Brandie à intervalles réguliers lors de cette campagne présidentielle, la "carte LGBT" a de nouveau été agitée par les finalistes pour incarner la fracture entre la France d'En Marche ! et celle du Front national au cours du débat de l'entre-deux-tours.
"Et puis je vais penser aux familles, parce que vous n'y pensez pas beaucoup aux familles" a dégainé Marine Le Pen hier soir, après trente minutes de débat télévisé contre le candidat centriste, avant d'arguer que "dans votre cité [Emmanuel Macron], tout est à vendre et à acheter, (...) les ventres sont à vendre et à acheter comme d'ailleurs Monsieur Bergé, qui est un de vos soutiens, nous l'a expliqué". Assis face à elle, Emmanuel Macron a rétorqué que "la France, ce n'est pas votre vision des familles que votre père rappelait encore il y a quelques jours, de manière indigne", faisant allusion aux critiques de Jean-Marie Le Pen contre l'hommage au policier tué Xavier Jugelé rendu par le compagnon de ce dernier, avant de rebondir très rapidement sur le financement du programme de Marine Le Pen. Mais la question de la gestation pour autrui s'est de nouveau invitée dans le débat, quelques minutes plus tard :
Emmanuel Macron : Quand Madame Le Pen, vous dites que je ne respecte pas le corps des femmes, en faisant un raccourci indigne avec Monsieur Bergé, (...) c'est un mensonge. J'ai toujours dis que j'étais contre la GPA.
Marine Le Pen : Mais vous êtes d'accord pour que les GPA qui ont eu lieu à l'étranger, on les entérine sur le territoire. C'est-à-dire que vous êtes entrain de créer des filières de GPA à l'étranger (...).
Emmanuel Macron : Je suis complètement contre la GPA. Simplement quand vous avez un enfant sur le territoire français, vous vous préférerez le laisser sans droits. (...) Je suis contre le fait qu'un enfant qui n'a rien demandé à personne, et qui naît à l'autre bout du monde, subisse cela.
Marine Le Pen : Il peut très bien bénéficiez d'une tutelle...
Emmanuel Macron : Bien-sûr, et avec vous il aura la tutelle et il pourra mourir dans la rue parce qu'il n'aura plus l'AMU [que Marine Le Pen souhaite supprimer] parce qu'il n'aura pas la nationalité française.
Des propos retenus par Le Monde comme l'une des dix-neuf intox proférées par Marine Le Pen au cours du débat, et qui suivent les accusations de cette dernière contre l'Union des organisations islamiques de France (UOIF) qui, selon la candidate, soutient le leader d'En Marche ! et "invite à chacun de ses congrès des gens qui sont venus exprimer leur haine des juifs, leur haine des homosexuels, leur haine des mécréants". "Si l’UOIF prononce, invite, mène des activités qui sont contraires aux lois de la République je la ferai interdire" a répondu Emmanuel Macron, avant de riposter : "Je ne connais pas les dirigeants de l’UOIF, je ne les ai jamais rencontrés. À ma connaissance, le dernier parti politique qui les (...) a fait participer à des colloque, c’est le Front national avec monsieur Aliot", vice-président du FN et conjoint de Marine Le Pen. Puis de conclure :
Madame Le Pen, je trouve que ce débat a un mérite formidable, c'est de pouvoir vous entendre tenir des propos de compassion avec les homosexuels et les juifs de ce pays.
Homonationalisme vs soutien martelé
Par cet échange, l'héritière Le Pen a de nouveau tiré sur la ficelle homonationaliste pour prétendre à la défense des minorités sexuelles à travers la lutte contre l'islamisme radical ; une technique déjà travaillée par Donald Trump pour justifier sa politique (anti)-migratoire. Pourtant, le programme de Marine Le Pen n'accorde ni ne garantit aucun des droits aux LGBT, ni ne renforce ceux acquis par des années de lutte. La candidate frontiste propose au contraire de revenir sur la plus importante avancée en faveur des couples homos de la décennie : le mariage et l'adoption pour tous qu'elle désire abroger pour revenir à un "Pacs amélioré", gelant au passage tout débat sur la PMA et la GPA dans une seule et même proposition.
À l'inverse, Emmanuel Macron a poursuivi, lors du débat, ses efforts pour apparaître comme le défenseur des minorités sexuelles, qui ouvrira la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules, et qui reconnaîtra les enfants né par GPA à l'étranger. Lors de son meeting du 1er mai, il s'exprimait encore en faveur des familles homoparentales à La Villette.
Je défendrai ce qui a été fait durant ce quinquennat, que je protègerai toutes les familles, au nom des familles, parce que deux hommes qui s’aiment et ont des enfants, c’est aussi une famille, parce que deux femmes qui s’aiment et ont des enfants, c’est aussi une famille, (…), c’est leur droit enfin reconnu.
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