scienceLa NASA critiquée pour avoir nommé un télescope du nom d'un ancien administrateur homophobe

Par Nicolas Scheffer le 03/03/2021
NASA

Trois chercheuses critiquent la NASA d'avoir choisi le nom de James Webb pour nommer un télescope. L'ancien administrateur est accusé d'avoir "purgé" l'agence spatiale américaine des personnels LGBTQI+ dans les années 60.

C'est le télescope le plus grand, le plus puissant et le plus complexe jamais construit. Il est censé révolutionner la recherche spatiale, remarque Pinknews. Mais ce petit bijou de technologie doit porter le nom de James Webb, un ancien administrateur de la NASA. Une décision qui a fait bondir trois chercheuses de l'agence. Notamment parce que James Webb aurait grandement participé à la mise à l'écart - voire à la porte - des homosexuel.le.s de la NASA.

"Au mieux compliqué, au pire complice"

C'est en tout cas l'avis des spationautes Sarah Tuttle, Lucianne Walkowicz et la physicienne Chanda Prescod-Weinstein, qui ont interpellé la NASA pour réfléchir à deux fois avant de baptiser ainsi ce télescope. Selon elles, l'héritage de James Webb "est au mieux compliqué, au pire, complice", écrivent-elle dans Scientific American.

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De nombreux spationautes "ressentent un besoin de gratitude" à James Webb, qui a dirigé la NASA pendant la Guerre froide et qui a dirigé de nombreuses missions, notamment le programme Apollo. Mais il s'est également investi activement pour exclure les personnes LGBTQI+ des agences gouvernementales.

Responsable d'une politique homophobe

À ce moment, l'idée que le gouvernement fédéral était "infiltré" par des homos était répandue. James Webb était informé des "purges" policières contre les personnes queer depuis les années 1950. Quand il a rejoint la NASA en 1961, il aurait organisé la mise à l'écart les personnes LGBTQI+ de ses services. "En tant que dirigeant, James Webb est responsable des politiques qui ont été conduites sous son leadership, notamment des politiques homophobes qui étaient en place lorsqu'il est devenu administrateur de la NASA", écrivent les trois scientifiques.

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"Certains disent que si James Webb était complice, tout le monde l'était alors dans l'administration. Nous sommes d'accord. Heureusement, la NASA ne baptise pas un télescope au nom d'une administration toute entière. Mais ce serait une mauvaise décision d'honorer un seul de ses membres", indiquent-elles.

"Terreur de lavande"

Elles rappellent par ailleurs que les archives suggèrent que James Webb a participé aux discussions au Sénat américain qui ont conduit à ces évictions connues à ce jour au nom "de terreur de lavande". Dans un memo confidentiel à propos du "problème des homosexuels et des pervers sexuels (sic)", James Webb serait explicitement nommé comme "facilitateur de discussions avec des membres du Sénat sur des politiques homophobes", écrivent les chercheuses. Selon Pinknews, La NASA s'est déjà montrée ouverte à rebaptiser lorsque nécessaire. En 2019, l'agence a modifié le nom de l'astéroïde "Ultima Thule", après des remarques sur des accointances neo-nazies.

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"C'est facile pour des physiciens, hommes blancs, comme moi d'ignorer les aspects moins salvateurs de nos héros scientifique, mais cette période est terminée (...) Nous pouvons trouver des choses incroyables pour féliciter James Webb, mais nous devons reconnaître qu'il a fait beaucoup de dégât dans de nombreuses vie. La chose la plus importante est d'arrêter de prétendre que les problèmes du passé sont hors sujet aujourd'hui. Si nous donnons de la valeur à l'inclusion dans la science, nous devrions arrêter de nommer nos observatoires du nom de personnes qui ont construit leur carrière en démolissant celle d'autres", a écrit dans Forbes Matthew Francis, éditorialiste scientifique.

 

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