Aylo, l'éditeur des sites X Pornhub, Redtube ou encore Youporn, conteste la mise en place d'un mécanisme de contrôle de l'âge de ses utilisateurs, dénonçant une vérification intrusive, peu fiable et mettant en danger la vie privée des utilisateurs.
Vous avez jusqu'à ce mercredi 4 juin, en début d'après-midi, pour profiter des vidéos X diffusées sur les plus grandes plateformes pornographiques diffusant du sexe gay ! Le géant Aylo a annoncé lors d'une conférence de presse bloquer ses sites les plus populaires : Pornhub, Redtube ou encore Youporn. Le groupe, également propriétaire des sites gays Sean Cody, Men.com ou encore Reality Dudes, veut ainsi protester contre les menaces de fermeture par l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) s'il ne vérifie pas activement l'âge de ses internautes.
À lire aussi : Porno : le retour des censeurs
"Nous avons pris la décision difficile de suspendre l'accès à nos sites en France dès demain après-midi et d'utiliser nos plateformes pour nous adresser directement au public français", a déclaré Alex Kekesi, vice-présidente de la communauté et de la marque de Aylo, lors d'une conférence de presse à laquelle a assisté l'Agence France-Presse (AFP). Cette grève du sexe n'impressionne pas la ministre chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, Aurore Bergé. "Pornhub, Youporn et Redtube refusent de se conformer à notre cadre légal et décident de partir. Tant mieux ! Il y aura moins de contenus violents, dégradants, humiliants accessibles aux mineurs en France", écrit-elle sur X.
Vous n'aurez pas ma liberté de me branler
Les anti-porno avaient obtenu une première victoire en 2000 : une loi votée en juillet donnait mission à l'Arcom de contrôler les sites X. Depuis, ils lui ont fourni des armes : à partir du 6 juin ceux hébergés en Europe qui n'interdiraient pas l'accès au mineur pourront être mis en demeure, sanctionné d'une amende, voire interdit d'accès en France.
Aylo, hébergé à Chypre, plaide que ce n'est pas aux sites de vérifier l'âge des internautes, mais que la responsabilité incombe aux constructeurs de smartphones ou d'ordinateurs. "Dresser un mur entre les mineurs et les sites pour adultes est un défi qui nécessite une solution globale. Nous soutenons les lois qui protègent les enfants des contenus inappropriés à leur âge en ligne et qui préservent la vie privée des adultes sans entraîner des conséquences inattendues", écrit l'entreprise sur son site.
De fait, la simple déclaration sur l'honneur de la majorité (le pop-up sur lequel vous cliquez bien rapidement depuis votre adolescence), qui est la norme dans le secteur, est un filtre trop peu efficace. Selon l'Arcom, 2,3 millions de mineurs fréquentent un site X chaque année. La loi laisse aux sites le choix de la technique pour vérifier l'âge de l'utilisateur, dans le respect d'un référentiel édité par l'Arcom et validé par la Commission nationale d'informatique et des libertés (CNIL). Ce référentiel prévoit notamment le principe du "double anonymat", comme utilisé dans les services bancaires, qui permet de prouver sa majorité sans divulguer son identité.
Touche pas à mon porno
Plusieurs plateformes ont choisi de demander à leurs utilisateurs un selfie, et, grâce à l'intelligence artificielle, d'évaluer l'âge ou de prendre en photo un document officiel. Mais ces solutions posent des questions en termes de fiabilité et de sécurité de la vie personnelle. D'autant que le processus d'identification est aussi parfois défaillant : Gay Male Tube a ainsi connu un bug qui empêchait totalement l'accès au site. Le dispositif devrait par ailleurs s'appliquer aux plateformes qui ne sont pas directement destinées au porno, comme X (Twitter) ou Snapchat.
Ce n'est pas que le porno soit sacré. Mais le texte actuel prévoit l'interdiction pour tous les mineurs… jusqu'à 18 ans. Aurore Bergé espère vraiment interdire à des ados de se pignoler ? Pour la branlette, sortez vos baïonnettes !
À lire aussi : "Sans le porno, j'aurais craqué" : entretien avec Didier Lestrade
Crédit photo : Shutterstock