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lesbiennes"Macron hypocrite, les lesbiennes vont en Belgique !", retour sur une marche lesbienne politique et historique

Par Elodie Hervé le 26/04/2021
lesbienne

À Paris, la marche lesbienne a réuni plusieurs milliers de personnes. Une marche historique pour exiger la PMA et pour lutter l'invisibilisation des femmes homosexuelles. TÊTU vous la fait (re)vivre comme si vous y étiez.

« Mais donnez-nous la PMA, Darla Dirladada. Mais elle est-où la PMA? Darla Dirladada ». Ce dimanche, sur un air revisité d’une chanson de Dalida, le cortège lesbien s’élance. Ce dimanche 25 avril, plusieurs milliers de lesbiennes et d’allié-es se sont armé-es de leurs plus beaux slogans pour exiger une fois encore, la PMA pour toutes et tous.

Sur les pancartes, des messages d’amour comme “Elles étaient une fois” ; “Je vous love gaze”; “Être lesbienne est une fête”, ou des messages de luttes “Moi aussi je veux être une MILF”, “Foutez nous la PaixMA” pour rappeler qu’aujourd’hui encore “Nos droits ne sont pas un débat”.

"Le féminisme est la théorie, être lesbienne est la pratique"

En tête de cortège, les lesbiennes racisées rappellent à quel point le manque de visibilité est un enjeu important. « Pour une grande majorité de personnes, quand on est racisée on n’est pas lesbienne, raconte Honorine, 22 ans. Le peu de représentations que nous avons des lesbiennes ce sont des femmes blanches. C’est pour ça qu’il est important de montrer qu’on est là, qu’on existe et que maintenant on veut nos droits. »

Autour d’elle, un cortège joyeux, festif et revendicatif s'avance dans les rues de Paris. Des slogans s’affichent sur les murs "Le féminisme est la théorie, être lesbienne est la pratique" Des chants résonnent dans les rues de Paris. “PMA, deux mamans, nous on ne ment pas aux enfants”; “Macron hypocrite, les lesbiennes vont en Belgique” ou encore “Nous on n’abandonnera pas notre enfant s’il est hétéro.”

Un moment de visibilité

Un peu plus loin, Lou, 34 ans, est venue avec trois de ses amies. « C’était important pour moi d’être ici parce que c’est un grand moment de visibilité. Rien que le mot ‘lesbienne’ est encore difficile à entendre pour certaines personnes. Alors quand je vois des gens qui s’arrêtent le long du cortège et qui nous regardent, je me dis qu’on a déjà un peu gagné. »

Céline raconte, elle, être en couple depuis huit ans avec sa copine. « On veut un bébé et pour nous c’est symbolique de se dire que ce bébé on peut le faire dans notre pays grâce à la PMA, qu’elle sera prise en charge et remboursée au même titre que si nous étions un couple hétéro. Parce que nous aussi on a le droit d’être parents. »

De son côté, Lou rappelle que la PMA pour les couples hétéros est prise en charge par la sécurité sociale. « Ce n’est pas juste, ajoute-t-elle. Il est temps de parler d’une égalité réelle que je puisse disposer de mon corps librement, que je puisse choisir entre avoir un avant ou non. Aujourd’hui, parce que je suis lesbienne, je n’ai pas ce choix-là. » Non loin d’elle, des mamans sont venues avec leurs enfants, pour rappeler que les couples lesboparental existent et qu’il est temps de faire avec.

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"Lesbiennes d'intérêt public"

Laura, 18 ans est venue avec sa copine. « C’est la première fois que je m’affiche dans la rue, raconte Laura, 18 ans. C’est très émouvant parce que j'ai fait mon coming-out en septembre seulement et je suis très touchée par tout cet amour et cette bienveillance ici. » Avec sa copine, elles tiennent deux pancartes “PMA pour toustes” et “lesbiennes de tous les pays, unissez-vous”. Au milieu, un cœur qui se dessine quand les deux pancartes se touchent. « Je suis tellement fière d’être là, de pouvoir être présente avec ma copine. Maintenant je vais me battre pour nos droits. »

Dans le cortège, des références culturelles aux ouvrages et aux films lesbiens s’affichent. Dans tous les groupes d’ami-es, un nouveau jeu : chercher les “lesbiennes d'intérêt public” comme Alice Coffin, Céline Sciamma ou encore Adèle Haenel et Marie Papillon.

En France, les marches lesbiennes sont peu fréquentes et souvent peu médiatisées. Les archives lesbiennes ont retrouvé des images de la marche de juin 1980 organisée par le Groupe des lesbiennes de Jussieu. « En 2003 aussi il y a eu une marche lesbienne à Paris, ajoute Marlène, 23 ans, membre de Collages lesbien et co-organisatrice de la marche. Mais clairement elle n’a pas eu la portée de celle-ci. Quand je voyais les cortèges arriver de tout part, j’étais trop heureuse, et surprise aussi. »

"On a déjà un peu gagné"

Cette victoire, elle l’explique par des dizaines et des dizaines d’années de militantisme et d’engagement de lesbiennes qui se sont battus pour exister et exiger des droits. « On pensait que l’on serait 600 maximum, raconte-t-elle, mais au final on était plus de 10.000. C’était incroyable, fou et je suis encore toute émue de ce que nous avons réussi à faire. »

Quelle suite donner à ce mouvement ? Les organisatrices de Collages Lesbiens disent réfléchir à de nouvelles actions. « On a déjà un peu gagné, souligne Marlène, aujourd’hui, le mot lesbienne est partout et ça c’est déjà une grande victoire. »

Sarah, 29 ans, partage cet enthousiasme. « Cette marche était fabuleuse. Maintenant il est temps que l’on puisse avoir accès à la PMA. C’est une priorité, c’est urgent là. Combien de personnes ont vu leur projet de grossesse s’éteindre ces dernières années ? Moi je suis en couple avec une femme et je veux pouvoir avoir le choix de vouloir un enfant. »

Promesse non-tenue

Beaucoup de souviennent que PMA pour toutes devait être incluse dans le projet de loi du mariage pour tous. François Hollande avait finalement décidé d'abandonner cette promesse de campagne. Huit ans plus tard, la PMA n’est toujours pas possible pour les lesbiennes, les femmes seules ou les hommes trans.

Le projet de loi bioéthique, qui devait acter l'ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes célibataire n’est toujours pas adopté. Et l'exécutif n'a toujours pas communiqué de date officielle pour l'examen du texte en dernière lecture à l’Assemblée nationale. Un texte qui en l'état ne va pas assez loin, selon de nombreuses manifestantes présentes ce dimanche.

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