Produite par Netflix, cette série espagnole raconte l'histoire de trois jeunes d'un quartier populaire propulsés dans le meilleur lycée privé du pays. « Elite » traite des questions lesbiennes, gaies et bies et du VIH avec une grande intelligence.
Ça aurait pu être une série pour adolescents de plus, supplément romance gay un peu cliché. Mais non. Avec « Elite », Netflix réussit un important travail de représentation, au sein d'une série de qualité.
Elle raconte l'histoire de trois jeunes d'un quartier populaire propulsés dans le meilleur (et très, très riche) lycée privé du pays. Avec, en fond, le meurtre d'une étudiante dont l'identité du tueur n'est révélée qu'au dernier épisode. Voici quatre raisons de la regarder sans tarder.
Cet article contient quelques spoilers secondaires sur la saison 1 d'« Elite ».
1. Omar et Ander, une histoire d'amour réaliste
La série espagnole présente une histoire d'amour entre deux adolescents. Mais avec finesse. Sans nier les difficultés à sortir du placard rencontrées par Omar et Ander, l'histoire ne s'appesantit pas sur la « souffrance » des personnages. Leur relation naissante est par ailleurs acceptée sans problème par leurs camarades.
Les scènes d'affection et de sexe entre Ander (Aron Piper) et Omar (Omar Ayuso) ne sont ni prudes, ni stéréotypées. Certains hétéros ont appris, avec « Looking », que deux hommes pouvaient coucher ensemble autrement qu'en levrette, et en se regardant dans les yeux. D'autres l'apprendront donc sûrement grâce à « Elite ». C'est un cliché de moins sur nos sexualités.
Autre raison de se réjouir : le couple sort également du cliché des deux minets au style passe-partout et issus de la classe moyenne blanche, vu et revu dans chaque série et téléfilm sur l'homosexualité masculine. Omar est issu d'une famille musulmane, celle d'Ander n'est pas riche. La complexité des personnages sert la beauté de leur histoire.
2. « Mis madres » : la présence d'un couple lesbien très influent
Toute série sur l'adolescence qu'elle est, « Elite » a aussi creusé des personnages d'adultes intéressants. Parmi lesquelles les mères de Polo. Peu présentes à l'écran (comme la majorité des parents des personnages), elles sont cependant évoquées très souvent.
Polo (Alvaro Rico) parle de « mis madres » (« mes mères » en espagnol). Ses amis utilisent la même expression. Jamais la légitimité de ce modèle familial n'est remis en question. La loi espagnole sur la PMA pour toutes les femmes est passée par là.
La première saison dévoile peu de chose sur le couple. On apprend cependant que les mères de Polo sont « les lesbiennes les plus influentes » d'Espagne. On a bon espoir que la saison 2 développe leur histoire et présente un couple de lesbiennes badass qui ne se laisse pas marcher sur les pieds.
3. Une bisexualité ni « effet de mode », ni passade
Mais Polo n'est pas que le fils de ses mères. C'est aussi un personnage qui va découvrir et assumer sa bisexualité. Notamment face à sa copine, Carla. Celle-ci estime qu'il « aime les hommes » (la version originale dit même « tu aimes les hommes plus que les femmes »). Si elle l'accepte, Carla voit cette attirance comme un synonyme de fin de leur relation. Comme beaucoup de personnes bisexuelles, Polo va devoir expliquer qu'il n'est ni homo, ni hétéro, et que cette attirance est aussi légitime qu'une autre. Et qu'être bi ne l'empêchera pas d'être en couple.
Ce n'est pas une phase, pas une étape vers l'acceptation de son homosexualité. La suite de l'intrigue le confirme. Dommage que le mot « bisexualité » soit tu. Et qu'il faille un plan à trois pour que Polo comprenne qu'il « aime aussi les hommes ». Ce qui ne l'empêchera pas de confirmer son attirance pour chacun des deux genres dans des scènes de sexe à deux.
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4. La séropositivité, loin de la fatalité
Beaucoup plus rare dans les séries sur les ados, la thématique du VIH est elle aussi présente. Et traitée comme jamais. Face au silence honteux de ses parents, Marina (Maria Pedraza) révèle sa séropositivité. A deux reprises, le personnage donne - en trois phrases - un cours sur le virus dont on espère qu'il sera retenu par toutes et tous.
Marina explique être sous traitement et suivie tous les quatre mois. Le VIH est indétectable dans son sang, elle ne peut donc pas contaminer son entourage. Au-delà de l'explication, « Elite » prouve que la séropositivité n'empêche pas de vivre : Marina couche avec des garçons. Ni plus, ni moins que les autres. Et tout va bien. La question de la non-transmission de la maladie en cas d'une éventuelle grossesse est également évoquée.
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« Elite » est aussi une série réussie dans son traitement de l'islam. Elle montre la violence de l'islamophobie, sans cacher les blocages de certains musulmans traditionnels face à certaines avancées sociétales. Un exercice sur le fil également accompli sur la question des inégalités économiques et sociales. Espérons maintenant que la saison 2, déjà signée, soit aussi passionnante que la première. Et qu'elle intègre des personnages trans' et non-binaires, pour devenir une vraie série LGBT.
Crédit photos : Netflix.