politiqueQuand soudain, Emmanuel Macron découvre l'internationale réactionnaire

Par Nicolas Scheffer le 07/01/2025
Emmanuel Macron à la Conférence des ambassadrices et ambassadeurs

Dans une allocution aux ambassadrices et ambassadeurs de France, Emmanuel Macron s'en est enfin pris à Elon Musk, le puissant patron de X (Twitter), ami de Donald Trump mais aussi des réacs de tous les pays.

Une épiphanie. Lors d'une allocution à la Conférence des ambassadrices et ambassadeurs, ce lundi 6 janvier 2025, le président Emmanuel Macron a pointé du doigt "une nouvelle internationale réactionnaire", pour dénoncer le soutien à l'extrême droite européenne d'Elon Musk, le patron de X (Twitter) nommé dans la nouvelle administration Trump qui entrera en fonction le 20 janvier. "Voilà dix ans, si on nous avait dit que le propriétaire d’un des plus grands réseaux sociaux du monde soutiendrait une nouvelle internationale réactionnaire et interviendrait directement dans les élections, y compris en Allemagne, qui l’aurait imaginé ?" a lancé le chef de l'État.

À lire aussi : Toyota, Ford, Walmart… Ces entreprises qui lâchent les LGBT sous la pression réac

Le milliardaire, également à la tête de Tesla et SpaceX et que Donald Trump a nommé à la tête d'un futur ministère "de l'efficacité gouvernementale", semble en effet se passionner ces derniers temps pour la politique européenne… Alors que l'Allemagne vient d'annoncer des élections législatives pour la fin février, Elon Musk promeut ouvertement l'AfD (Alternative pour l'Allemagne), parti d'extrême droite europhobe, anti-immigration et anti-islam ; ce 9 janvier, il doit même participer à une conversation avec Alice Weidel, sa dirigeante. Il s'en est aussi pris publiquement au Premier ministre britannique, le travailliste Keir Starmer : "Starmer doit partir et il doit être poursuivi par la justice", a-t-il tweeté, lui qui appuie le parti populiste Reform UK. De même qu'il soutient la cheffe du gouvernement italien, Giorgia Meloni, qui a qualifié l'homme d'affaires de "génie", ou encore le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, l'un des leaders du lobby réac international, qu'il a rencontré lorsque celui-ci a été reçu début décembre par Donald Trump…

Macron et les réacs…

Cette "nouvelle internationale réactionnaire", donc, qui se forme sous nos yeux, têtu· l'avait dénoncée au printemps 2022, avec notre couverture sur "le vrai lobby" pointant "comment le délire anti-LGBT de Vladimir Poutine est devenu un programme mondial" soutenu par Donald Trump, Viktor Orbán, ainsi que par Marine Le Pen et Éric Zemmour en France. Près de trois ans plus tard, ce lobby réactionnaire a gagné encore plus de pouvoir, en Russie mais aussi aux États-Unis après une campagne présidentielle transphobe et avec une Cour suprême acquise aux idées conservatrices. Il a par ailleurs essaimé en Italie avec l'élection de Giorgia Meloni, en Argentine avec celle Javier Milei, et il fait des émules en Bulgarie, en Roumanie, en Géorgie

Si la prise de conscience élyséenne est salutaire, dommage que le président de la République n'ait pas mieux veillé à ne pas arroser les fleurs réactionnaires. D'ailleurs, rien que depuis sa réélection, lui-même a rencontré Elon Musk à plusieurs reprises : en décembre 2022 aux États-Unis, en mai 2023 à l'Élysée, et encore en décembre dernier lorsqu'il l'a invité à la réouverture de Notre-Dame de Paris. Ignorant les appels de certains proches à instaurer un bras de fer, le chef de l'État semble encore convaincu que sa capacité de séduction peut suffire à convertir les réacs de ce monde. Mais qui influence l'autre ? Non content de promouvoir, gouvernement après gouvernement, une brochette de ministres issu·es de La Manif pour tous, Emmanuel Macron s'est autorisé, l'an dernier au cours de la campagne pour les élections européennes, une sortie contre le changement de genre à l'état civil digne d'un tweet muskien.

À lire aussi : Marine Le Pen reçoit Viktor Orbán, Erdoğan applaudit Meloni, et les LGBT trinquent

Crédit photo : Aurélien Morissard / AFP

politique | monde | lobby réac | extrême droite | Emmanuel Macron | Donald Trump