Selon une étude, l'homosexualité dans le rugby est encore largement taboue. La Ligue Nationale de Rugby a annoncé des actions pour faire changer les mentalités.
LGBTphobies, violences sexuelles... Les prises de consciences se multiplient dans le milieu du sport. Et cette initiative de la Ligue Nationale de Rugby (LNR) en est un nouvel exemple. Dès cette année, l'association, qui a pour mission de gérer le secteur professionnel du rugby à XV, va mettre en place des actions de terrain, avec l'aide de votre magazine préféré, TÊTU. L'objectif : sensibiliser les 1.500 joueurs des clubs professionnels et centres de formation, ainsi que les présidents de club, et les entraîneurs à travers des ateliers spécifiques.
L'homosexualité encore taboue
Il faut dire que l'étude commandée par la LNR, et réalisée par Oliver Wyman, est édifiante. Le cabinet de sondage a en effet interrogé 385 joueurs de rugby professionnel et membres des staffs des clubs sur leur perception de l'homosexualité dans le milieu du rugby. Sans surprise, le panel interrogé est constitué à majorité d'hommes (96%, face à 4% de femmes, majoritairement membres du staff ou de clubs amateurs affiliés. La Ligue Nationale de Rugby ne représente que des clubs professionnels, et qu'il n'y a aucun club professionnel féminin). Et à la question "pensez-vous qu'il soit facile d'être un joueur de rugby homosexuel ?" 87% des sondés ont sans surprise répondu "non".
Une majorité écrasante, qui transforme l'essai quand on lui demande s'il est facile de parler de son homosexualité dans le rugby. Là encore, 75% des sondés répondent par un non catégorique, et 18% ne se prononcent pas...
Le fait surprenant dans cette étude, c'est que pour 95% des personnes interrogées, le rugby est le sport qui symbolise le mieux le "vivre ensemble". Pourtant, 62% des joueurs professionnels interrogés et 57% des étudiants des centres de formation ne se sentiraient pas à l'aise d'en parler aux membres de leur club. "Le rugby est encore très macho", analyse l'un des répondants, quand un autre explique que "beaucoup de personnes restent très centrées sur la virilité du rugbyman et ne sont pas prêtes à l’entendre."
"Pédé" ou "gouine" pour "rigoler"
Et c'est pour faire de son sport un vrai espace d'inclusivité que la Ligue Nationale de Rugby, consciente de ses faiblesses, a choisi de lancer l'opération #PlaquonsLHomophobie : « Le sport est un lieu d’éducation et d’expérimentation du vivre-ensemble, particulièrement le rugby qui fait de la différence une force collective. Ce qui marche sur un terrain et au sein d’une équipe marche aussi dans la société ou dans une entreprise. Avec beaucoup d’humilité et de détermination, nous voulons que les jeunes rugbymen deviennent des ambassadeurs de leur sport et du vivre-ensemble » explique Paul Goze, Président de la LNR.
Mais le tabou de l'homosexualité des joueurs n'est pas le seul problème du milieu du rugby. A l'instar du football, qui a récemment provoqué de nombreuses polémiques suite à des chants et des banderoles homophobes dans les tribunes de plusieurs matches, l'homophobie ordinaire semble aussi avoir sa place dans le rugby professionnel. 67% des personnes interrogées admettent en effet utiliser les termes "enculé", "pédé" ou "gouine" pour "rigoler" dans des conversations avec leurs co-équipiers ou collègues. Et 11% d'entre eux avouent utiliser ces mots dans des moments d'énervement. Cela dit, 23% des personnes interrogées seulement disent avoir déjà été témoins de discriminations homophobes, que ce soit dans les tribunes, dans les vestiaires, sur le terrain ou sur les réseaux sociaux.
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Un sport plus inclusif
La pédagogie semble donc être nécessaire. Et c'est ce qu'entend proposer le programme #PlaquonsLHomophobie, qui prévoit une trentaine d'ateliers à destination des présidents de club, des joueurs, des membres du staff, et des rugbymen en formation. Une journée de championnat inclusive sera également organisée au mois de mai pour le TOP 14 et la PRO D2, et entièrement dédiée à la lutte contre l'homophobie. La Ligue entend aussi promouvoir la charte de lutte contre l'homophobie du ministère des Sports, et mettre en place des partenariats avec des associations de rugby LGBT+, comme Les Coqs Festifs.
Cette démarche, soutenue par la Société Générale, devrait s'accompagner, dans les quatre années à venir, de programmes similaires en faveur du handicap, de l'égalité Homme-Femme, et de la lutte contre le racisme.