INFO TÊTU - La députée LREM Laurence Vanceunebrock a déposé ce mercredi 3 juin 2020 une proposition de loi visant à interdire les « thérapies de conversion », en progression sur le sol français. Elle veut introduire une infraction spécifique dans le code pénal et espère pouvoir compter sur le soutien du gouvernement.
« Je suis très heureuse de pouvoir enfin dire à toutes les victimes qu'elles seront entendues et que nous ferons tout pour que ces pratiques d'un autre temps soient interdites », confie la députée La République en marche de l'Allier Laurence Vanceunebrock en exclusivité à TÊTU. Ce mercredi 3 juin, la parlementaire a déposé une proposition de loi interdisant les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne, plus connues sous le nom de « thérapies de conversion ».
Très heureuse: la proposition de loi visant à interdire les #thérapiesdeconversion sur laquelle je travaille depuis 2 ans est enfin déposée. Réponse essentielle à l'attente des victimes. J'espère une date prochaine pour son examen à @AssembleeNat.#LGBTQIA@aurelien6801 pic.twitter.com/0CQ7XNC5d8
— Laurence Vanceunebrock (@LaurenceVanceu) June 3, 2020
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C'est en janvier 2018 que cette ancienne policière avait d'abord été interpellée sur le sujet. Début mars la même année, dans son rapport annuel sur la situation des droits fondamentaux dans l'Union européenne, le Parlement européen adoptait une résolution invitant ses États membres à interdire les « thérapies de conversion ». Auparavant, en 2015 déjà, c'était le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme qui appelait dans un rapport à prendre des mesures coercitives.
Des pratiques en progression
Jusqu’à présent, Malte était le seul pays européen, avant même cette résolution, à avoir explicitement interdit ces pratiques. L’Allemagne et l'Albanie se sont engagées dans la même voie en mai dernier, tout en restreignant la législation aux seuls mineurs - ce qui n'est pas l'option retenue par Laurence Vanceunebrock. « Les textes adoptés en Allemagne et en Albanie sont pour moi une impulsion que la France doit suivre au plus vite, précise la députée. D'autres pays avancent, il faut absolument agir maintenant car le nombre de thérapies ne fait que croître sur le territoire national. Il faut donc un message fort et des sanctions. »
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En effet, lors d'une mission d'information menée à l'Assemblée nationale conjointement avec son collègue La France insoumise de Seine-Saint-Denis Bastien Lachaud à l'automne 2019, l'élue de la majorité avait eu connaissance de manière directe ou indirecte, au terme de près de soixante auditions, d'une « centaine de faits ». L'association Le Refuge a en outre indiqué recevoir chaque mois une dizaine d'appels de jeunes concernant des « thérapies de conversion », un chiffre en hausse par rapport aux années précédentes.
Infraction spécifique dans le code pénal
Le texte de la proposition de loi, que TÊTU a pu consulter en exclusivité, comporte huit articles reprenant en grande partie les recommandations formulées par les deux députés à l'issue de la mission d'information. L'article premier vise à créer une infraction spécifique dans le code pénal, réprimant « les pratiques, les comportements ou les propos répétés visant à modifier ou à réprimer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre vraie ou supposée d’une personne et ayant pour effet une altération de sa santé physique ou mentale ». Les peines prévues sont de deux à trois ans de prison et de 30 000 à 45 000 euros d'amende.
Le reste des articles propose d'introduire une circonstance aggravante pour des infractions qui existent déjà dans la législation française (violences, abus de faiblesse, harcèlement moral ou encore exercice illégal de la médecine), de renforcer l'enseignement du respect des diverses orientations sexuelles et identités de genre dans les établissements scolaires, et demande au gouvernement de produire un rapport chiffré permettant de dresser un état des lieux précis des « thérapies de conversion » en France.
« J'espère que la voix des victimes sera entendue »
« Je suis extrêmement reconnaissant du travail de qualité effectué par les députés sur ce texte de loi, se réjouit Benoît Berthe, victime de « thérapies de conversion » dans la Communauté des Béatitudes, témoin phare du livre Dieu est amour : infiltrés parmi ceux qui veulent « guérir » les homosexuels (Flammarion) de Jean-Loup Adénor et Timothée de Rauglaudre (l'auteur de ces lignes, ndlr) et du documentaire Homothérapies, conversion forcée (ARTE) de Bernard Nicolas. Ces pratiques ne devraient plus exister depuis longtemps, leur persistance et expansion montre bien la nécessité de prendre des mesures fortes pour enrayer le système et stopper ces violences. » Il a aussi témoigné pour la mission d'information et dans les pages de TÊTU.
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La date de l'inscription de la proposition de loi à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale en vue de son examen et de son vote n'est pas connue pour le moment. En attendant, Laurence Vanceunebrock espère obtenir le soutien de l'exécutif, comme elle l'explique à TÊTU : « Je suis certaine de la sensibilité du gouvernement face à un tel sujet. Le président de la République a dit très tôt son ambition de réduire les LGBTphobies mais pour le moment peu de sujets ont réellement abouti - je pense bien sûr ici à l'ouverture de la PMA à toutes les femmes. J'espère que la voix des victimes de « thérapies de conversion » sera entendue et que le gouvernement, comme mes collègues de tous les partis, feront front, avec moi, contre ces pratiques. »
Crédit photo : Alex Guibord/Flickr