Après avoir fait ses preuves au cinéma dans A Star Is Born, Lady Gaga épate en parvenue vengeresse dans House of Gucci, de Ridley Scott. Un film somptueux qui en met plein les yeux mais qui peine à pleinement émouvoir.
Après des mois d'attente, des photos de tournage capturées à la dérobée et des déclarations dans la presse qui laissaient pour le moins circonspects, la sortie de House of Gucci est enfin arrivée. Au cinéma en France dès ce mercredi 24 novembre, le nouveau film de Ridley Scott – à qui l'on doit, notamment, Alien, Gladiator et Thelma & Louise – entreprend de revisiter une affaire troublante : celle du meurtre de Maurizio Gucci, commandité par son ex-femme Patrizia Reggiani, au printemps 1995.
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Malgré une scène d'ouverture centrée sur le défunt milliardaire campé par Adam Driver, le film fait le choix de suivre en priorité la trajectoire de Patrizia. C'est Lady Gaga qui s'y colle, forte de ses débuts au cinéma prometteurs dans A Star Is Born. En s'entichant de Maurizio, cette fille issue d'un milieu modeste est parvenue à se faire une place, difficilement, au sein du clan Gucci. Un acte majeur du film se focalise ainsi sur sa montée en puissance. Une autre, tout logiquement, sur sa descente aux enfers… et sa décision irréparable.
House of Grandiose
S'il y a bien une chose qu'il faut reconnaître chez Ridley Scott, c'est sa capacité à offrir du vrai spectacle. De bout en bout, House of Gucci est un étalage d'opulence, à l'image de la dynastie italienne qu'il met en lumière. Les décors, superbes et assemblés avec minutie, viennent alors compléter les personnages, tous sublimés par une garde-robe tout aussi pointilleuse.
On se demande, par moments, si l'on est pas en train de regarder une énième production de Ryan Murphy – après tout, la trame du film aurait pu être le propos d'une saison d'American Crime Story pour peu que l'anthologie s'exporte en Italie. Mais nos doutes s'estompent vite : en dépit de ses élans mélodramatiques çà et là, House of Gucci s'ancre dans un réalisme parfois anxiogène, aux antipodes des productions souvent poussives et ouvertement camp du créateur de Glee.
À bien des égards, le film s'apparente à un soap opera grandiose, financé avec le budget d'un blockbuster et porté par un casting que tout émule des Feux de l'amour rêverait de pouvoir se payer. Al Pacino et Jeremy Irons, pontes du cinéma hollywoodien, sont comme des poissons dans l'eau sous les traits des frères Aldo et Rodolfo Gucci. Quant à Adam Driver, l'ex-vilain de Star Wars est convaincant en nerd maladroit devenu homme de pouvoir intransigeant. Deux (légers) reproches sont à faire : le premier concerne Jared Leto, dont la performance over the top frôle l'absurde et détonne du reste de ses camarades de jeu – en parallèle, ce choix particulier de casting et l'usage d'un costume rembourré (fat suit) interrogent tout au long du film. Le second bémol concerne la Française Camille Cottin, sous-exploitée et trop peu présente à l'écran. Tristesse.
Lady Gaga, une évidence
Mais ces petites déceptions paraissent dérisoires face à la prestation de Lady Gaga qui occupe tout l'espace et fait de chaque scène, légère comme dramatique, son terrain de jeu. Bien qu'on ait pu trouver risibles ses interviews où elle avançait n'avoir fait qu'un avec le personnage, son interprétation stellaire de Patrizia Reggiani lui donne raison. À travers un jeu travaillé, la popstar rend crédible son évolution, de fausse ingénue à épouse déchue. Cela suffira-t-il pour faire de l'ombre à Kristen Stewart dans Spencer lors des prochains Oscars ? Les paris sont ouverts.
Au bout du compte, ce que l'on peut surtout critiquer chez House of Gucci, c'est sans doute sa durée – plus de 2h30, une longueur pas toujours justifiée – et son manque d'émotion. Car si ses personnages extravagants s'agitent sans cesse sous nos yeux, leurs tribulations peinent à toucher. Mais sur ce plan, la faute repose peut-être sur le fait divers sur lequel se base le film. Cependant, l'idée d'un soap opera façon Ridley Scott fonctionne, en partie grâce à un travail de reconstitution somptueux. Une pépite d'esthétique et une Gaga au sommet : c'est un grand oui.
Crédit photo : Universal Pictures International France