Une Cour d'appel a annulé les poursuites engagées contre un militant LGBT dans l'affaire dite "des étudiants de Kairouan", arrêtés et condamnés en 2015 en vertu du code pénal tunisien dont l'article 230 sanctionne les actes homosexuels. Ce dernier demeure néanmoins en vigueur.
Ce n'est pas la guerre, mais une bataille. En Tunisie, une Cour d'appel a jugé "nulles et non avenues" les poursuites engagées contre un militant queer dans un procès emblématique de la cause LGBTQ dans le pays, ont annoncé ce mardi 3 janvier à l'AFP une ONG et un porte-parole judiciaire.
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L'affaire remonte à 2015 quand six étudiants avaient été arrêtés sous l'accusation de "sodomie", avant d'être condamnés à trois ans de prison et bannis de la région de Kairouan (centre) pour trois années supplémentaires. L'année suivante, leur peine avait été réduite en appel à 40 jours de détention, mais en 2018 la Cour de cassation était revenue sur ce verdict et avait renvoyé de nouveau l'affaire en appel. Cinq d'entre eux ont entretemps trouvé refuge à l'étranger où ils ont obtenu l'asile, mais l'un d'eux, qui se fait appeler Daniel, était en Tunisie lors du nouveau procès le 19 décembre dernier. La décision ne concerne donc que lui.
Homosexualité en Tunisie : l'article 230
"C'est une victoire pour Daniel et pour nous", s'est félicitée l'Association Tunisienne pour la Justice et l'Egalité (Damj) dans un message à l'AFP. Reste que les poursuites ont été abandonnées en raison d'un vice de procédure, "parce que la police avait ouvert l'ordinateur" de Daniel sans autorisation judiciaire, a précisé aussi à l'AFP le porte-parole de la Cour d'appel de Kairouan (centre), Riadh Ben Halima.
Le jour du procès en appel, une trentaine de militants de la cause LGBTQ s'étaient rassemblés devant le tribunal de Kairouan, à l'appel de Damj et de la Ligue tunisienne des droits de l'homme (LTDH), pour appeler à "supprimer l'article de la honte", en référence à l'article 230 du code pénal qui sanctionne les actes homosexuels par une peine pouvant aller jusqu'à trois ans de prison. L'article 230 remonte à 1913, sous la colonisation française, mais a été conservé dans la législation après l'indépendance en 1956.
Cette loi rétrograde prévoit aussi un test anal, pratiqué par des médecins légistes, dénoncé comme "dégradant et inhumain" par plusieurs ONG comme Human Rights Watch (HRW) qui réclament son abolition. Si les militants LGBT+ sont sortis de l'ombre en Tunisie depuis la révolution de 2011, leur condition reste précaire, du fait de cette législation répressive et d'un rejet social encore violent.
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Crédit photo : Kabil Bousena / AFP