Sélectionné dans le cadre de la Semaine de la critique au Festival de Cannes, La Pampa est le premier long-métrage d'Antoine Chevrollier. Sensible et actuel, le film explore l'amitié de deux ados mise à mal par l'homophobie de leur entourage. Il offre au passage à Artus son premier rôle dramatique, celui d'un homme gay dans le placard. Sortie prévue en février 2025.
La transition du petit au grand écran est réussie pour Antoine Chevrollier. Après avoir trouvé le succès en 2022 avec la mini-série Oussekine, qu'il a créée pour Disney+, le réalisateur-scénariste prend désormais le chemin des salles de cinéma avec son tout premier long-métrage. Film personnel, puisqu'il est tourné en grande partie à Longué-Jumelles, petite ville de Maine-et-Loire dont il est originaire, La Pampa dépeint un milieu précis, celui des fanas de motocross, prétexte pour aborder l'homophobie en zone rurale.
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Inséparables depuis l'enfance, Willy et Jojo vont au même lycée. Quand ils n'étudient pas, ils passent leur temps libre avec d'autres potes à la Pampa, un terrain de motocross, pour s'entraîner, se siffler des bières ou flirter avec des vacancières. Jusqu'au jour où Willy surprend son meilleur pote en plein ébat avec son coach, incarné par Artus… Dès lors, les problèmes se succèdent, au point de venir menacer leur amitié qu'ils vont s'efforcer de préserver.
Antoine Chevrollier dissèque l'homophobie
Mais attention, La Pampa n'est pas l'histoire d'amis qui deviennent amants. Le film propose d'explorer un angle peu traité par la fiction : celui de deux potes adolescents, l'un hétéro et l'autre homo, profondément liés l'un à l'autre et qui s'acceptent sans se juger, se soutiennent dans les mauvais moments et pour qui la sexualité n'est qu'un facteur parmi tant d'autres. La narration adoptant surtout le point de vue de Willy – Sayyid El Alami, révélation d'Oussekine, est incandescent dans le rôle –, on ressent en particulier la sincérité de son attachement pour Jojo, qui nous va droit au cœur.
La Pampa est leur histoire. Mais à travers eux, Antoine Chevrollier dissèque l'homophobie de leur entourage. Alors que son homosexualité est ébruitée de façon déplorable, Jojo fait face à un torrent de haine. De la part de l'homme qu'il aime, déjà marié à une femme, de la part de ses camarades de classe, qui le couvrent d'insultes, mais aussi de la part de son père – campé par un Damien Bonnard (Rester Vertical, Les Misérables) en grande forme –, archétype du parent distant aux prises avec une masculinité rigide qui l'étouffe et lui échappe. Si peu de violences sont montrées à l'écran, La Pampa est tout de même rythmé par la brutalité du rejet auquel fait face Jojo et dépeint, hélas, la réalité de nombreux jeunes vivant loin des villes. Un film à montrer à tous les (futurs) parents.
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Crédit photo : Tandem