Alors que la droite met au débat, ce 28 mai au Sénat, une loi visant à limiter la possibilité pour les jeunes trans d'accéder à un encadrement médical, la riposte s'organise. Dans la rue, avec un deuxième dimanche de manifestations ce 26 mai, et au Parlement où des élus de la gauche font des contre-propositions.
"Quand les droits des personnes trans reculent, ce sont les droits des femmes, des filles et des personnes LGBTQI+ qui reculent, et c'est toute la société qui fait marche arrière", résume Sébastien Tüller, militant d'Amnesty International, lors de la deuxième manifestation de "Riposte trans" à Paris ce dimanche 26 mai. Une mobilisation qui ne faiblit pas, du moins à Paris où têtu· a pu constater au moins autant de mobilisation que lors de la première édition du 5 mai, soit 2.500 personnes selon la police. Alors qu'une proposition de loi visant à limiter l'encadrement médical des mineurs trans, portée par l'élue Les Républicains (LR) Jacqueline Eustache-Brinio, doit être examinée au Sénat ce mardi 28 mai, plusieurs élus de gauche se mobilisent également.
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La sénatrice écologiste Mélanie Vogel a pris la première initiative, en avril, en déposant une proposition de loi pour déjudiciariser le changement de la mention du sexe à l'état civil. "Dans un système qui ne permet pas l’autodétermination de genre, les personnes trans doivent démontrer qu’elles souffrent dans la situation actuelle : c’est obligatoire d’avoir souffert pour changer de genre. Est-ce bien nécessaire ?", arguait-elle auprès de têtu·. Présidente de l'association de plaidoyer Toutes des femmes, Maud Royer appuie : "Pour être efficace face aux discours réactionnaires, il nous faut conquérir de nouveaux droits. C'est de cette manière que l'on imposera un rapport de force et qu'on montrera la nôtre !"
Mélanie Vogel, Andy Kerbrat, Ian Brossat
À l'Assemblée nationale, le député de La France Insoumise (LFI) Andy Kerbrat a proposé un texte semblable à celui de Mélanie Vogel, soutenu par toute la gauche parlementaire : l'ont co-signé les présidents des groupes LFI, communiste, écologiste, socialiste, ainsi que deux députés de la majorité présidentielle, Raphaël Gérard (Renaissance) et Erwan Balanant (MoDem). "On ne peut pas laisser la place à la pire frange réactionnaire. Nous devons occuper le terrain et ne pas laisser nos thèmes accaparés par la droite conservatrice", soutient Andy Kerbrat auprès de têtu·.
Ce lundi 27 mai, à la veille de l'examen de la proposition de loi LR, Mélanie Vogel et le sénateur communiste Ian Brossat ont réuni plusieurs associations LGBTQI+ pour un dialogue avec les parlementaires. "Dans cette institution conservatrice qui s'est toujours opposée à l'égalité des droits, je souhaite que la parole des associations qui se battent au quotidien pour l'amélioration des conditions de vie des personnes transgenres puisse être entendue et faire contre-poids à cette loi transphobe", explique l'élu communiste auprès de têtu·. Il a notamment été question de la manière dont les auditions préalables à la proposition de loi ont tordu la parole des personnes interrogées. "Si cette proposition de loi passe, la France sera le pays le plus restrictif en Europe en matière de transition de mineurs", signale Anaïs Perrin-Prevelle, présidente de l'association OUTrans.
Reste une grande absente : la ministre en charge de l'Égalité et de la lutte contre les discriminations, Aurore Bergé. Si celle-ci a assuré, à l'occasion des 30 ans de l'association SOS homophobie, que le gouvernement s'opposerait au texte, force est de constater que la mise en acte de cette déclaration est plus que timorée. Interrogée par Le JDD le 24 mars, avant que la loi ne soit officiellement proposée, Aurore Bergé déclarait : "Il faut prendre en compte la souffrance de ceux qui se sentent piégés dans une identité qui n’est pas la leur. En même temps, la protection des mineurs doit demeurer une priorité". Toujours ce fameux "en même temps", qui sied si mal aux droits humains…
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Crédit photo : Thomas Vampouille / têtu·