Durant le premier confinement lié au Covid-19, en 2020, Nicolas Bellenchombre a créé un cabaret queer ouvert à toustes. Il raconte la genèse de ce lieu unique dans le film La Sirène à barbe, qui vogue entre fiction et réalité.
Chaque week-end, un petit cabaret de Dieppe, en Normandie (Seine-Maritime), joue à guichet fermé. Il faut dire que La Sirène à barbe est un lieu unique de fête, de shows et de paillettes. "Ce cinéma était à l’origine un lieu de spectacle, raconte Nicolas Bellenchombre, son créateur. Édith Piaf y donna d'ailleurs son avant-dernier récital et sa dernière interview télévisée." À la suite d'une agression subie en compagnie d'un ami à Dieppe en 2018, explique-t-il, "j’ai ressenti le besoin de faire quelque chose pour que l'homophobie régresse dans la ville, et que l'acceptation et la tolérance remplacent la haine". Le 11 juin 2021, le trentenaire ouvre son établissement, dont il a voulu raconter l'histoire dans un film.
Le long-métrage, coréalisé avec Arthur Delamotte en seulement douze jours, romance à peine les premières heures du cabaret. Excepté les personnages de Beluga, directeur de cabaret plus âgé que Nicolas, ou celui d’Erwan, personnage de jeune marin curieux composé à partir de plusieurs profils de jeunes hommes du coin venus s’encanailler ici, chacun joue peu ou prou son propre rôle, racontant avec pudeur et autodérision la solitude de ceux qui se sentent différents au sein des villes moyennes. "Le film raconte cette joie de se retrouver autour d’un projet commun, précise Nicolas Bellechombre, et de construire une famille avec tous les rêves qui vont avec." Le film met aussi en valeur le lien entre Dieppe et la ville anglaise de Brighton. "C’est la capitale LGBTQ+ du Royaume-Uni, une ville totalement folle qui regorge de cabarets, souligne-t-il. Il y en a partout, dans toutes les rues !"
La Sirène à barbe n'est pas le premier film de Nicolas Bellenchombre, qui a réalisé Cowboy Camembert en 2020, un road trip au Canada, et prépare aujourd'hui Volcan, avec en vedette la chanteuse québécoise Fabienne Thibeault (la Marie-Jeanne de la version originale de Starmania). En attendant la sortie en salles de ce nouveau film, la plus grande fierté de Nicolas reste le succès du cabaret : "On a un public fidèle, certains viennent chaque semaine pour nous voir et nous disent que c'est leur psychothérapie. D'ailleurs, les prolos qui ont tendance à voter RN et à être un peu fachos, quand ils viennent nous voir, on les retourne comme des crêpes !"
À lire aussi : "Viêt and Nam" au cinéma, un amour gay entre deux mineurs de fond
Crédit photo : Perspective Films