TunisieEn Tunisie, un mariage entre deux hommes reconnu... par erreur

Par Timothée de Rauglaudre le 07/05/2020
Tunisie

L'association Shams a annoncé qu'un mariage entre un Français et un Tunisien avait reconnu officiellement. Les autorités plaident une erreur administrative.

Un mince espoir, puis la douche froide. Vendredi 24 avril, l'association LGBT+ tunisienne Shams, fondée en 2015, annonçait sur sa page Facebook "une première en Tunisie et dans le monde arabe". Un mariage entre un Tunisien et un Français, contracté en France, aurait été "reconnu" officiellement sur l'acte de naissance de l'époux tunisien. Une avancée pour le "principe d'égalité et de non-discrimination", souligne alors l'association.

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Par la suite, le collectif de cyberactivistes tunisiens Nawaat, fondé en 2003, qui dit offrir "une tribune libre à tous ceux qui ne voulaient pas subir le blocage médiatique en Tunisie", s'est livré à un exercice de vérification de cette information. Nawaat a eu accès à l'acte de naissance en question. Le mariage en question concerne un Français de 31 ans et un Tunisien de 26 ans qui "a peur que sa famille apprenne qu’il est marié a un homme", a précisé Mounir Baatour, son avocat et le président de Shams, qui n'a pas souhaité donner de la nom de la petite municipalité où le mariage a été reconnu.

Réactions homophobes

Le ministre des Affaires locales Lotfi Zitoun, membre du parti islamiste Ennahda, contacté par Nawaat, a indiqué que ses services étaient en cours de vérification de cette information : "Si c’est vrai, sachez que c’est contraire à la loi. La législation française ne permet pas la reconnaissance du mariage homosexuel par les pays maghrébins. Il y a eu un précédent, une erreur commise par la municipalité de Tunis. Et elle a été rectifiée." La législation française, en effet, ne permet pas la reconnaissance de mariages avec des ressortissants de certains pays, dont le Maroc, l'Algérie et la Tunisie.

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Il s'agirait donc d'une erreur. Ce qui n'a pas empêché les réactions négatives de nombreux internautes, comme l'a relevé le site d'information tunisien Business News : "Certains internautes tunisiens n’ont vraiment pas apprécié la nouvelle estimant que le fait même d’en parler n’est autre qu’une hérésie. D’aucuns ont fortement condamné la médiatisation de l’information surtout le premier jour du mois de ramadan. Insultes en tous genres et propos homophobes ont été au rendez-vous. Pourtant, il ne s’agit là que d’une simple formalité. Ce n’est pas comme si la Tunisie avait autorisé les mariages entre les personnes du même sexe…" Le mariage pour tous n'est pas pour tout de suite en Tunisie, dans un pays où le code pénal prévoit, à son article 230, jusqu'à trois ans de prison pour les rapports entre personnes de même sexe.

 

Crédit photo : Habib M'henni/Wikimedia Commons