santé mentaleJournée du TDAH : ce que l'on sait sur ce trouble du déficit de l'attention

Par Laure Dasinieres le 12/06/2025
Le 12 juin est la Journée nationale de sensibilisation au TDAH

Longtemps pensé comme ne touchant que les enfants, le trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité affecte aussi les adultes et donc de nombreuses personnes LGBTQI+. À l'occasion de la journée nationale de sensibilisation au TDAH ce 12 juin, on vous donne quelques clés pour mieux l'appréhender.

L'époque est à la santé mentale – et c'est tant mieux, le pays en avait grand besoin. Malheureusement, trop peu d'entre nous ont suivi un cursus en psychiatrie. Alors quand on annonce au bureau avoir été diagnostiqué TDAH, ça jase à la machine à café : "il fait ça pour qu'on s'intéresse à lui", "non mais en fait on est tout un peu fou", "c'est une mode"… Ce qui est vrai, c'est qu'on parle de plus en plus du trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) : "S'il y a davantage de diagnostics aujourd'hui chez les adultes, c'est surtout qu'il existe une meilleure connaissance de ce trouble neuro-développemental que l'on pensait réservé à l'enfant et une meilleure formation des professionnels de santé", souligne Nader Perroud, professeur associé au département de psychiatrie de l'Université de Genève, co-auteur du Manuel de l'hyperactivité et du déficit de l'attention, édité chez Eyrolles.

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  • C'est quoi le TDAH ?

Comme son nom l'indique, ce trouble dérègle les facultés d'attention et peut handicaper la vie des personnes. Il ne s'agit pas d'un manque d'intelligence mais d'une manière particulière qu'a le cerveau d'organiser et de structurer pensées et cognitions. Les personnes qui vivent avec ce fonctionnement perdent souvent des objets, oublient leurs rendez-vous, ont d'immenses difficultés à suivre un mode d'emploi, une recette ou à rester concentrées durant une réunion, un film ou une conversation.

Ce trouble affecte également les difficultés d'organisation : il est très difficile pour les personnes vivant avec un TDAH de ranger leur appartement ou de faire leur valise, comme de prioriser les tâches au travail ou à la maison. Elles ont donc fréquemment la sensation d'être submergées et une forte propension à procrastiner. Pour autant, sous le coup du stress ou d'une date butoir, certaines d'entre elles peuvent travailler très efficacement.

"Dans le même temps, il peut exister des mécanismes d'hyperfocus : quand on est intéressé par une tâche, on peut s'y laisser absorber en perdant toute notion du temps jusqu'à en oublier de manger", souligne Mathieu Cerbai, neuropsychologue et président de l'association Raptor Neuropsy.

  • D'où vient ce trouble ?

Lié à des anomalies de développement et de fonctionnement du cerveau, le TDAH est présent dès la naissance. Les médecins ont identifié des causes héréditaires – il n'est pas rare que les parents en soient également porteurs – et environnementales – par exemple, des carences, de la consommation d'alcool ou de tabac durant la grossesse, ou encore des complications durant l'accouchement. Toutefois, il est fréquent que le diagnostic ne soit posé qu'à l'âge adulte, lorsque les manifestations et les comorbidités du TDAH deviennent invalidantes. Cela s'explique par le fait que les personnes ont pu mettre en place des mécanismes adaptatifs agissant comme des garde-fous. "Certaines ont des facultés intellectuelles hautes qui leur permettent de compenser et de bien suivre à l'école. D'autres ont eu des parents très présents pour les encourager ou faisaient beaucoup de sport pour palier l'hyperactivité", énumère Nader Perroud. Avec l'âge adulte, arrivent des changements environnementaux (travail, vie de couple et de famille, responsabilités accrues, fatigue…) qui sont autant de micro-facteurs de décompensation : "C'est alors tout un château de carte qui s'effondre", commente le spécialiste.

  • Et l'hyperactivité, alors ?

Chez certaines personnes, le TDAH provoque aussi une hyperactivité : elles ont la sensation d'être comme activée par un moteur interne et ont des difficultés importantes pour se détendre. Elles parlent beaucoup – quitte à ne pas pouvoir s'empêcher d'interrompre leur interlocuteur –, bougent beaucoup, bouillonnent intérieurement. Attendre son tour à la caisse ou dans le cabinet d'un médecin est un supplice. Elles ont aussi un forte tendance à l'impulsivité, avec ce que cela suppose comme risques : bagarres, accidents de la route, usage de substances, pratiques sexuelles à risques, etc.

Les personnes hyperactives ont des difficultés à identifier et à réguler leurs émotions, ce qui peut provoquer d'importantes sautes d'humeur, des accès de colère ou de tristesse qui semblent parfois injustifiées. Évidemment, tout cela peut créer des incompréhensions sinon des disputes avec l'entourage, des difficultés relationnelles et professionnelles et engendrer des discriminations.

  • Ne confondons pas

Vous pensez avoir un TDAH ? C'est tout à fait possible, mais il faut consulter pour le savoir. Les symptômes peuvent en effet se confondre avec d'autres troubles : par exemple, le surmenage ou la dépression peuvent être à eux seuls responsables de difficultés de concentration. Le TDAH est souvent accompagné de troubles du sommeil, de maladies cardio-vasculaires et métaboliques, de maux de tête, de douleurs chroniques ou encore de troubles digestifs. En outre, comme le signale Nader Perroud, "une personne avec un TDAH est souvent également concernée par d'autres troubles neuro-développementaux (troubles dys, trouble du spectre autistique) et/ou psychologiques (anxiété, dépression, troubles de la personnalité, addictions, etc.)".

  • Et pour les LGBT ?

Il n'existe pas de relation entre être LGBTQI+ et avoir un TDAH (ou l'inverse). Mais, sans que les mécanismes soient exactement connus, quelques études attestent d'une corrélation entre identité queer et trouble de l'attention, particulièrement chez les personnes assignées femme à la naissance. En parallèle, d'autres travaux suggèrent que les personnes LGBTQI+ qui vivent avec un TDAH ont davantage de manifestations de ce trouble et rencontrent davantage de difficultés psychologiques associées (anxiété, dépression) que les hétéros (sans doute du fait du stress minoritaire qui majore les difficultés psychologiques). D'où l'importance d'en parler au sein de nos communautés.

  • Attention, il y a un traitement

La bonne nouvelle, c'est que les adultes qui vivent avec un TDAH peuvent bénéficier d'une prise en charge adaptée – d'où l'importance de consulter un spécialiste afin d'obtenir un diagnostic et d'écarter d'autres troubles se manifester de façon analogue. Le diagnostic repose avant tout sur des entretiens avec la personne et sur le recueil d'informations auprès des proches. Les bilans neuropsychologiques ne sont pas obligatoires et ne permettre que d'affiner le diagnostic lorsque c'est nécessaire. "En première intention, il faut traiter les comorbidités sévères – par exemple, traiter une dépression – et voir ce qui subsiste du TDAH, note Nader Perroud. Si cela ne suffit pas, on met en place un traitement médicamenteux à base de médicaments psycho-stimulants – le plus utilisé est le méthylphénidate. C'est un traitement qui marche relativement bien, est bien toléré et présente peu d'effets secondaires." Il s'agit d'un traitement symptomatique et non d'un traitement de fond : l'attention est renforcée le temps de l'action de la molécule, mais il n'y a aucun effet à long terme sur le TDAH. En parallèle à cela, l'accompagnement par le biais de thérapies cognitivo-comportementales et/ou de coaching permet d'apprendre à mieux gérer le trouble au quotidien.

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