Il a 17 ans et il a été lynché par une dizaine de jeunes à Montgeron, dans l'Essonne. Yanis est venu témoigner, dans l'émission de Cyril Hanouna sur C8, non seulement de cette agression ultra-violente mais aussi du harcèlement homophobe qu'il subit déjà depuis plusieurs années, dans l'indifférence générale.
Saisissant pour le grand public, le témoignage trouve en réalité un écho universel chez les personnes LGBTQI+. Yanis, victime à 17 ans d'une agression homophobe particulièrement violente à Montgeron dans l'Essonne, dont la vidéo a été diffusée le week-end dernier sur les réseaux sociaux, a livré son témoignage ce mercredi 13 octobre sur le plateau de Touche pas à mon poste, l'émission de Cyril Hanouna sur C8. Au-delà de son récit de l'attaque terrifiante, le garçon a aussi fait celui, malheureusement si commun, du piège homophobe qui se referme souvent dès le collège sur de nombreux jeunes garçons lorsqu'ils ont le malheur d'avoir ce que leurs camarades appellent "des airs". Des airs "de pédé".
"Ils m'ont dit de bien marcher, pas comme un pédé."
Accompagné à TPMP de sa sœur, l'adolescent raconte d'abord son agression, le 30 septembre dernier dans son quartier de Montgeron par une dizaine de garçons : "Ils m'ont d'abord insulté de pédé et de gay", alors qu'il marchait simplement avec une amie. Les deux ados poursuivent leur chemin mais leurs harceleurs ne les lâchent pas : "Ils m'ont d'abord attrapé par derrière, ils m'ont jeté, ils m'ont frappé". Sa meilleure amie le relève mais le calvaire ne fait encore que commencer, car la bande revient à l'assaut : "Ils m'ont cogné la tête contre le grillage, ils m'ont jeté par terre, ils m'ont frappé, ils m'ont mis des coups de poing, des shoot dans la tête, c'était vraiment horrible". Et "tout ça gratuitement", alors que Yanis précise ne pas les connaître, et ne peut évidemment pas se défendre face à la meute : "Moi je n'avais aucune défense, à part crier". L'animateur lui demande alors ce qu'il a pensé à ce moment-là. "Que j'allais mourir, très clairement", lâche l'adolescent, qui remercie la maman venue le sauver in extremis. Ses agresseurs lui donnent ensuite pour consigne "de bien marcher, pas comme un pédé". Nous y voilà.
L'engrenage homophobe
Car pour expliquer "cet acharnement", complète sa soeur, "il faut partir du point de départ : Yanis était beaucoup sur les réseaux sociaux, il faisait beaucoup de vidéos Snapchat où il faisait des playbacks, où il dansait, où il faisait des petites manies, du coup les gens se sont dit 'ah il est gay'". Ces fameuses "manies", autrement appelées "manières", ou "des airs" et qui valent, à de nombreux jeunes garçons n'entrant pas dans les clichés standards de la virilité, d'être pointés du doigt, moqués, insultés voire harcelés ou violentés, bien souvent dès leur arrivée au collège voire dès la fin de la primaire.
À lire aussi : "Danse avec les stars" : Bilal Hassani s'adresse aux victimes de harcèlement scolaire
"Depuis ma sixième", confirme le garçon, "je me faisais harceler, des fois sexuellement". Yanis raconte alors comment, un jour, "un jeune homme est venu derrière, devant toute la cour, il m'a baissé le pantalon, j'étais tout nu devant tout le monde". Puis une autre séquence, en quatrième, quand en cours de sport "une jeune fille m'a baissé mon pantalon", encore, ou plus tard au lycée quand a il a voulu échapper à une nouvelle agression en se réfugiant dans les toilettes : "Ils sont venus avec des tournevis, ils m'ont frappé avec des tournevis…". Yanis raconte ses tentatives d'alerter le corps enseignant, ses plaintes également au commissariat de Montgeron, "une dizaine", toutes "sans suite", comme chacune de ses tentatives d'alerter des adultes responsables.
"Je ne sors plus de chez moi, je suis fini."
Le jeune homme égrène ensuite les étapes d'un terrible engrenage : la peur de retourner à l'école, les absences, le décrochage, la déscolarisation… "Tu vis un enfer depuis la classe de sixième", résume Cyril Hanouna, dans un silence de plomb sur le plateau. "C'est ça, en fait", répond Yanis. Autour du plateau, les regards sont consternés et embués, devant ce garçon qui a toute la vie devant lui mais qui dit aujourd'hui "C'est fini", qui dit "C'est la honte" d'avoir été ainsi été frappé et filmé, à tel point qu'il n'avait pas osé en parler à ses parents en rentrant chez lui. S'il est aujourd'hui remis physiquement, les séquelles psychologiques débordent de ses larmes ravalées : "Je dors vraiment très peu, j'arrive pas à m'en remettre (…), je ne sors plus de chez moi, je suis fini". Selon sa sœur, sur la dizaine d'agresseurs, trois ont été retrouvés à ce stade.
Crédit photo : Capture d'écran TPMP (replay complet ici)