Vivement critiqué pour son inaction et sa lenteur à condamner le canular homophobe de Cyril Hanouna, le CSA a décidé d'agir et de sanctionner Touche pas à mon poste... pour des séquences datant de la fin de l'année 2016.
On assisterait pourtant à une rapidité et une sévérité inédite de la part de l'institution qui a rendu mercredi 7 juin deux sanctions contre des séquences de TPMP datant de plus de six mois.
La première, diffusée le 3 novembre 2016, voyait Cyril Hanouna agresser un homme - soi-disant l'agent de Tom Cruise - en présence de Matthieu Delormeau, puis tenter par tous les moyens de dissimuler ce crime accidentel en empêchant son chroniqueur d'appeler les secours et en proposant même de laisser le corps inanimé devant l'hôtel. Affolé, ce dernier avait fini par appeler la police, coupant court au piège morbide : le complice se relève, fait mine d'aller bien et affirmer qu'il veut oublier cette histoire. Matthieu Delormeau, régulièrement humilié par "Baba" en direct, n'avait appris le subterfuge que le lendemain et parlait plus tard de "la pire expérience de sa vie". Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a jugé que la chaîne avait "gravement méconnu son obligation de faire preuve de retenue dans la diffusion d'images susceptibles d'humilier des personnes", et interdit désormais à la chaîne de diffuser des séquences publicitaires pendant l'émission, qu'il s'agisse d'un direct ou d'une rediffusion, "ainsi que 15 minutes avant et 15 minutes après sa diffusion" pendant une semaine du mois de juin, nous informe un communiqué.
La durée de cette sanction est gonflée de deux semaines supplémentaires en raison d'une seconde séquence diffusée le 7 décembre 2016 où Cyril Hanouna attrape la main de Capucine Anav tandis que celle-ci a les yeux fermés, pour la poser sur son sexe. En diffusant ces images, la chaîne a selon le CSA enfreint la loi du 30 septembre 1986 et sa "responsabilité de lutter contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes et les violences faites aux femmes, en particulier dans les émission ayant un impact important sur le jeune public".
Une sanction bien plus lourde que celle préconisée par le conseiller d'État
Le CSA a enfin rappelé à C8 ses obligations de respect de la loi et de sa convention "qui sont la contrepartie de l'utilisation de la fréquence publique qui lui été attribuée gratuitement". La chaîne ne vit effectivement que des annonceurs, et ces trois semaines sans pubs pourraient lui coûter très cher; d'après Huffington Post, TPMP représente la moitié des recettes publicitaires de C8, et le boycott des grandes enseignes au début du mois de mai avait déjà entraîné un manque à gagner d'1 million d'euros pour la chaîne. Selon une source proche du dossier citée par Sud Ouest, cette sanction pourrait faire perdre 1,5 à 2 millions d'euros à C8.
Le présentateur vedette n'était pas présent aux auditions d'hier, mais le groupe Canal+ avait sorti l'artillerie lourde. Ce sont Jean-Christophe Thiery, le président de Canal+, Gérald-Brice Viret, patron des programmes et des antennes du groupes, Franck Appietto, directeur général de C8, Valerie Billaut, directrice de la programmation et de l'antenne C8, Pascaline Gineste, chargée des affaires réglementaires du groupe et l'avocat Emmanuel Glaser qui ont défendu Touche pas à mon poste. Leur argument fondé sur la liberté d'expression et l'humour de l'émission n'ont pas convaincu les Sages de l'audiovisuel qui sont même allés plus loin que ce que préconisait le conseiller d'État, à savoir une simple amende de 50.000 € reversée au Centre national du cinéma, selon Ozap. Ils devront prochainement se prononcer sur le fameux canular homophobe qui avait scandalisé l'opinion et entraîné un triste record de 40.000 signalements.