Abo

spectacle"Vulgaire", de Marine Baousson : le stand-up qui jongle avec la culture G

Par Tessa Lanney le 31/10/2022
Marine Baousson,stand-up,humour,spectacle,Vulgaire,vulgarisation,culture générale,culture G,humoriste,Comédie de Paris

Vulgaire, c'est le spectacle de "vulgarisation" de culture générale monté par l'humoriste Marine Baousson et son frère. Il se joue jusqu'en décembre 2022 à la Comédie de Paris, et nous fait rire moins bête.

Briller en société à coups d’anecdotes rares sur des événements et personnages historiques incontournables, ça fait rêver, mais si ça passe par des heures à éplucher des fiches Wikipédia, c’est tout de suite moins drôle. Ce travail fastidieux, l’humoriste Marine Baousson l’a fait et le délivre dans son spectacle, Vulgaire, à 19h30 chaque mercredi à la Comédie de Paris jusqu’au 21 décembre. Pour le monter, Marine Baousson a étudié plus de 200 sujets qu’elle traite dans son podcast qui cumule trois millions d’écoutes. Ainsi, nul besoin de poser vos congés pour en apprendre plus sur la Commune de Paris ou encore le Club des cinq, en passant par la vie trépidante de Raspoutine. Chaque représentation se révèle différente puisque pour chaque grande catégorie – histoire, littérature, etc – le public a le choix entre deux sujets.

À lire aussi : Tove Lo : "Dirt Femme renvoie surtout à la vision que je porte sur ma féminité"

"Je veux que les gens aient la sensation qu’on était en soirée, qu’ils n’ont pas compris un truc et que leur pote leur a expliqué", explique l’humoriste d’un ton léger. Avec son frère Romain, accompagné de sa guitare et d’un certain talent pour imiter Stéphane Bern, Marine Baousson revêt sur scène le costume de la prof d’histoire mais aussi de cette copine qui ne peut pas s’empêcher de tourner en dérision, en plein milieu de la cantine, tout ce que la prof raconte. Petit détail qui a son importance, cette amie est une grande fan de jeux de mots capillotractés comme on les aime, un mélange entre subtilité, références qui font mouche et beauferie intemporelle.

"J'ai eu cette sensation d'incompréhension du monde"

Vulgaire, est donc comme son nom l'indique dédié à la vulgarisation, et est né d’un besoin de comprendre le monde qui l’entoure. "Pendant le confinement, j’ai eu cette sensation d’incompréhension du monde. Il se passait quelque chose que je ne maîtrisais pas, que je ne comprenais pas, se souvient-elle. Je ne comprenais pas la pandémie, pour la comprendre il fallait que j’en sache plus sur la médecine, et ça commence par des trucs simples, comme la rate. Vous savez à quoi ça sert la rate ?" Vous ne ressortirez peut-être pas de la Comédie de Paris avec un diplôme de médecine spécialité rate mais, assurément, vous vous coucherez moins bête après le spectacle. "On s’en branle des batailles de Napoléon, s’emporte Marine. On sait qu’il était fort, qu’il était stratège, mais on n’a pas besoin du détail. J’essaye de donner l’essentiel, le nectar."

Comme on pouvait s’y attendre en lisant "spectacle interactif", l'audience est loin d’être des plus disciplinées, et c'est tant mieux. "Les gens parlent beaucoup entre eux pendant le spectacle, se racontent des anecdotes, des précisions sur les sujets qu’ils maîtrisent. Ça me plaît beaucoup, partage l’humoriste avec enthousiasme. Je trouve ça génial de lancer un sujet large et de finir par raconter quelque chose de personnel."

L'air de rien, la représentation lesbienne

Certains sujets font réagir plus que d’autres, comme le texte préféré de Marine Baousson, celui sur le procès de Bobigny, moment de bascule dans la lutte pour le droit à l’avortement. L’été dernier, lorsque l’humoriste jouait son spectacle à Avignon, elle a compris à quel point ce récit était toujours d’actualité. Alors qu’elle rapporte le viol de Marie-Claire Chevalier par un certain Daniel P., un homme l’interrompt et soutient que puisque l'humoriste n’était pas là au moment des faits, elle ne peut pas dire si oui ou non il s’agissait bien d’un viol. Elle fait alors preuve de pédagogie avec son interlocuteur, mais n’en est pas moins interdite : "Remettre cet événement en cause, alors qu’il s’est produit il y a cinquante ans et qu’il est reconnu, recentre la nécessité de parler de ces sujets-là."

À lire aussi : Hannah Gadsby : "Dans le stand-up, les lesbiennes sommes légion !"

De temps à autre, comme de manière anodine, vous entendrez l’hôtesse des lieux mentionner sa copine. Un acte significatif pour la jeune femme. "Pendant longtemps, je ne voulais pas parler de mon orientation sexuelle, confie-t-elle. Je pense que je ne l’avais pas complètement acceptée. Je m’arrangeais pour adopter un vocabulaire non-genré. Je pensais que c’était un acte militant alors qu’en fait, pas du tout." Finalement, elle reprendra le flambeau du spectacle La lesbienne invisible, légué par Océan, et c’est un déclic. "Jouer ce spectacle a changé ma vie. Océan a changé ma vie. Ça m’a permis de m’assumer, mais également de comprendre l’importance des représentations", analyse-t-elle.

En sortant de scène, Marine Baousson peut constater ce que transmet son message à des femmes qui s’empressent de venir partager avec elle leurs propres histoires."Simplement dire 'ma meuf' dans le spectacle, sans me justifier, le normaliser sans en faire pour autour un non-sujet, c’est important", retient-elle de ces rencontres. Et si son stand-up ne tourne pas autour de sa vie personnelle, la mention de sa meuf n'y est pas le seul endroit de queerness, évidemment. Par exemple, quand elle analyse Le club des cinq et le trésor de l’île, grand classique de la littérature jeunesse… Son analyse, tout comme le reste du spectacle, c'est de la "boulette internationale" ;)

À lire aussi : "Starmania" par Thomas Jolly et autres spectacles queers à voir les prochains mois

Crédit photo : Marina Bourdais