Dans la famille ou l'espace public, les bisexuels sont plus régulièrement victimes de violences que les homos

Par Nicolas Scheffer le 24/11/2020
bisexuels

Les bisexuels font l'objet de plus de violences que les lesbiennes et les gays, selon l'étude Virage. Par ailleurs, 47% des personnes trans interrogées ont fait l'objet de violences sexuelles dans l'espace public.

"La situation des bisexuel·le·s est moins étudiée , mais plusieurs études suggèrent qu'ils déclarent plus d'expériences difficiles et de violences que les homosexuel·le·s". C'est le triste constat que fait l'enquête Virage, réalisée entre 2015 et 2016 qui paraît ce 25 novembre dans Violences et rapports de genre (édition Ined). 46% des femmes bies ou homo ont subi des violences familiales. Chez les hommes, 36% des bis et 30% des homos en ont subi. Ces violences sont deux fois plus courantes que dans la population générale : 19% des femmes hétéros rapportent des violences contre 13% chez les hommes.

À LIRE AUSSI - Vincent, bisexuel, aimerait qu’on arrête de lui demander s’il préfère les filles ou les garçons

"Les bisexuelles et homosexuelles sont 4 à 5 fois plus nombreuses que les hétérosexuelles à déclarer des violences sexuelles subies dans leur famille", poursuit l'étude. "Les hommes gays et les bisexuels déclarent plus de violences sexuelles dans le cadre de la famille que les hétérosexuels, mais les prévalence pour les gays et les bisexuels, de l'ordre de 5%, sont bien moins importantes que celles concernant les lesbiennes et les bisexuelles", indiquent les auteurs.

74% des femmes bies ont subi des violences dans l'espace public

Virage s'intéresse au départ du domicile familial. Les chiffres sont édifiants. 9% des hommes bis et 6% des hommes homos invoquent un conflit "selon le sexe et l'identification sexuelle" pour justifier le départ du domicile parental. Chez les femmes, ces chiffres atteignent 17% chez les homosexuelles et une femme sur quatre pour les bies (25%) ! "Dans les enquêtes antérieures ce départ est plutôt présenté comme la conquête d'une autonomie : dans un foyer familial où les jeunes LGB sont surexposé·e·s aux violences ou aux questionnements, le départ peut être conçu comme une émancipation", insistent Mathieu Trachman et Tania Lejbowicz.

À LIRE AUSSI - Les hommes bisexuels seraient de meilleurs coups que les hétéros

Mais c'est dans l'espace public que les chiffres sont les plus édifiants. Trois femmes bies sur quatre (74%) disent avoir subi des violences dans les espaces publics, que ce soit une insulte, de la drague, des violences physiques ou sexuelles. 45% des femmes bies disent avoir subi des violences sexuelles, contre 25% des hommes bis. "Les bisexuelles sont la seule population à déclarer en majorité de la drague importune ou des insultes : on peut penser qu'elles fréquentent des espaces plus mixtes que les lesbiennes, et sont d'autant plus susceptibles de connaître ces formes de violences", analysent les chercheurs.

Les parents des bis plus ouverts ?

Les femmes ont plus tendance à parler de leur identification sexuelle à leurs parents que les hommes : 92% des lesbiennes en ont parlé à leur mère contre 67% des bies. Chez les hommes, ce sont 85% des gays et seulement 44% des bis. Seul un bi sur quatre (24%) parle de son orientation à son père. Généralement, les parents ont une réaction plus positive à l'annonce de la bisexualité que de l'homosexualité. "Cette différence n'est pas nécessairement l'indice qu'une plus grande acceptation de la bisexualité en tant que telle : elle peut être liée à l'image sociale d'une bisexualité transitoire ; les parents peuvent réagir plus positivement à une identification qu'ils n'estiment pas nécessairement sérieuse ou contradictoire avec une hétérosexualité future", notent les chercheurs.

À LIRE AUSSI - Oui, la bisexualité existe. Et c’est une étude qui le dit

Les personnes trans surreprésentées dans les violences

Enfin, "si les gays et les lesbiennes peuvent cacher leur identification sexuelle, l'identification et les pratiques de genre d'une partie des personnes trans implique une visibilité qui peut les exposer à des stigmatisation et des violences", notent les chercheurs. Au sein de la famille, 61% des répondant·e·s trans font état de violences, 53% évoquent des violences psychologiques, 38% des violences physiques et 14% des violences sexuelles (sur 253 personnes trans répondant·es). 22% des personnes trans évoquent leur identité de genre comme conflit justifiant leur départ du domicile familial. Huit personnes trans sur 10 ont subies des violences dans l'espace public dont 47% des violences sexuelles (32% chez les cis).

"Dans la famille comme dans l'espace public, les violences verbales et psychologiques sont omniprésentes : on peut penser que ces formes moins physiques de violence tiennent une place majeure dans la vie des trans et font des espaces privés comme publics des espaces hostiles", regrettent les sociologues.

 

Crédit photo : Christian Sterk / Unsplash