelée [Kraśnik, ndlr] afin de dénoncer une telle prise de position". Avant d'ajouter : "Une telle mesure n'est pas tolérable dans une Europe démocratique."

La carte de "TÊTU"

À partir des informations transmises par les concepteurs de l'Atlas de la haine, toutes vérifiées par nos soins, TÊTU a mis au point une carte interactive recensant les villes, départements et régions de France qui disposent d'un jumelage ou d'un accord de coopération avec des localités qualifiées par l'Atlas de la haine de "zones sans LGBT". S'ils sont particulièrement nombreux dans la région Hauts-de-France, c'est que le bassin minier a été historiquement le premier foyer d'immigration des Polonais. La carte n'est pas exhaustive et est appelée à évoluer en fonction des signalements des lecteurs et des autorités locales. Les couleurs des collectivités correspondent :

  • en vert, aux collectivités qui ont remis en cause leurs relations avec une "zone sans LGBT" ;
  • en orange, aux collectivités qui ont condamné la résolution incriminée de la "zone sans LGBT" à laquelle elles sont associées, sans toutefois remettre en cause leurs relations ;
  • en rouge, aux collectivités qui n'ont pas encore réagi.

 


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