Dans une tribune, 86 militant·es des droits humains, associations et collectifs soutiennent Marc-Antoine Bartoli, ancien président d'Act Up-Paris poursuivi en diffamation par l'adjointe PCF à la mairie de Paris, Hélène Bidard.
En février 2020, après l’assassinat de Jessyca Sarmiento au Bois de Boulogne, Marc-Antoine Bartoli en tant que président d’Act Up-Paris a interpellé sur les réseaux sociaux Hélène Bidard, adjointe à la Maire de Paris chargée de l’égalité femme-homme. Son interpellation s’inscrivait dans le contexte d’une vague d’attaques, de menaces et de meurtres de travailleur·ses du sexe.
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Le militant reproche à Hélène Bidard son soutien aux politiques répressives et abolitionnistes qui mettent en danger la vie et la santé des personnes qui exercent le travail sexuel à Paris, de surcroît lorsqu’elles cumulent des facteurs de vulnérabilités.
Sous le premier mandat de maire de Paris mené par Anne Hidalgo, il a été difficile, voire impossible, pour les associations communautaires de travailleur·ses du sexe de nouer un dialogue avec Hélène Bidard qui est pourtant en charge de la question du travail sexuel. Alors en pleine campagne pour les élections municipales, bien déterminée à sauver son siège, Hélène Bidard n’a pas aimé les tweets de Marc-Antoine Bartoli.
Sa réponse en tant que responsable politique n’est pas d’entamer des consultations des associations de personnes concernées, de réfléchir en concertation à des politiques publiques protectrices pour les travailleur·es du sexe, de prendre conscience du douloureux impact de la répression orchestrée par la préfecture et la Mairie de Paris ; sa réponse est d’attaquer le militant en justice.
Nous voyons, dans cette attaque en diffamation de l’élue Hélène Bidard sur le président d’alors de l’association Act Up-Paris Marc-Antoine Bartoli, un usage détourné de la justice pour limiter la liberté d’expression des militant·es. C’est la fameuse procédure-bâillon tant dénoncée par les ONG et les militant·es de gauche. Nous tenons à préciser que les tweets de Marc-Antoine Bartoli visaient Hélène Bidard en sa qualité d’élue et qu’il ne peut donc s’agir de diffamation publique envers un particulier, comme elle l’entend.
Ce sont bien les interpellations des activistes LGBTI+ et de la lutte contre le VIH-sida qui ont mis en lumière les manquements des politiques en matière de santé publique.
Nous souhaitons réaffirmer l’article 10 de la Convention européenne des droits de l'Homme : “Toute personne a droit à la liberté d’expression”, cela doit être toujours valable, y compris et surtout lorsqu’il s’agit de critiquer l’action politique menée par un·e élu·e qui briguait un nouveau mandat. Aux termes du droit international relatif aux droits humains, aucune forme d’expression, à l’exception de l’appel à la haine constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence, ne doit être érigée en infraction, même s’il s’agit de propos choquants, offensants ou dérangeants.
Nous souhaitons également rappeler qu’au travers des dernières décennies, ce sont bien les interpellations des activistes LGBTI+ et de la lutte contre le VIH-sida qui ont mis en lumière les manquements des politiques en matière de santé publique. Ces interpellations et ces demandes de comptes ont permis de mieux aiguiller les pouvoirs publics notamment dans la réduction des risques, la prévention, l’accès aux dispositifs de santé sexuelle. Ils ont aussi permis de démontrer l’échec et le danger de la répression, mis en lumière l’affaire du sang contaminé, etc. Les tweets de Marc-Antoine Bartoli prolongeaient cette démarche et s’inscrivaient dans sa mission de président d’Act Up-Paris.
Nous sommes inquiets pour notre démocratie.
Nous sommes choqués par cette stratégie de dissuasion et cette judiciarisation du débat public, d’autant plus pour une élue qui se revendique de gauche et qui utilise les méthodes des dominants.
Nous sommes inquiets pour notre démocratie si les responsables politiques renoncent au dialogue. Nous déplorons ce temps perdu qu’Hélène Bidard pourrait consacrer à travailler au respect des droits humains des travailleur·ses du sexe. Si elle ne souhaite pas prendre la mesure de ses responsabilités en améliorant la santé, la sécurité et la vie des travailleur·ses du sexe, pourquoi ne pas confier cette mission à une personne qui s’en préoccupe ?
Nous militant·es des droits humains, féministes, LGBTI+, de la lutte contre le VIH-sida, représentant·es d’associations, nous souhaitons apporter un soutien à Marc-Antoine Bartoli dans cette affaire dont la première audience aura lieu le 3 Décembre à 13h30 au Tribunal judiciaire de Paris.
Aujourd’hui, cette attaque en justice tombe sur Marc-Antoine ; si nous n’agissons pas pour défendre notre droit à la critique politique, demain, cela pourrait viser chacun·e d’entre nous.
Signataires :
- Lydia Braggiotti, fondatrice du Bus Des Femmes
- Mélanie Jaoul, présidente de AATDS
- Mylène Juste, représentante du Collectif des Femmes de Strasbourg Saint-Denis
- Cybèle Lespérance, administratrice et porte-parole national du STRASS
- Chrysalide, association trans militante Lyon
- Cabiria, association de santé communautaire
- STRASS (Syndicat du Travail Sexuel)
- Act Up-Paris
- Fédération Parapluie Rouge
- Association PDA, Partage, droits et autonomie
- Association Bad Boys
- Collectif Archives LGBTQI
- Assises Lesbiennes Marseille
- Karine Espineira, Université Paris 8
- Gwen Fauchois, ancienne vice-présidente et porte-parole d'Act Up-Paris
- Jérôme Martin, ancien président d'Act Up-Paris
- Antoine Chassagnoux, président et militant d’Act Up-Paris
- Camille Spire, présidente de Aides
- Aurélien Beaucamp, vice-président de Aides
- Diane Leriche, coordinatrice du TRT-5 CHV, ancienne co-présidente d'Acceptess-T
- Sébastien Tüller, juriste et militant des droits humains
- Morgan Jasienski, co-responsable de la commission Immigration EELV
- Pablo Pillaud-Vivien, responsable éditorial de la revue Regards
- Cy Lecerf Maulpoix, journaliste et auteur
- Sam Bourcier, sociologue
- Romy Alizée, artiste
- Gras Politique, association féministe et queer qui lutte contre la grossophobie
- Actions Traitements, association de patients et de personnes vivant avec le VIH
- Edouard Hesse, chercheur chez Génération Libre
- Les Grenades, collectif féministe intersectionnel et inclusif
- Nathan Boumendil, militant de la lutte contre le VIH-sida
- Alice Carret, militante écologiste et féministe
- Coralie Delmur, féministe et professeure de lettres
- Eva Vocz, performeuse
- Association Transat
- Thierry Schaffauseur, coordinateur du STRASS
- Eric Arassus
- Maxime Pierluisi, poète schizophrène
- Mattea Riu, membre d'Arcu LBGTI Corsica
- Lucas Séné-Peltier, bénévole associatif
- Rémy Sébille, militant écologiste et professeur de lettres
- Sabrina Simoné, militante féministe
- Chech Lhuillier, activiste d'Act Up-Paris
- Arlindo Constantino, militant
- Valérie Pierson, féministe
- Ni Una Menos, collectif féministe de lutte(s)
- Noemie de Grenier, militante
- Olga Volfson, militant·e et journaliste LGBTQI+ et anti-grossophobie
- Fred Lebreton, activiste VIH/sida
- Laure Dasinières, journaliste indépendante
- Axelle Ouvrard
- Jean-Philippe Cazier, écrivain et critique
- François Berdougo, militant de l'accès à la santé de tou·te·s
- Victor Go, militant de la lutte contre le VIH-sida
- Ludivine Demol, chercheuse en genre et sexualité et militante féministe
- Union Syndicale Lycéenne 13
- Patrick Thévenin, journaliste
- Laura Paoli-Pandolfi, illustratrice et militante féministe
- Jean-Sébastien Herpin, EELV
- Lee Ferrero, adjoint délégué à la lutte contre les discriminations, 4e secteur de la ville de Marseille
- Mission des Cagoles, couvent des Chênaies, Sœur de la Perpétuelle Indulgence
- Nicolas Sergeant, coordinateur social d'Act Up-Paris
- Jackie Pisarik, ancien·ne Secrétaire Générale d'Act Up-Paris
- Isayie Moreira Da Silva, Militant LGBTQI
- Elsa Noual, militante d'Act Up-Paris
- Colette Amato, travailleuse sociale
- Juan Florian, président de Bad Boys
- Anaïs de Lenclos, militante du STRASS
- Corinne Lakhdari
- Marie R, militante, travailleuse du sexe
- Josselin Tricou, chercheur en genre et sexualité
- Lou Depreaux Kraviec, activiste
- Elisabeth Lebovici, journaliste, militante et critique d'art
- Awa VK, activiste
- Elsa Aloisio, vidéaste
- Didier Lestrade, co-fondateur d'Act Up-Paris
- Act Up Sud Ouest
- Chloé Le Gouëz, militante féministe
- Sylvain De Smet, militant écologiste, tête de liste pour F.L.U.O aux élections régionales IDF en 2015
- Michela Frigiolini, militante à Act Up-Paris de 1992 à 1996
- Drass Tecles, militante LGBTI au NPA
- Alix Béranger, militante féministe
- Céline Mouzon
- Pierre Dauphin, secrétaire Général d'Act Up-Paris
- Marie Helmbacher, ex-directrice du Bus des Femmes
- Sergio Coronado
Crédit photo : capture d'écran Facebook / Act Up-Paris