À la veille du second tour de la primaire pour l'investiture écologiste à la présidentielle, la candidate Sandrine Rousseau évite le sujet du travail du sexe. Europe Ecologie-Les Verts a pourtant arrêté une position de principe.
Quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup ? Pressée, dans l'entre-deux tours de la primaire écologiste pour la présidentielle 2022, de donner ses réponses sur la question du travail du sexe, la candidate Sandrine Rousseau temporise. Avant de se prononcer, "elle doit recevoir toutes les parties prenantes", indique cette semaine à TÊTU son entourage. Une manière d'éviter de trancher avant le second tour qui démarre ce samedi 25 jusqu'à mardi 28 septembre.
Après avoir reporté le rendez-vous, la candidate a tout de même prévu de rencontrer le Strass, syndicat des travailleurs·ses du sexe, ce vendredi 24 septembre dans les locaux de l'association Acceptess-T. Mais il ne faut pas s'attendre à un positionnement définitif dans la journée : "Sandrine Rousseau ne compte pas prendre une position rapidement sur un sujet aussi important, sans avoir rencontré tout le monde", insiste son équipe de campagne. Pas de quoi rassurer les militant·es du Strass : "En tant que féministe, Sandrine Rousseau a nécessairement déjà réfléchi à ces sujets !", s'étonne auprès de TÊTU Cybèle L'Espérance, porte-parole du syndicat. Alors, pourquoi la candidate s'obstine-t-elle à n'en rien dire ?
Yannick Jadot pour la dépénalisation
Son concurrent, Yannick Jadot, s'est prononcé. Il considère que "la traite des êtres humains est une partie énorme de la prostitution que nous connaissons en France" et qu'"il y a urgence à agir contre les réseaux de proxénétisme afin de protéger les personnes exploitées, et à dégager des moyens pour les réinsérer". Tout en reconnaissant que la pénalisation n'a fait que renforcer la précarité de ces personnes il avait indiqué à TÊTU en juin: "Il faut évidemment aussi protéger les hommes et les femmes qui ont choisi cette situation, en levant toutes les dispositions qui pénalisent les clients et les prostitué·es".
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À l'inverse, Sandrine Rousseau envoie des signaux contradictoires. En décembre 2020, alors qu'elle n'était pas encore candidate, elle a signé une tribune publiée dans Le Monde – dont la ministre de l'Égalité, Élisabeth Moreno, était également signataire – au sujet de la pornographie derrière laquelle se cache selon le texte des "crimes graves". "Ce que l’on désigne aujourd’hui par l’expression 'industrie pornographique' et qui produit des milliards de dollars de bénéfices à travers le monde (...) dissimule, en réalité, des réseaux criminels proxénètes et de traite des êtres humains à grande échelle", développent les signataires du texte.
"Les tournages des actes sexuels sous contrainte économique et morale, des agressions sexuelles et des viols, voire des actes de torture et de barbarie sont la réalité constante du système pornocriminel. Il piège des femmes vulnérables et les contraint, malgré leur refus clairement exprimé ou par surprise, à subir des sodomies, doubles pénétrations, viols collectifs, coups, gifles, étranglements, suffocations, jets d’urine, éjaculation faciale en meute…", énumèrent-ils encore.
Sandrine Rousseau abolitionniste ?
Un plaidoyer qui fait craindre aux associations concernées un positionnement abolitionniste de la part de la candidate. "La question du travail du sexe divise les féministes. Nous craignons que Sandrine Rousseau refuse de dire sa position pour des raisons électorales. Mais c'est une question essentielle pour nous : tant qu'elle n'a pas pris position, le Strass ne pourra pas choisir d'appeler à voter pour elle ou non", insiste Cybèle L'Espérance.
D'autant que le parti Europe-Ecologie-Les-Verts, dont Sandrine Rousseau est membre, a adopté dès janvier 2013 une position de principe en faveur de l'abrogation du délit de racolage public. Dans cette motion, EELV considère qu'il ne s'agit pas de "se positionner d’un point de vue moral, ni de faire l’économie d’une réflexion générale sur la prostitution. La volonté est ici de protéger les hommes et les femmes prostitué(e)s, de garantir leur sécurité et d’agir en faveur de leur santé". Enfin, le texte souligne que cette position "s'inscrit dans le droit fil des positions historiques des Verts en matière de prostitution (...) Il s’agit de protéger la sécurité et la santé d’hommes et de femmes dont la situation se dégrade de manière dramatique depuis 10 ans."
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Dans sa newsletter sur l'actualité du travail du sexe, TesDéesse, Elsa Gambin écrit : "Les travailleur·ses du sexe sont des électeurs et électrices comme les autres, des citoyen·nes comme les autres. Avec, aujourd’hui, moins de droits que les autres. Ils et elles méritent des réponses, d’apparaître dans un programme comme des citoyen·nes à part entière. Qu’ils et elles aient choisi leur métier ou non, là n’est pas le débat (stérile). Ils et elles existent. (...) On attend davantage. Un long entretien téléphonique, une fucking visio, une bonne heure à échanger, questionner, triturer le sujet, ou mieux encore, un groupe de travail sur la durée pour aboutir à des propositions claires, posées, engagées." Bonne nouvelle, l'élection présidentielle n'est que dans sept mois…
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