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musiqueOn a parlé de Taylor Swift, de son public LGBTQ+ et des violences faites aux femmes avec Louane

Joie de vivre est un nouvel album vraiment complet, avec des influences très disparates. Comment t'expliques-tu cette sorte de patchwork musical ? Il n'y avait pas une volonté particulière de mélanger les styles. J'avais surtout envie d'un album qui suive mes envies et mes goûts musicaux du moment. Du coup, c'est très éclectique, tout simplement…

Crédit photos : Le Bon Bourgeois

Joie de vivre est un nouvel album vraiment complet, avec des influences très disparates. Comment t'expliques-tu cette sorte de patchwork musical ?

Il n'y avait pas une volonté particulière de mélanger les styles. J'avais surtout envie d'un album qui suive mes envies et mes goûts musicaux du moment. Du coup, c'est très éclectique, tout simplement parce que je suis quelqu'un qui écoute des choses très différentes les unes des autres.

Tu signes plusieurs collaborations surprenantes, que ce soit avec Nk.F (producteur de PNL), Damso ou encore Dinos. On a l'impression que t'es allée chercher des personnes qui avaient un univers très différent du tien. Comme une envie de de tenter des choses que tu n'avais pas tout à fait osées jusqu'ici ?

Je ne sais pas vraiment si c'était quelque chose que je n'avais pas osé faire. C'est plutôt que je n'étais pas encore prête à faire ce genre de compositions. C'était une question de timing et de sentiments. Pour moi, c'était vraiment un album d'envie, donc je ne me suis jamais vraiment posé la question.

Ton troisième album sort en pleine pandémie mondiale, dans un contexte très particulier. As-tu travaillé dessus pendant la crise sanitaire ?

Honnêtement, je n'ai pas fait grand-chose pour l'album pendant le confinement. J'ai commencé à bosser sur l'album il y a trois ans, pendant la deuxième tournée, et je l'ai fini après le confinement, juste avant l'été. "J'peux pas", je l'ai écrite entre le premier et le deuxième album. C'est un titre particulier parce que je ne voulais pas le sortir avant, je n'étais pas psychologiquement prête à assumer ce genre de chanson.

La crise sanitaire a-t-elle eu un quelconque impact sur ta musique ?

Je ne sais pas si la crise sanitaire va impacter la musique que je vais produire plus tard. J'imagine que les sentiments et tout ce côté anxiogène à l'heure actuelle peuvent impacter ma façon d'écrire, ma façon de voir la musique. Mais pour l'instant, je n'en sais rien, c'est assez inconscient. En revanche, c'est évident que la promotion a été pas mal impactée. C'est particulier parce qu'on ne fait pas de concerts, pas de plateaux radio. On réinvente une façon de promouvoir un album.

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Mais honnêtement, la priorité, même si ça fait des années que je bosse sur mon album et que je le défends corps et âme, c'est quand même de prendre soin les uns des autres. Souvent, on me demande si je ne suis pas trop frustrée ou en colère par rapport à la tournée. La réponse est non. Je ne suis pas en colère parce que je sais qu'on est tous dans le même bateau. Et j'ai conscience que je ne suis vraiment pas la plus à plaindre. Je suis surtout triste pour les gens avec qui je travaille en tournée parce qu'ils n'ont que ça et n'ont pas la possibilité d'avoir un autre métier que technicien par exemple. Et ça, pour moi, c'est quelque chose de douloureux.

J'aimerais qu'on parle de "3919", une chanson qui dénonce les violences faites aux femmes. C'est un titre clairement engagé et féministe. Quelle a été l'impulsion derrière ce morceau ?

Pour moi, elle est importante et c'est d'ailleurs pour ça qu'elle s'appelle "3919". C'est le numéro d'écoute des violences. Ça a été super dur, on a réécrit les paroles douze fois. C'est ultra touchy comme sujet. Je n'avais pas envie d'avoir l'air moralisatrice ou culpabilisante parce que je ne suis pas légitime. J'ai eu la chance de ne pas être touchée par ça dans ma vie. En revanche, je sais que ça existe. J'avais juste envie que ce titre soit bienveillant, qu'il soit une pause pour les gens qui souffrent de ce genre de situations. Je ne sais pas si j'ai réussi car c'était un vrai challenge. J'espère qu'elle ne sera pas mal interprétée.

J'imagine qu'on t'a déjà beaucoup questionnée au sujet du féminisme. As-tu ressenti une sorte de pression de te positionner là-dessus au vu de ta visibilité ?

Non, surtout que ça fait longtemps que je suis sur ces questions-là. C'est juste que ça n'était pas tellement visible parce que je ne le mettais pas forcément en avant.

T'es-tu toujours considérée comme féministe ou ça a été un cheminement pour toi ?

Je pense que j'ai toujours été féministe mais je ne l'ai pas réalisé avant d'entendre ce terme pour la première fois. Et ce mot m'a parlé. Je suis évidemment féministe. Plus que féministe, je suis humaniste et je me bats pour les droits et l'égalité au sens général. Pour moi, c'est ça qui est vraiment important. Malheureusement, à l'heure actuelle, ça reste un peu utopique mais je pense que plus on avance dans ce sens-là, plus on convaincra les gens. C'est important et ça l'est d'autant plus pour moi depuis que je suis mère.

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Certains fans comparent ton univers et ta trajectoire à celle de Taylor Swift. Est-ce une influence pour toi ?

J'aime beaucoup, beaucoup cette femme. J''ai aimé son évolution. Pour le coup, en termes de cible, les fans de Taylor Swift sont les mêmes que les miens. Le moment où elle est révélée en France, c'est quand elle est dans le film Hannah Montana, que j'ai évidemment vu. J'assume complètement, OK ? [rires]. Vraiment, je pense que c'est à ce moment-là que je l'ai découverte et que je me suis vite intéressée à elle. Beaucoup ont vu son documentaire sur Netflix et je pense que c'est le moment dans ma vie où j'ai le plus reçu de textos qui me disaient "oh, on dirait toi". On a pas mal d'idées et de valeurs communes.

Ces dernières années, Taylor Swift s'est d'ailleurs positionnée plus que jamais comme une alliée de la communauté LGBTQ+. Est-ce ton cas ? Quel lien as-tu avec cette communauté-là ?

C'est une communauté qui fait partie de la vie, de ma vie en plus. Le principe de base du féminisme, de l'humanisme, c'est l'acceptation. Si je peux défendre cette communauté, je le ferai toute ma vie. Pour moi, exclure les gens, c'est insupportable. Tout ce qui sera inclusif et dans la protection, l'amour et le respect de l'autre, je serai toujours de ce côté-là.

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Penses-tu que ta musique touche des auditeurs LGBTQ+ ?

C'est difficile parce qu'on est en train de mettre dans une case le public LGBTQ+, alors que j'imagine qu'il y a des gens qui me détestent et d'autres qui m'aiment bien. J'ai, en général, des retours plutôt positifs. J'essaie de faire des chansons dans lesquelles les sentiments que j'ai sont des sentiments humains. Du coup, j'espère que ces personnes-là peuvent se retrouver malgré tout dans mes chansons.

Au vu de tes perceptions du féminisme et de la communauté LGBTQ+ et étant donné que tu es désormais maman, est-ce que ce sont des valeurs que tu comptes inculquer à ta fille  ? Y as-tu réfléchi ?

Ce sont des choses auxquelles j'ai vachement réfléchi et je me suis dit que j'allais attendre qu'elle me pose des questions pour lui dire la vérité à chaque fois. Tout en la tournant vers l'acceptation, le partage et l'amour. J'ai été élevée comme ça. On parle de communauté LGBTQ+, mais ça va plus loin que ça. Je sais que dans ma famille, j'ai des personnes qui ont été victimes de racisme par exemple. Je suis la seule blanche, blonde aux yeux bleus de ma famille et on ne le sait pas forcément.

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J'ai été élevée dans l'ouverture d'esprit, l'acceptation, la compréhension de l'autre. Je pense que c'est un combat de tous les jours. J'ai du mal avec les gens qui prônent le bien en faisant du mal autour d'eux. J'aimerais bien parfois discuter avec ces gens-là afin qu'ils m'expliquent leurs agissements. Et qu'ils aient de vrais arguments, plutôt que "c'est contre-nature". Je ne vois pas quel argument on peut avoir face à l'amour ou l'identité.

Il y a aussi le débat de la question du genre et notamment de l'éducation des enfants basée sur le genre. Est-ce un sujet sur lequel tu t'es penchée ?

Honnêtement, non. J'avoue que je suis vraiment dans le naturel. Je ne réfléchis pas tellement à cette question-là. En tout cas, je ferai tout pour rester ouverte au maximum. Comme ça, si jamais elle se pose des questions, si jamais je me rends compte de quelque chose, je peux l'aider et l'aiguiller. C'est elle. C'est sa personnalité. Dans la mesure de ce que je pourrai lui apporter par l'amour, la compréhension, l'écoute et la protection, je serai toujours derrière elle. Peu importe où elle va, qui elle devient, qui elle veut être, ce qu'elle veut faire. Je serai toujours là. C'est ma fille, c'est tout.

Au vu du contexte singulier dans lequel on se trouve, à quoi vont ressembler les prochains mois pour toi ?

Aucune idée. Honnêtement, je n'en ai aucune idée. C'est trop difficile de savoir. J'ai une idée globale de mes prochains mois qui est totalement réversible. Jusqu'à décembre, j'ai un planning très concret, je suis sur la promo de l'album. Mais comment ? Est-ce que je vais aller à la rencontre des gens ? Est-ce qu'on va faire que des rencontres par Zoom ? Je n'en ai aucune idée. D'un point de vue familial en tout cas, je vais clairement passer du temps avec ma fille et mon mec.

Par Florian Ques le 24/10/2020