Une proposition de loi intitulée "Stop LGBT" doit être examinée en Pologne la semaine prochaine. Elle vise à interdire la "propagande homosexuelle dans l'espace public".
On aurait pu penser que les LGBTphobies d'État en Pologne allaient refluer. Le retrait de plusieurs proclamations de zones "sans idéologie LGBT" permettait d'espérer un mieux. Mais la semaine prochaine, les parlementaires doivent examiner une proposition de loi d'initiative citoyenne dont l'intitulé dit tout de son ambition : "Stop LGBT".
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Copiée-collée de celle adoptée dans la Hongrie de Viktor Orban, elle même importée de la Russie de Vladimir Poutine, cette loi entend interdire la "propagande homosexuelle dans l'espace public", indique le quotidien polonais Gazeta Wiborcza. Mais aussi de rendre illégale la "promotion d'orientations sexuelles autres que l'hétérosexualité", "la remise en cause du mariage en tant qu'union entre un homme et une femme" ainsi que "la promotion de l'activité sexuelle chez les enfants et les adolescents de moins de 18 ans". Et le texte de préciser que la "promotion" signifie "toute forme de diffusion, d'agitation, de lobbying, de déclarations, d'attentes, de demandes, de recommandations". Une mesure qui mettrait à mal toute prévention contre le VIH et les IST auprès des jeunes.
Ce n'est pas tout puisqu'il s'agit également d'interdire "l'utilisation de symboles religieux d'une manière qui pourrait heurter les sentiments religieux" ou encore l'usage "d'emblèmes ou de drapeaux transformés artistiquement" et "tout objet à caractère érotique ou sexuel, en particulier les objets imitant la reproduction d'organes". Objectif : "défendre la constitution de la Pologne", cite Polish news. "Si le parlement polonais approuve cette loi, cela rendra les actions de la communauté LGBTQI+ encore plus difficile qu'en Russie avec la loi anti-propagande", regrette sur Twitter le directeur de l'ONG Forbidden Colours, Remy Bonny.
Dans la lignée des propos LGBTphobes de l'exécutif
La proposition de loi, qui a été inscrite à l'agenda parlementaire au 28 et 29 octobre, est accompagnée d'une pétition de soutien recueillant quelque 140.000 signatures, a-t-on appris ce jeudi 21 octobre. Poussée par la "Fondation pour la vie et la famille", le texte est défendu par Kaja Godesk, militante ultra radicale connue pour ses positions anti-avortement. Pour l'heure, il est difficile d'évaluer si la proposition de loi aura un écho favorable auprès des députés.
Mais les déclarations de l'exécutif ne présagent rien de bon pour les personnes LGBTQI+. Pour le président Andrejz Duda "l'idéologie" LGBTQI+ est "proche du néobolchévisme". Pour le ministre de l'Education, cette "idéologie" "a les même racines néomarxistes que le national-socialisme hitlérien". Selon lui, les personnes LGBTQI+ "ne sont pas égales aux gens normaux" - sic.
Un référendum en Hongrie début 2022
Face à ces dérives, la Pologne est accusée par les institutions européennes de ne pas respecter les traités en discriminant les personnes LGBTQI+. La Commission européenne a lancé une procédure d'infraction contre le pays, pouvant aboutir à des sanctions diplomatiques et financières. Elle a également menacé de priver cinq régions polonaises de subventions. Nouvellement élu à la tête du groupe Renew, l'eurodéputé ouvertement gay Stéphane Séjourné a appelé la Commission à se saisir du mécanisme d'État de droit. Face à cette pression, le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, a assuré qu'il ne "céderait pas au chantage" européen.
Cette loi ressemble trait pour trait à un texte similaire adopté en Russie en 2013 et qui a permis de poursuivre plusieurs militants LGBTQI+. La Hongrie a également adopté des amendements similaires. Face au tollé provoqué en Europe, le premier ministre Viktor Orban a annoncé la tenue d'un référendum, qui aura lieu début 2022.
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