scienceVIH : Moderna va commencer le test d'un vaccin à ARN messager

Par têtu· le 18/08/2021
L'ARN messager est un espoir sérieux dans la recherche d'un vaccin contre le VIH-sida

Après la publication début 2021 de premiers résultats encourageants sur le front de la vaccination contre le VIH, une nouvelle étude clinique doit désormais tester sur l'homme l'efficacité d'un vaccin utilisant la technique développée par Moderna et Pfizer contre le Covid-19 : l'ARN messager.

L'espoir d'un vaccin contre le VIH reprend décidément cette année de la vigueur. Comme le relève en France le site Numerama, la société américaine de biotechnologie Moderna, désormais largement connue du grand public puisqu'elle a donné son nom à l'un des vaccins utilisés contre le Covid-19, s'apprête à démarrer un essai clinique pour un vaccin contre le VIH, basé sur la nouvelle technologie mise en lumière dans la lutte contre le coronavirus : l'ARN messager (ARNm).

L'essai en question, dit de "phase 1", consiste à injecter pour la première fois le produit à des humains, sur un petit groupe de volontaires, afin de vérifier sa bonne tolérance par l'organisme et de mesurer la production des anticorps en fonction des doses administrées, par comparaison avec un placebo. En l'espèce, indique la note fournie par l'Initiative internationale pour un vaccin contre le sida – qui porte ce projet en collaboration avec Moderna ainsi que la Fondation Bill et Melinda Gates –, publiée le 11 août sur le site Clinical Trials, l'essai concernera 56 participants séronégatifs et peut démarrer ce vendredi 19 août, pour des résultats qui ne sont en revanche pas attendus avant le printemps 2023.

L'ARN messager et les "bnAbs" prometteurs contre le VIH

L'ARN messager est sans doute le principal espoir actuel de trouver enfin une solution de vaccin contre le virus responsable du sida. La technique, utilisée contre le Covid-19 par les vaccins de Pfizer et de Moderna, a été découverte en 1961 par deux scientifiques français de l'Institut Pasteur, Jacques Monod et François Jacob, qui ont reçu pour ces recherches le prix Nobel de médecine quatre ans plus tard. Elle consiste non plus à injecter une forme désactivée du virus pour apprendre au corps à le combattre mais à apprendre au corps à produire lui-même les protéines contre lesquelles il devra lutter pour contrer la maladie visée.

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Dans le détail, Moderna va ici tester deux approches de vaccin dont le but est d'"induire des classes spécifiques de réponses des cellules B et guider leur maturation précoce vers le développement d'anticorps largement neutralisants (bnAb) via une plate-forme d'ARNm". Derrière cette formulation complexe, on retrouve la piste de la production de "bnAbs" qui, rappelle la European Pharmaceutical Review, "a été poursuivie comme un Saint Graal dans le VIH pendant des décennies". En gros, les scientifiques cherchent à produire des protéines sanguines capables de se fixer sur les fameuses "pointes" qui hérissent la surface du virus du VIH, lui permettant de pénétrer les cellules humaines, afin de les désactiver.

Un premier test de vaccin encourageant

Sur ce point de la production de bnAbs, les résultats d'une première étude de phase 1, publiés en février dernier dans la European Pharmaceutical Review, étaient encourageants : "Le vaccin a stimulé avec succès la production des rares cellules immunitaires nécessaires pour générer des anticorps contre le VIH chez 97% des participants, expliquait alors Moderna. Cette étude de phase 1 confirme que les vaccins peuvent induire des anticorps largement neutralisants, une stratégie nécessaire pour développer un vaccin contre le VIH".

"L’ARNm pourrait considérablement accélérer le rythme du développement d’un vaccin anti-VIH"

Le nouvel essai qui s'apprête à démarrer combine cette avancée avec les promesses de l'ARN messager. "Les organisations IAVI et Scripps [auteures de l'étude, ndlr] ont prévu de travailler avec Moderna pour concevoir un vaccin à ARN messager", avait-il ainsi été annoncé en février lors de la publication de leurs résultats. Les scientifiques de l'équipe s'enthousiasmaient alors des pistes offertes : "L’utilisation de la technologie de l’ARNm pourrait considérablement accélérer le rythme du développement d’un vaccin anti-VIH".

Accélérer le rythme, mais il va tout de même encore falloir attendre avant de parvenir le cas échant à une vaccination de la population générale. Après la phase 1 de l'étude, prévue donc pour 2023, et si elle est concluante, le vaccin devra encore passer les phases 2 et 3 avant une éventuelle commercialisation. Bref, comme le savent bien les militant·e·s de la lutte contre le VIH, le mot d'ordre en la matière reste : espoir et patience.

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Crédit photo : illustration, Mat Napo/Unsplash