[Tribune] Député du groupe Renew au Parlement européen, où il est vice-président de l’intergroupe LGBTI, Pierre Karleskind appelle à soutenir le renouvellement à l'ONU du poste d’expert indépendant sur les questions LGBT, et à nommer en France l'ambassadeur promis sur le sujet.
Il est une liberté qu’il semble décidément bien vu, dans certains endroits du monde et dans certains systèmes de pensée, de remettre en cause : la liberté des femmes et des hommes de disposer de leur corps ! Au-delà de leur corps, c’est aussi la liberté de disposer de ses sentiments, de ses affects, de ses désirs, et de façon plus générale et plus simplement, la liberté de disposer de soi-même qui est aujourd’hui sous le feu des attaques des franges les plus conservatrices dans le monde.
C’est grâce à une lutte séculaire que ces libertés ont fini par s’imposer dans bien des pays. Il en a été des droits des femmes, des droits des minorités visibles, des personnes LGBT+ ou bien encore de l’inclusion des personnes en situation de handicap. Nous appartenons à une civilisation qui a su évoluer pour leur donner corps. Rien n’a été évident. Force est de constater que rien ne l’est encore.
Au moment où aux États-Unis, dans l’arrêt de la Cour suprême réhabilitant les interdictions d’avorter, certains juges annoncent vouloir remettre en cause d’autres de ces droits, au moment où la Russie s’en prend à sa voisine, justifiant, entre autres, son intervention par la nécessité "d’éradiquer l’idéologie LGBT", au moment où le gouvernement chinois intime l’ordre à ses joueurs de foot de paraître "plus virils", au moment où une Coupe du monde de foot va se jouer dans un pays pénalisant lourdement l’homosexualité, notre pays, la France, s’affirmant patrie des droits de l’Homme, se doit de monter au front pour défendre ces libertés qui font son identité. Ce à quoi nous assistons est de plus en plus clairement l’utilisation des questions de société, et singulièrement des questions LGBT, pour tracer une ligne de rupture civilisationnelle dans le monde. Notre pays doit prendre pleinement part à ce combat, en rappelant au monde que la France est irrémédiablement du côté de la liberté.
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Dans quelques jours, le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies décidera de maintenir, ou non, le poste de poste d’expert indépendant de l’ONU sur les questions LGBT, dont le titulaire est aujourd’hui Victor Madrigal-Borloz. La France, membre de ce conseil, ne s’est faite que trop discrète sur ce sujet. L’ONU n’est à l’évidence pas l’institution la plus LGBT-friendly du monde, mais justement, nous ne pouvons donner aux réactionnaires de tous ordres cette victoire supplémentaire. La France doit se placer en position de leader de ce combat. Les dernières semaines ont montré combien cela était pertinent. Soutenons le renouvellement du mandat de Victor Madrigal-Borloz et menons une action auprès des autres pays en ce sens !
Par ailleurs, face à une forme d’accélération et une répétition des attaques contre les droits humains et contre les droits LGBT+ dans le monde, y compris à nos portes, la nomination d’un ambassadeur en charge des questions LGBT+ devient urgente. C’est un engagement du candidat Emmanuel Macron. Il convient que le gouvernement le mette en œuvre sans attendre, et envoie au monde le signal de son plein engagement pour la promotion de tous les droits humains et contre toute forme de discrimination. La France, qui a toujours affirmé être à la pointe de la diplomatie des droits de l’Homme, s’honorerait à rejoindre ainsi le Royaume-Uni et l’Italie dans le leadership européen sur ces sujets.
La France est la patrie des droits de l’Homme. L’offensive néo-réactionnaire aux quatre coins du monde la rappelle à ses responsabilités. Sa voix compte. Sa voix est attendue. Qu’elle se fasse entendre !
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Crédit photo : Eric Beracassat / Hans Lucas via AFP