Manuel Guerrero est poursuivi au Qatar après avoir été piégé par la police sur l'application de rencontres gays Grindr. Séropositif, l'homme de 44 ans pourrait rapidement être à court de son traitement antirétroviral.
Il a été relâché mais il ne peut pas rentrer dans son pays, selon sa famille. Manuel Guerrero a été détenu pendant près de deux mois au Qatar après avoir été piégé par un faux profil Grindr tenu en réalité par des policiers. Porteur du VIH, cet homme gay mexicano-britannique de 44 ans pourrait bientôt se trouver à court de son traitement antirétroviral, alerte son frère, Enrique Guerrero, auprès du magazine LGBTQI+ étasunien The Advocate. Sa famille réclame qu'il puisse quitter le Qatar.
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Salarié de la compagnie aérienne Qatar Airways, Manuel Guerrero vit depuis sept ans dans l'émirat, où l'homosexualité est criminalisée. Fin février, l'ONG Amnesty International avait lancé une alerte exprimant sa "préoccupation concernant la détention de Manuel Guerrero en Qatar en raison de son orientation sexuelle". Pensant se rendre à un rendez-vous avec un garçon rencontré sur Grindr, dans la capitale Doha, Manuel était en fait attendu par la police qui l'a placé en détention provisoire le 4 février. Dans plusieurs pays arabes, les pièges tendus sur les applis de rencontres sont une technique utilisée par les autorités pour mener une chasse aux gays.
Manuel Guerrero attend son procès
En apprenant son statut sérologique, les autorités qataries auraient placé Manuel à l'isolement tout en refusant de lui fournir ses antirétroviraux, rapportent nos confrères britanniques. Au cours de sa détention, "il a été contraint de signer de nombreux documents en arabe qu'il ne comprend pas. Il n'a pas eu d'interprète, ni d'avocat. Les ambassades n'ont jamais été informées par le gouvernement qatari", avait dénoncé Enrique Guerrero fin février auprès de l'AFP, pour appeler à une mobilisation internationale.
La pression a porté ses fruits puisque, comme l'a indiqué le ministère mexicain des Affaires étrangères cité par le quotidien espagnol El Pais, Manuel, enregistré au Qatar comme citoyen britannique, a obtenu mi-mars la fin de sa détention provisoire et a été relâché en attendant son procès, qui devrait débuter le 22 avril. Il n’a toutefois pas encore été informé des accusations formelles qui pèsent sur lui : au moment de son arrestation, ses proches avaient rapporté qu'il était inculpé pour possession de drogue, sévèrement punie au Qatar, après que la police a, selon son frère, caché un quart de gramme de méthamphétamine dans son appartement. Mais l'homosexualité est aussi criminalisée au Qatar. "Il est dans une situation difficile car il ne peut pas travailler, et le Qatar est un pays extrêmement cher. D'autant qu'il souffre de stress post-traumatique après la torture qu'il a endurée", dénonce son frère toujours dans The Advocate.
"Qatar Must Free Manuel"
"L'État du Qatar ne fait rien pour qu'il puisse accéder à ses antirétroviraux. Son procès va certainement durer plusieurs mois et nous n'aurons pas assez de médicaments. Nous avons besoin du soutien du gouvernement britannique car nous devons rapatrier Manuel. La situation est très critique", alerte Enrique. "Nous apportons notre soutien à un homme britannique au Qatar", s'est contenté de déclarer le ministère des Affaires étrangères du Royaume-Uni.
Un porte-parole de Grindr a répondu à The Advocate sur cette affaire : "Nous sommes indignés de ce qui arrive à Manuel Guerrero qui est contraint de rester au Qatar en raison de son orientation sexuelle et à qui l'on refuse sa médication contre le VIH. Nous avons conscience que, dans certaines régions du monde, la police abuse des plateformes digitales comme Grindr pour cibler les personnes LGBTQI+. Pour soutenir nos utilisateurs au Qatar, nous avons posté des messages d'alertes de potentielles menaces dans la région. Nous encourageons nos utilisateurs à vérifier l'identité des personnes avec ils parlent via les appels vidéos avant de faire des rencontres." Sur les réseaux sociaux, le mot-clef #QatarMustFreeManuel a été lancé pour exiger sa libération du pays.
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Crédit photo : Comité de soutien à Manuel Guerrero