C’est une large enquête qu’a mené l’application de rencontres auprès de ses utilisateurs. Quels sont leurs sujets de prédilection dans cette élection ? Sur qui se portent leurs préférences ? Hornet révèle les résultats de sa consultation sur le vote gay, pleine d'enseignements.
À moins de deux mois des élections présidentielles et dans un climat politique mouvant, Hornet a proposé à ses utilisateurs de s'exprimer sur la prochaine élection présidentielle, entre deux discussions "philosophiques". Christophe Martet, rédacteur en chef de UnicornBooty, le site d’informations d'Hornet, explique :
Premier constat, le sujet des élections passionne. En quelques jours, après avoir reçu un message dans leur boîte sur l’appli, 3.200 personnes ont répondu au questionnaire. Cela permet de proposer une photographie sur une population assez jeune de gays dont la moyenne d’âge est de 26 ans.
Première question : « Pensez-vous aller voter à la présidentielle ? » : 92% affirment que oui. 4,7% sont indécis et 3,3% ne pensent pas aller voter. Oui, mais pour qui et en fonction de quels sujets ?
Pour qui voteront-ils ?
- Sur les candidats déclarés (mais pas encore officialisés par les 500 signatures nécessaires), Emmanuel Macron recueille 38,1% des intentions de vote, malgré ses déclarations polémiques sur les "humiliés" de la Manif pour tous.
- Marine Le Pen arrive en deuxième position, à 19,2% des intentions de vote; deux fois moins que Macron mais qui concerne près d’un gay sur cinq. Les sondages nationaux la placent actuellement entre 25 et 27% au premier tour de l’élection. Il semblerait donc que les gays ne se soucient pas particulièrement du programme de la candidate d’extrême droite envers les LGBT. Christophe Martet rappelle à juste titre :
La candidate du FN est une farouche opposante à l’égalité des droits, comme l’indique son programme : suppression du mariage pour tous, non à la PMA et à la GPA. Elle a cependant pris grand soin, durant la période des débats sur l’ouverture du mariage, de ne pas défiler avec les opposants.
Ni ses propositions contre l’IVG et pour la peine de mort, ni les déclarations homophobes de certains de ses partisans ne semblent ébranler son image de nationaliste patentée.
- Benoit Hamon, du Parti socialiste, est plus haut dans ce sondage chez les gays que dans la population générale, mais pâtit du score fort de Macron : 18,5% des personnes interrogées déclarent vouloir voter pour lui. Jean-Luc Mélenchon, du Front de gauche, est à 13,2%, comme dans les derniers sondages nationaux. Les candidats de l’extrême gauche (Nathalie Arthaud et Philippe Poutou) ne recueillent que 1,3% et celui de la droite traditionnelle, Nicolas Dupont-Aignan, cumule 1% des intentions de vote.
- Le candidat conservateur François Fillon, dans une tourmente réelle sur les emplois prétendus fictifs de sa femme et des ses enfants (entre autres sujets polémiques), arrive en cinquième du classement avec seulement 7,3% des intentions de vote. Il avait été le seul candidat à la primaire de droite à vouloir réécrire la loi Taubira, et réserver l’adoption plénière aux couples hétérosexuels. Il s'était aussi déclaré contre la PMA pour les lesbiennes et contre la GPA pour tous.
Quoi de neuf depuis 2012 ?
Au premier tour, les personnes sondées avaient voté à 33,2% pour François Hollande, 13,3% pour Marine Le Pen et 16,2% pour Nicolas Sarkozy (et aussi 14,1% d'abstention et de vote blanc, 8,2% pour J.-L. Mélenchon, 5,6% pour Eva Joly et 7,5% pour François Bayrou).
C’est donc la montée de plus de 6 points de Marine Le Pen dans l’électorat gay qui est significatif. Le camp de la droite républicaine dégringole : de 16% des votes pour Sarkozy en 2012, on passe à 7,3% d'intentions de vote pour Fillon en 2017. Ce qui favorise peut-être d’un côté Macron, d’un côté Le Pen.
Les voix de Hollande/Joly se répartissent d’une part chez Macron et de l'autre chez Mélenchon qui augmente de 5 points. Hamon ne rassemble pas encore autant que le "presque ex-président" socialiste, malgré de forts engagements pour les LGBT.
Quels sont les sujets qui mobilisent ?
Parmi les sujets essentiels pour déterminer leurs votes, vient d’abord le travail (77% des répondants), l’éducation (49,6%) et la sécurité (45,1%). Puis les impôts (40,2%), les droits LGBT en cinquième position (36%), et enfin l’immigration (29,9%). La lutte contre le VIH ne recueille que 8,1% des suffrages.
L’environnement et l’écologie n’étaient pas listés parmi les propositions, mais ont été spontanément cités par les répondants.
La droitisation de l'électorat gay continue
En février 2016 (donc bien avant les échéances et déclarations de candidatures), une enquête du CEVIPOF révélait qu’un tiers des couples homos mariés avait voté Front national aux régionales (38,6 % des couples gays, 26% pour les couples lesbiens), soit davantage que les couples hétérosexuels. Depuis 2012, la droitisation de l'électorat homosexuel est palpable. Didier Lestrade, militant d'Act Up-Paris et journaliste fondateur de TÊTU il y a plus de vingt ans, publiait cette année-là Pourquoi les gays sont-ils passés à droite. Il écrivait alors :
Nous connaissons un changement sans précédent : les années 2000 voient l'instrumentalisation de la cause LGBT contre d'autres minorités. Les gays contre les Arabes et les Noirs.
François Kraus, directeur d'étude à l'Ifop, s'est également penché sur la tentation populiste chez les gays et le phénomène de l'"homonationalisme", au lendemain de l'attentat d'Orlando survenu l'été dernier.
Les gays influeront-ils sur cette élection comme dans les débats de société ? Seront-ils plus conservateurs ou plus progressistes que les hétéros ? Résultat lors du premier tour de l'élection présidentielle, le 23 avril, puis au second tour, le 7 mai 2017.