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LGBTphobieUne agression homophobe reconnue avec peine par la justice à Poitiers

Par Quentin Martinez le 30/06/2023
Pour la première fois, la justice reconnaît le caractère lesbophobe d'un viol, bonnes nouvelles 2021

Neuf mois après l'agression d'un homme gay à la sortie d'une boîte de nuit à Poitiers, deux hommes ont été condamnés ce 29 juin, non sans que la défense de la victime ait à insister pour faire reconnaître le caractère homophobe des faits.

"C'est la fin de neuf mois d'attente, je suis soulagé que la justice reconnaisse le caractère homophobe de mon agression. Il fallait que ce soit reconnu", souffle Stéphane au sortir du tribunal de Poitiers, cité par La Nouvelle République. Ce jeudi 29 juin, la justice a condamné les deux hommes qui avaient agressé en novembre dernier cet homme gay de 48 ans à la sortie d'une boîte de nuit du centre-ville.

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Pour violences en réunion avec ITT de plus de 8 jours et circonstance aggravante d'homophobie, les agresseurs ont tous deux écopé de douze mois de prison, dont huit avec sursis pour l'un et six mois de sursis pour l'autre. Ils purgeront leur peine à domicile sous bracelet électronique, et il leur est interdit de paraître aux abords de l'établissement ou de rencontrer la victime, qu'ils devront indemniser. Satisfaite, l'avocate de Stéphane, Me Élise Farine, souligne néanmoins que la circonstance aggravante d'homophobie a été difficile à faire reconnaître : "Le parquet a pris le train en marche mais, face à l'évidence, il ne pouvait pas faire autrement".

L'homophobie est apparue "clairement comme motif"

"Lors de la première audience, en janvier, il n'en avait pas été question. Pendant les débats, le caractère homophobe n'avait alors pas été soulevé", retrace l'avocate auprès de têtu·. Estimant que les faits ne sont pas suffisamment établis, le juge demande un complément d'enquête. "Ce complément d'enquête a permis d'établir les faits, et le motif homophobe est apparu très clairement comme à l'origine de l'agression", reprend Me Élise Farine. "Mais il a fallu que nous demandions la requalification, souligne-t-elle, sinon rien n'aurait été modifié."

"Les faits étaient clairs", fait pourtant valoir la défense. Le 19 novembre 2022, alors qu'il profite d'une soirée entre ami au GS Club, une discothèque du centre de Poitiers, Stéphane est l'objet de moqueries puis d'insultes, proférées par deux jeunes clients de l'établissement. "Il ont mimé des gestes efféminés, puis ont lancé des 'pédé', 'tafiole', etc. Tout le package en somme", explique Me Élise Farine. À la fermeture, la clientèle sort et les deux fêtards retrouvent leur victime à l'extérieur, reprenant leur flot d'insultes homophobes. Après qu'un de ses amis est parvenu à calmer la situation, Stéphane se sent suivi tandis qu'il regagne sa voiture seul. Un des assaillants lui vole alors son téléphone, et le second lui assène un coup de poing qui le fait tomber. Pendant plusieurs minutes, les deux hommes frappent Stéphane à chaque tentative qu'il fait pour se relever.

"Au vu des nouveaux éléments, il était difficile, pour ne pas dire impossible, que le parquet rejette cette circonstance aggravante, conclut l'avocate. C'était important pour Stéphane. Même s'il va mieux, il est encore touché par ce qu'il a vécu sur le plan personnel et psychologique." Soulagé, en effet, Stéphane espère aussi que son histoire aidera à libérer la parole des victimes. Et la justice à mieux appréhender le caractère homophobe des violences anti-gay ?

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Crédit photo : Unsplash