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séries"Mon petit renne" sur Netflix : portrait d'un humoriste en jeune homme harcelé

Par Franck Finance-Madureira le 19/04/2024
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La mini-série anglaise qui cartonne sur Netflix Mon petit renne cache bien son jeu. Au programme de ce succès-surprise, l’histoire vraie du harcèlement et des abus sexuels vécus par un jeune humoriste bisexuel. Sans filtre, glaçant et salvateur…

Sa carrière de stand-uppeur ne décolle pas, alors, entre deux scènes ouvertes, le héros de la mini-série Mon petit renne, disponible sur Netflix, le jeune Écossais bi Donny Dunn, pas encore 30 ans, travaille dans un pub. Un soir, une jeune femme est en larmes au bar, il lui offre un thé et tombe dans un cycle infernal qui va lui pourrir la vie. Martha s’avère être une érotomane mythomane au passé trouble qui commence par de la drague appuyée, maintient une présence quotidienne, et très progressivement le soumet à un harcèlement d’autant plus pernicieux qu’elle parvient assez bien à ne pas trop sortir du cadre légal. Donny perd pied, et ce qu'il subit rejailli sur sa relation avec sa logeuse et ex-belle-mère, mais aussi aux débuts de son histoire avec Teri, une jeune femme trans rencontrée sur une appli.

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La mini-série s’avère plus sombre que ne le suggère son titre de téléfilm de Noël et ses atours de comédie, et ne cesse de monter en puissance au fil des épisodes. Son créateur (producteur, scénariste et comédien principal), Richard Gadd, s'est inspiré de son propre vécu, dont il avait auparavant tiré un one man show éponyme en 2019. Et la série ne s'arrête pas au récit du harcèlement qu'il a subit pendant quatre ans : lors d’un épisode 4 absolument bluffant de puissance émotionnelle, Gadd revient sur les abus sexuels dont il a été victime.

Au tout début de sa carrière d'humoriste, Richard Gadd s'était vu proposer une collaboration pour écrire une série télé, et les séances de travail s'étaient transformées en nuits de défonce imposée et de viols répétés. Dans Mon petit renne, les scènes, insoutenables et percutantes, décrivent avec précision l’engrenage mis en place par cet homme pervers et puissant pour assoir sa domination psychique et physique sur Donny.

En s’inscrivant dans une veine très proche de celle explorée dans la série-choc I May Destroy you (2020) qui racontait les conséquences du viol subi par sa créatrice (et, également, actrice principale) Michaela Coel, Mon petit renne offre un point de vue similaire et analyse en profondeur les mécanismes complexes de cette prédation et les conséquences de ces abus sexuels et moraux sur la psyché de la victime. Donny interroge ses propres ambiguïtés, questionne sa responsabilité, sa masculinité, son rapport à l’autre et sa confusion face à ses désirs protéiformes. Loin d’un quelconque exercice d’auto-apitoiement, la série analyse comme jamais les dynamiques qui lient bourreaux et victimes dans un récit de haute volée, manifeste pour la libération de la parole post-traumatique. Une leçon !

>> Mon petit renne, de Richard Gadd. Sept épisodes disponibles sur Netflix.

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Crédit : Netflix

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