Depuis l'ouverture de la PMA aux lesbiennes et aux femmes seules, 6.800 demandes d'initiation de parcours ont été faites en France, mais seuls 2.300 premiers rendez-vous ont pu être assurés, faute de moyens humains.
"Le fait que la PMA ne soit pas ouverte aux couples de femmes et aux femmes seules est une discrimination intolérable", disait Emmanuel Macron, alors candidat à la présidentielle, en février 2017. Cinq ans plus tard, la PMA pour toutes a fini par être adoptée. Une victoire législative qui débouche néanmoins, dans les faits, sur de grosses difficultés éprouvées par les femmes concernées pour engager leur projet de PMA, faute de rendez-vous disponibles dans les centres. Or, le temps compte dans cette affaire.
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Les demandes de PMA ont de facto explosé les anticipations du ministère de la Santé. En 2019, annonçant la réforme lorsqu'elle était ministre de la Santé, Agnès Buzyn prévoyait un rythme annuel de 2.000 parcours de PMA supplémentaires. Mais les trois derniers mois de 2021, ce sont pas moins de 6.800 demandes d'initiation de PMA qui ont été faites par des couples lesbiens ou des femmes seules.
La PMA "était une demande sociétale énorme"
Mi-septembre, le ministère de la Santé a promis une rallonge financière pour faciliter ces parcours, et des recrutements sont en cours mais en attendant les renforts, les centres ne parviennent pas à répondre à l'affluence. Sur les 6.800 demandes, 2.300 premières consultations ont pu être réalisées, sachant qu'il faut ensuite compter 12 mois d'attente en moyenne entre ce premier rendez-vous et la première tentative, avec de fortes disparités territoriales.
"Depuis la mise en place de la réforme, nous avons reçu dans notre centres 260 demandes d'initiation de parcours alors qu'en temps normal, nous tournons à 40 parcours de PMA avec don par an. C'était une demande sociétale énorme", témoigne auprès de TÊTU Florence Brugnon, cheffe de service du service de PMA à l'hôpital de Clermont-Ferrand et présidente des BLEFCO, la fédération des centres de PMA.
Six tentatives de PMA en six mois
Au total, six mois après le vote de la loi, seules six tentatives d'insémination ont pu avoir lieu. Auprès de TÊTU, l'agence de la biomédecine assure "qu'une grossesse est en cours". Mais difficile d'imaginer que les premiers bébés issus d'une PMA réalisée en France par un couple de femmes naissent avant la fin du quinquennat, comme le promettait Olivier Véran. "Le moins que l'on puisse dire, c'est que les parcours ne sont pas fluides du tout. En Espagne, en Belgique ou au Danemark, la PMA est beaucoup plus simple parce que les parcours sont harmonisés, contrairement au système français", regrette Catherine Clavin, vice-présidente de l'association parents gay et lesbiens (APGL).
L'association Les Enfants d'arc-en-ciel dénonce un traitement différencié en France selon le profil de la femme qui veut bénéficier d'une PMA. Certains centres, débordés, refuseraient ainsi de donner un rendez-vous à des femmes de moins de 29 ans au prétexte que des femmes plus âgées sont prioritaires. "C'est créer des critères discriminatoires qui ne sont pas dans la loi", déplore l'asso.
Des dons au rendez-vous
De plus, "le chiffre de 6.800 demandes de rendez-vous est largement sous-estimé car de nombreuses femmes nous ont rapporté qu'on leur refusait purement et simplement de demander une consultation. Certains médecins ont même fait savoir qu'ils ne souhaitent pas pratiquer de PMA auprès de couples de femmes", ajoute la présidente de l'association.
Heureusement, l'Agence de la biomédecine apporte également deux (très) bonnes nouvelles. "Près de 600 hommes ont donné leurs spermatozoïdes en 2021", annonce-t-elle dans un communiqué. C'est un record historique, autour du double du rythme de croisière. "La campagne d'information sur le don a particulièrement bien fonctionné. À tel point que certains centre de recueil sont débordés", confirme Florence Brugnon. Par ailleurs, 900 femmes ont donné des ovocytes : là encore, un record !
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Crédit photo : Guillaume de Germain / Unaplash