Frank OceanA la soirée "PrEP+" de Frank Ocean, le staff ne connaissait pas la PrEP

Par Samy Laurent le 21/10/2019
Frank ocean

Alors que le chanteur inaugurait sa soirée "queer", "PrEP+", qui se voulait être un safe space pour les personnes LGBT+, l'artiste fait face à de nombreuses critiques sur la soirée dont beaucoup pensent qu'il ne s'agissait que d'un coup publicitaire.

Il semblerait que "PrEP+", la soirée queer de Frank Ocean, ne soit finalement qu'un simple coup marketing. Alors qu'il précisait que cette boîte de nuit entendait être "ce à quoi aurait du ressembler les boîtes de nuit new-yorkaises des années 1980 si les médicaments préventifs contre le VIH avaient existé", ceux ayant participé à la soirée ont surtout pu être témoins d'une soirée "pas queer du tout". 

Une époque qui ne peut être reproduite

"On t'aime Frank, mais la vie nocturne des années 80 était révolutionnaire grâce aux gens vivant avec le VIH et leurs gardiens", a tweeté Act Up New York. "Elevons nos aînés et honorons leur héritage".

L'association historique qui lutte contre le VIH-sida a également rappelé qu'il y avait "une hypothèse sous-jacente selon laquelle, puisque la PrEP «existe», elle est accessible à tous. - En réalité, la CDC (Centres pour le contrôle et la prévention des maladies, ndlr) a référencé 1,2 million de personnes aux États-Unis qui devraient suivre la PrEP, mais seule une fraction d’entre elles y ont accès."

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"La vie nocturne durant l'épidémie était bien meilleure que ça"

Beaucoup d'autres pointent du doigt le personnel de la soirée, qui,  malgré le nom du lieu, n'avait aucune connaissance de la PrEP. "La sécurité était super sévère; ils ont sorti le tube de Truvada de mon sac à dos, l’ont ouvert et j’ai dit en plaisantant: «c’est ma PrEP» et pas un seul rire", a tweeté Jason Rosenberg, membre de Act Up New York.

Selon cet internaute, plusieurs personnes dans la file d'attente ont du confirmer que les pilules qu'il avait en sa possession étaient bien des pilules de Truvada.

Le journaliste américain, Evan Ross Katz, a récolté les réactions de certaines personnes présentes à la soirée. Beaucoup pensent que la soirée n'est en fait qu'un "queer baiting" qui permettrait à Frank Ocean de promouvoir son prochain album. En effet, la soirée s'est tenue à la veille de la sortie de son nouveau single "DHL". Un morceau qu'il a par ailleurs dévoilé ce soir là, lors de son passage sur la scène du club.

Le docteur Steven W Thrasher dénonce une opération marketing peu scrupuleuse : "Tout, même le sida, est une opportunité de marketing", a-t-il déclaré.

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Des t-shirt "PrEP" a 60$

Autre point sur lequel Frank Ocean s'est attiré les foudres de la communauté queer. Lors de la soirée, le chanteur a commercialisé des t-shirt avec "PrEP" marqué dessus, vendus pour 60$. Un prix trop élevé pour Act Up New York, qui n'est pas sans rappeler les prix exorbitants du traitement pré-exposition pratiqué par les sociétés pharmaceutiques outre-Atlantique.

En effet aux Etats-Unis, un mois de traitement peut coûter jusqu'à 2.000$. Frank Ocean n'a pas précisé ce qu'il comptait faire avec les profits des T-shirts. Pour BuzzFeed News, Jason Rosenberg explique que "le prix de 60 $ est si proche du problème auquel nous sommes confrontés avec les sociétés pharmaceutiques en ce moment", a t-il déclaré "les prix des médicaments sont 250 fois plus élevés que le coût de production, soit le prix d’une tasse de café à préparer. C’est un peu une gifle pour un problème auquel nous sommes confrontés dans la communauté."

Frank Ocean réagit

De son côté, l'artiste a déclaré dans un long message sur Tumblr que la soirée n'était absolument pas un coup de pub et s'est expliqué face aux critiques sur le prix de ses tee-shirts et de la PrEP.

"La stratégie de prix est malveillante à mon avis et la perception du public est donc entachée et à juste titre", a déclaré Ocean à propos de la PrEP. "Malgré le fait que le prix constitue un obstacle très réel à ce médicament susceptible de sauver des vies, pour certains, l'autre obstacle très réel reste la sensibilisation." Et c'était, semble-t-il, l'objectif principal de sa soirée.

Le chanteur s'est également penché sur son expérience personnelle avec la PrEP, se rappelant de l'un de ses amis lui demandant si c'était quelque chose comme du viagra. "Mon ex, avec qui j'étais pendant quelques années, ne connaissait rien de la PrEP lorsqu'on s'est rencontré dans un club gay de L.A.", a t-il raconté, "La sensibilisation n'est pas toujours comme on l'espère", a t-il écrit.

Du côté des militants, sensibiliser le virus du VIH et le Sida peut être encore bien plus conséquent venant d'une star comme Frank Ocean. Si le tout est fait proprement. "Je crois que l'équipe de Frank Ocean doit s'arrêter et réfléchir avant de faire encore plus de mal", a déclaré Rosenberg. "Je pense qu'ils doivent s'arrêter et parler directement aux membres de la communauté et déterminer de quelle manière ils peuvent tirer partie de l'influence de la star pour contribuer de manière significative à la sensibilisation sur la PrEP".

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