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QueertopieQueersmas, l'initiative pour un Noël solidaire entre personnes LGBTQI+

Par Léa Fournier le 17/12/2021
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QUEERTOPIE. Si les fêtes riment avec magie de Noël pour certain·e·s, pour d’autres, elles sont plus difficiles à vivre. Pour lutter contre la solitude, Bonnie, du compte Instagram @out_ragee, a mis en place une initiative salutaire.

Être LGBTQ+, c’est parfois choisir sa famille. Bonnie (il/elle/iel), 40 ans, lesbienne non-binaire, en a bien conscience. « Noël n’est pas une période que j’aime particulièrement », explique la militante queer et féministe. « L’idée du Queersmas est venue comme ça : parfois, on est coupé·e·s d’un pan de notre famille car on est queer, ou alors on est trop précaires pour la retrouver au moment des fêtes. Alors on a besoin de cette solidarité, d’être entre nous pour se soutenir, d’avoir une “famille choisie”. » 

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Elle a lancé le Queersmas en 2020. Le concept est simple : un échange de cadeaux entre membres de la communauté LGBTQ+. On peut évidemment envoyer ou recevoir un cadeau. Mais il est aussi possible d’envoyer un présent sans en recevoir ou l’inverse, pour les bourses les plus précaires. « L’idée, c’est que tout le monde y trouve son compte : certains ont envie d’offrir, d’autres n’ont pas les moyens ou la force mentale de créer quelque chose pour faire un cadeau », explique Bonnie. Une fois tous les participants réunis sur un grand tableau Excel, l’organisatrice répartit les binômes et leur communique leurs mails et adresses respectifs. Ensuite, les Queer-partenaires n’ont plus qu’à s’envoyer des petits cadeaux, d’une valeur d’environ cinq euros, ou une carte de vœux. 

Noël ensemble

Si l’idée du Queersmas a découlé d’un constat global quant à l’exclusion des personnes LGBTQ+ lors des périodes de fêtes, la décision de Bonnie de lancer le concept est aussi une conséquence de la crise du Covid-19. « L’objectif de cette démarche est de casser l’isolement. Avec la pandémie début 2020, je me suis rendue compte que la communauté était encore plus présente sur les réseaux. », raconte Bonnie.

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« De nombreuses personnes ne travaillaient plus, d’autres étaient en télétravail. Et surtout, on ne sortait plus et certains membres de la commu souffraient de la solitude… Voire d’angoisse. » Au moment des fêtes de fin d’année, elle a un déclic : « Comme tout le monde, j’ai réalisé qu’on ne pourrait pas forcément sortir, rejoindre nos familles. Et je me suis dit : on va former notre propre famille. »

"Queersmas" sans frontières

Son initiative rencontre un véritable succès : 170 personnes environ ont participé au Queersmas en 2020. Cette année, iels sont plus de 300 à s’être inscrit·e·s et engagé·e·s à envoyer ou recevoir un cadeau. Si la majorité des participant·e·s vivent en France, l'initiative de Bonnie est aussi plébiscitée dans toute l’Europe. « Une partie des participant·e·s du Queersmas sont expatriés, alors il y en a en Allemagne, en Belgique, en Suisse, au Portugal, en Italie… Et même en Suède, en République Tchèque ou encore en Pologne. »

Alors Bonnie répartit les binômes en fonction de la localisation de chacun·e, afin que les frais de port ne soient pas trop élevés. « En plus, les gens sont très facilitants. Certains précisent à la fin de leur inscription qu’ils sont prêts à payer les frais de port y compris pour un envoi à l’étranger. Il y a même une personne qui m’a écrit : “Je suis prête à payer les frais de port de la personne qui m’enverra mon cadeau”, car elle était assez loin. »

Cadeau sur mesure

Bonnie, en véritable Père Noël improvisé, a à cœur de faire en sorte que tout le monde reçoive un cadeau qui lui fasse plaisir. Elle crée donc les duos en fonction des demandes, besoins et envies. Dans son questionnaire pour l’inscription, chacun peut apporter des précisions : « Je suis vegan », « j’aurais besoin d’un emballage neutre car mes parents ne sont pas au courant que je suis queer »…

Parfois, le hasard fait bien les choses : « Cette année, une personne m’a écrit qu’elle aimerait bien recevoir une bougie. Et une autre personne m’a précisée qu’elle en fabriquait ! Dans ces cas-là, les binômes sont évidents. »

Créer du lien

Cette organisation personnalisée prend évidemment un temps fou à Bonnie – qui est tout de même aidée par des ami·e·s. Mais pour elle, le Queersmas est une source de joie et de fierté. « Cette année, la maman d’une petite fille trans de sept ans m’a envoyé un message en disant qu’elle voulait participer. J’ai trouvé ça trop mignon. », se réjouit-elle. « D’autres personnes m’ont dit qu’elles avaient déjà participé l’année dernière. Ça fait plaisir de voir que ça leur a plu et qu’iels sont content·e·s de recommencer ! » Bonnie reçoit aussi des photos des cadeaux et de bonnes nouvelles : « Certain·e·s Queer-partenaires se sont rencontré.e.s grâce au Queersmas et sont devenu.e.s potes. Et c’est aussi le but : que les gens se rencontrent et créent un lien, même virtuellement. »

Quid de l’évolution Queersmas ? L’initiative pourrait-elle devenir un véritable repas de Noël, dans un futur post-Covid ? Bonnie répond « pourquoi pas ! » et admet qu’on lui a déjà posé la question. Elle précise cependant que « ce n’est pas dans les clous ». « Tout se réfléchit, ça demanderait une certaine organisation géographiquement… Mais une méga boum de Noël avec des cadeaux, ça serait génial. »