À sept mois de l'ouverture de la Coupe du monde de football 2022 au Qatar, la présidente de la fédération de foot de Norvège élève la voix pour dénoncer le manque de garanties en matière de sécurité pour les LGBTQI+, appelant à un engagement concret et public du pays hôte.
Les billets sont en vente, mais les lois anti-gay sont encore en vigueur. Quelques jours après l'ouverture de la billetterie pour assister à la Coupe du monde de football 2022 au Qatar (du 21 novembre au 18 décembre), la présidente de la Fédération norvégienne de foot, Lise Klaveness, alerte sur l'absence de garanties de sécurité pour les LGBTQI+ compte tenu de la législation homophobe du pays hôte, une situation déjà largement dénoncée par les ONG de défense des droits humains.
"Lorsqu'on attribue le Mondial à un pays où le mode de vie des LGBTQ est interdit, le football doit s'assurer que tous les fans et tous les joueurs auront accès au tournoi. Pour le moment ce n'est pas le cas, pointe l'ancienne joueuse internationale dans un entretien à l'agence allemande SID rapporté par L'Équipe via l'AFP. Ils ont commencé à vendre des billets mais les interdictions sont toujours en vigueur. Nous devons nous assurer que ces lois soient suspendues pendant le Mondial, et que ce soit rendu public." Et d'ajouter, étant elle-même lesbienne : "Je dois pouvoir aller là-bas avec la certitude que je ne vais pas être emprisonnée pour quelque chose qui est mon droit".
"Ne venez pas insulter toute la société à cause de ça (…) Ici on ne peut pas changer les lois. Vous ne pouvez pas changer de religion pendant 28 jours de Coupe du monde".
Au Qatar, l’homosexualité est en effet passible de 7 ans d'emprisonnement. Le directeur général de l'organisation de la compétition, Nasser Al-Khater, a toutefois assuré "à tous les fans, quel que soit leur genre, leur orientation (sexuelle), leur religion ou leur race, que le Qatar est l’un des pays les plus sûrs au monde et qu’ils seront tous les bienvenus". Mais sans donner aucune garantie concrète. Au contraire, l'homme en charge de la sécurité de la Coupe du monde, Abdulaziz Abdullah Al Ansari, a déclaré : "Vous voulez manifester votre point de vue sur la situation (LGBTQ), faites-le dans une société où il sera accepté (…) Ne venez pas insulter toute la société à cause de ça (…) Ici on ne peut pas changer les lois. Vous ne pouvez pas changer de religion pendant 28 jours de Coupe du monde".
Le Mondial au Qatar déjà entaché
Ahmed Benchemsi, porte-parole de la division Moyen-Orient de Human Rights Watch, souligne pour têtu· l'hypocrisie de Doha sur ces sujets : "En affirmant que les LGBTQI+ pourraient être tranquilles pendant le Mondial, les autorités qataries reconnaissent automatiquement qu'il y a un problème et que leur législation homophobe est une violation majeure des droits humains". Et d'alerter en outre sur les conséquences potentielles de l'organisation de l'événement pour les personnes LGBTQI+ vivant sur place : "La surveillance de la population va se pérenniser et par conséquent renforcer la surveillance des populations LGBTQI+."
Cette édition de la Coupe du monde est déjà entachée par les révélations sur le sort des travailleurs migrants qui ont en ont bâti les infrastructures, dont des milliers ont trouvé la mort sur les chantiers selon Amnesty International. Lise Klaveness n'avait déjà pas mâché ses mots à ce sujet lors d’un congrès de la Fifa le 31 mars à Doha, capitale du Qatar, comme l'avait rapporté Ouest France : "En 2010, la Coupe du monde a été attribuée par la Fifa de manière inacceptable avec des conséquences inacceptables (…) Les droits de l’homme, l’égalité, la démocratie, et les intérêts fondamentaux du football n’ont figuré dans le onze de départ que bien des années plus tard. Les travailleurs migrants blessés ou les familles de ceux qui sont morts pendant la préparation de la Coupe du monde doivent être pris en charge." Bref, ce Mondial 2022 présente bien des arguments pour nourrir les appels à son boycott.
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