transidentitésUne nageuse universitaire trans enchaîne les victoires… polémique aux États-Unis

Par Tessa Lanney le 09/12/2021
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Le succès de la nageuse universitaire américaine Lia Thomas dans les piscines de l'Ivy League relance outre-Atlantique le débat sur la place des femmes trans dans les compétitions sportives.

"Le processus de mon coming out en tant que trans couplé à la poursuite de la natation constituait beaucoup d'incertitudes et d'inconnu", anticipait en juin Lia Thomas dans une interview à Penntoday, le journal de l'université de Pennsylvanie où étudie la jeune femme de 22 ans. Aujourd'hui, elle fait partie de l'équipe féminine de son université membre de l'Ivy League, soit les huit universités les plus prestigieuses des États-Unis. Et elle enchaîne les victoires.

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Début décembre, Lia Thomas remportait notamment trois épreuves du Zippy International de l'Université d'Akron, établissant trois records scolaires et deux de l'Ivy League. Elle a surtout obtenu la qualification "A" de la NCAA (association sportive universitaire américaine), ce qui la qualifie d'office pour le championnat national qui aura lieu en mars prochain à Atlanta. Avant la rencontre, elle était arrivée en tête du classement de la NCAA dans l'épreuve à domicile du 200 mètres nage libre. Outsports nous apprend qu'elle est la première femme trans à concourir en natation féminine au sein de la NCAA depuis Natalie Fahey en 2019.

La place des femmes trans contestée dans le sport féminin

Le championnat permet en effet aux étudiantes trans de participer aux compétitions sportives féminines dès lors qu'elles ont suivi un traitement de suppression de testostérone pendant au moins un an. Mais bien qu'elle se soit pliée au règlement, la réussite de Lia Thomas n'est pas au goût de tous. "Les femmes trans n'ont pas leur place dans les compétitions de sports féminins. Pas de si; pas de mais; pas d'exception", peut-on notamment lire sur Twitter. "C'est ridicule. Tellement injuste pour les nageuses qui travaillent si dur", renchérit un autre détracteur.

Rappelons que 62% des Américains, sur un échantillon de 1.000 adultes, pensent que les athlètes transgenres devraient concourir dans la catégorie correspondant à leur genre de naissance, selon l'enquête annuelle réalisée par Gallup sur les valeurs et les croyances. La polémique autour de Lia Thomas s'est intensifiée lorsque le New York Post a fait mention de son deadname et que le Daily Mail a publié plusieurs photos datant d'avant sa transition.

Laurel Hubbard déjà victime de critiques

Ce débat n'est pas nouveau, et a déjà fait couler beaucoup d'encre alors que Laurel Hubbard est devenue cet été la première athlète trans à participer aux Jeux olympiques. L'haltérophile avait, tout comme Lia Thomas et bien d'autres avant elles, été accusée d'être physiquement avantagée par rapport à ses concurrentes cis. Dans les pages de Ouest France, Eric Arassus, alors président de la Fédération sportive gaie et lesbienne, avait alors rappelé : "L’athlète néo-zélandaise a été éliminée rapidement, ce qui montre qu’elle n’a pas de meilleurs résultats que ses concurrentes. Il n’y a pas de sujet pour nous."

Le Comité international olympique (CIO) a d'ailleurs publié le 16 novembre un nouveau "cadre sur l'équité, l'inclusion et la non-discrimination sur la base de l'identité sexuelle et de l'intersexuation". Le communiqué du CIO rappelle que ce cadre a été défini sur la base d'une large consultation qui aura duré deux ans, avec "plus de 250 athlètes et parties prenantes concernées". Bien qu'il ne fixe pas de règles à proprement parler sur l'inclusion des personnes trans dans le sport en général, il fournit dix "principes" afin de guider les fédération sportives dans la rédaction de règles. Ces principes seront appliqués dès les JO d'hiver de 2022 à Pékin. Dans le cadre d'un "déploiement complet", des webinaires seront organisés afin de conseiller les fédérations internationale et les athlètes.

Inclusion des sportives trans : les principes du CIO

Les précédentes règles, datant de 2015, imposaient notamment aux femmes trans d'avoir des niveaux de testostérone inférieurs à 10 nmol/L pendant un an. Or, la notion d'un niveau de testostérone "normal" était largement contestée, notamment en raison de la participation d'athlètes présentant une hyperandrogénie. Le plus célèbre exemple est celui de la coureuse sud-africaine Caster Semenya, soumise à des tests sexuels invasifs et à qui l'on demande depuis 2009 de réduire ses niveaux pourtant naturels de testostérone. Elle se bat depuis des années devant les tribunaux afin de contester cette dernière ordonnance.

Le nouveau cadre ne mentionne aucun niveau spécifique d'hormones. Il stipule également que "les critères d'admission pour une catégorie donnée ne devront pas comprendre d'examen gynécologique ou des formes similaires d'examen physique invasif visant à déterminer le sexe d'un athlètes, son intersexuation ou son identité sexuelle". Le CIO s'est également exprimé sur le supposé "avantage injuste" qui colle à la peau des sportives trans. Précisant que toute restriction quant à la participation d'un·e athlète doit être fondée sur des "recherches solides et évaluées par des pairs". Les personnes concernées doivent également avoir la possibilité de contester ces restrictions.

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Crédit photo : Brian Matangelo via Unsplash