L'état civil refuse de changer le prénom de Lilie, une petite fille transgenre de huit ans. Le procureur lui reproche de ne pas avoir fourni la preuve d'une "modification irréversible" de son corps.
"Je suis surprise", se désole Lilie. Cette petite fille avait ému la France en septembre dernier, alors qu'elle se battait – soutenue par ses parents – pour que son institutrice la genre au féminin. Si l'Académie d'Aix-Marseille avait donné son accord pour que sa maîtresse abandonne le prénom assigné à la naissance de la petite fille, il semblerait que la bataille contre l'administration française ne soit pas terminée pour Lilie.
Selon les informations de RMC, ses parents ont entamé des démarches il y a quelques mois pour changer le prénom de cette petite fille de huit ans à l'état civil. Mais la justice a refusé de changer son prénom.
"Des vents en permanence"
La raison est difficile à concevoir. Dans une lettre adressée aux parents, le procureur de la République demande la preuve que la fillette a entamé "une modification irréversible" de son corps. Sa mère, Chrystelle, est particulièrement en colère. "On a l'impression de se prendre des portes et des vents en permanence, alors que dans notre vie du quotidien, les gens qu'on rencontre sont dans le soutien et la compréhension (l'appellent Lilie et la genrent au féminin). Il n'y a que l'administration" qui bloque, déplore cette mère à RMC.
Cette décision est d'autant plus surprenante que le changement de genre à l'état civil ne requiert pas de subir d'opération ou de traitement médical. Une simple recherche sur le site service-public.fr aurait permis au procureur de Carpentras de lire que : "Pour changer son sexe (sic) à l'état civil, il n'est pas nécessaire d'avoir suivi un traitement médical ou d'avoir été opéré. Vous devez démontrer que le sexe indiqué sur votre état civil ne correspond pas à celui de votre vie sociale".
Un changement de prénom
En l'occurrence, les parents de Lilie ont demandé non pas un "changement de sexe", qui nécessite d'être majeur, mais un changement de prénom. Pour appuyer la demande, service public indique qu'il suffit de démontrer que le prénom "porte préjudice" à la personne qui le porte. En la mégenrant, le procureur reconnaît que Lilie "a adopté l'apparence physique d'une petite fille", qu'elle "a le comportement social d'une petite fille" et qu'elle est "reconnue comme telle par son entourage tant familial qu'amical".
Lilie a fait savoir, à de nombreuses reprises, son mal-être profond lorsqu'elle est perçue comme un garçon. À ses parents, "je leur ai expliqué que je suis une fille. Que je suis né dans un corps de petit garçon mais que je voulais être une fille. C'est comme si plus personne ne savait qu'avant, j'étais un garçon", dit-elle tout simplement. "C’est allé crescendo. Elle nous a dit plusieurs fois par jour que sa vie était nulle. Et puis ça a empiré encore avec des pensées suicidaires, des phrases à tire-larigot comme 'ma vie est tellement nulle que je préférerais mourir'", raconte sa mère. Depuis, tout le monde genre la petite fille au féminin et l'appelle Lilie, même au catéchisme. Tout le monde… sauf l'administration.
Crédit photo : Capture d'écran Twitter / RMC