Une exposition du Palais de Tokyo sur le réchauffement climatique, en partenariat avec un musée d'État au Qatar, est sous le feu des critiques. La présidente Emma Lavigne s'est défendue en relativisant la situation des homosexuels dans l'émirat.
Le monde brûle, et le torchon aussi entre le Palais de Tokyo - dont le club, le Yoyo, accueille pourtant de nombreuses soirées queer - et la communauté LGBT+. Interrogée dimanche 23 février par l'AFP, la présidente du Palais de Tokyo, Emma Lavigne, a répondu à la polémique qui dure depuis déjà plusieurs semaines sur l'exposition "Notre monde brûle", sur la thématique du réchauffement climatique. Celle-ci, qui a débuté le 21 février et se prolongera jusqu'au 17 mai - date, ironie du sort, de la Journée mondiale contre l'homophobie et la transphobie - est organisée en collaboration avec le Mathaf, un musée établi au Qatar. Un partenariat vivement critiqué.
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Le musée d'art moderne est une institution d'État, gérée par la Qatar Museums Authority (QM) sous la direction de Sheikha al Mayassa. Or, dans l'émirat qatari, les droits LGBT+ sont tout simplement inexistants. L'homosexualité y est illégale et punie d'une peine de 7 ans de prison, voire même de la peine de mort lorsque la personne mise en cause est de confession musulmane. Les personnes transgenres ne peuvent pas changer leur mention de sexe à l'état civil. Et les personnes LGBT ne sont pas les seules concernées : les droits des femmes ou encore des travailleurs étrangers ne sont pas plus protégés.
"Marges de progression"
Pourtant, auprès de l'AFP, Emma Lavigne a relativisé la situation des homosexuels dans le pays du Golfe : "Le Qatar est un pays très neuf. Il y a la charia dans la Constitution mais pas d'application de la peine de mort. La dernière exécution date de 1974. Il a encore des marges de progression à faire sur la question de l'homosexualité, mais en France, l'homosexualité n'avait pas été reconnue jusqu'à récemment. Au Qatar, elle est tout à fait tolérée dès lors qu'elle n'est pas démonstrative. Dans les années 1950-1960 en France, aux États-Unis, c'était ainsi. Et il y a encore beaucoup d'homophobie en France."
La collaboration entre le Palais de Tokyo et le Mathaf avait en premier lieu été critiquée par plusieurs artistes dans le mensuel britannique The Art Newspaper. "Cela fait partie de la stratégie éhontée et à long terme du gouvernement qatari pour corrompre la société française et assouplir sa position sur les questions des droits de l'homme dans la région du golfe Persique", avait par exemple estimé le philosophe Yves Michaud, ancien directeur des Beaux-Arts de Paris. De son côté, l'artiste azerbaïdjanais Babi Badalov, militant LGBT+ réfugié à Paris, avait appelé la "communauté gay" à "se battre pour l'annulation de l'exposition". Malgré ces protestations, l'exposition a bien vu le jour.
Crédit photo : Coldcreation / Wikimedia Commons