Si le courage des femmes à la tête des manifestations actuelles en "République" islamique d'Iran force le respect de quiconque est attaché aux droits humains, leur mouvement frappe en particulier nos cœurs LGBTQI+, car leur combat est le nôtre.
Panique chez les mâles islamistes au pouvoir en Iran. Alors qu'il n'avait plus connu de manifestations massives depuis celles provoquées par la hausse des prix de l'essence en 2019, ni de contestation durable depuis celle qui avait entouré l'élection présidentielle de juin 2009 – les deux fois, les manifestations ont été réprimées dans le sang –, voilà que le régime "guidé" par l'ayatollah Ali Khamenei fait face à une nouvelle éruption de liberté. Et les femmes sont à sa tête, en particulier les jeunes Iraniennes. C'est que l'étincelle de la révolte a jailli le 16 septembre de la mort de Mahsa Amini (son visage illustre cet article), Iranienne de 22 ans, à la suite de son arrestation par la police des mœurs dans la capitale, Téhéran, pour non-respect du code vestimentaire strict imposé aux femmes en "République" islamique d'Iran.
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Depuis lors, des manifestations ont lieu tous les soirs dans plusieurs villes du pays, et les autorités ont fait état de l'arrestation de plus de 1.200 manifestants. L'agence de presse Fars estime qu'environ 60 personnes ont déjà été tuées – au moins 76 selon l'ONG Iran Human Rights.
Mahsa Amini
Si le courage de ces femmes force le respect de quiconque s'attache aux droits humains, leur mouvement frappe en particulier nos cœurs LGBTQI+. Leur lutte est universelle car elles se battent pour une liberté qui nous met toustes d’accord : celle de porter le voile ou non, et, le cas échéant, de choisir comment. En jetant leur voile au feu, ce n'est pas la religion qu'elles attaquent mais son utilisation politique. Ce que clament les Iraniennes dans ce geste éminemment symbolique, c'est que les corps des femmes n'appartiennent qu'à elles, tout comme nous appartiennent nos corps pédés, trans, intersexes, queers.
La filiation entre les luttes queers et la révolte des Iraniennes est renforcée par la crainte, chez les ultra-conservateurs au pouvoir à Téhéran, d'un effet domino qu'ils redoutent comme l'apocalypse : si les femmes obtiennent plus de droits, alors ils savent que ceux des LGBTQI+ suivront, a justement expliqué cette semaine dans l'émission C ce soir la sociologue franco-iranienne Azadeh Kian. Logique, au fond : nos luttes remettent en cause les mêmes systèmes, et activent les mêmes peurs chez ces mâles cramponnés à l'illusion de leur puissance supérieure.
Cette offensive conjointe contre les droits des femmes et ceux des personnes LGBTQI+, c'est la marque du lobby réac international. Nous vous en avons beaucoup parlé, ces derniers mois, devant la montée, en Europe et aux États-Unis notamment, d'une vague conservatrice hostile au droit à l'IVG, à l'autodétermination et, plus globalement, aux droits des minorités. De la Russie de Vladimir Poutine aux États-Unis de Donald Trump en passant par la Hongrie de Viktor Orbán, la Pologne d'Andrzej Duda et désormais l'Italie de Giorgia Meloni, ces réactionnaires intoxiqués de principes religieux dépassés entonnent les mêmes refrains, repris chez nous par Marine Le Pen et Éric Zemmour… En somme, Frères d'Italie (Fratelli d'Italia) de Giorgia Meloni, ou Frères musulmans : même combat.
Hadis Najafi
Élisabeth Badinter a donc eu raison de rappeler, ce mercredi sur France Inter : "Quand Dieu pèse presque entièrement sur une société, c'est la fin des libertés féminines, que ce soit [avec] toutes les religions monothéistes." Comme aussi en Afghanistan, où les Talibans, qui ont repris Kaboul il y a un an, dispersent les manifestations de femmes à rafales de kalashnikov. En revanche, Élisabeth Badinter se trompe lourdement en oubliant que la même règle vaut pour les personnes LGBTQI+. "Vous avez peut-être remarqué que les islamistes ne disent jamais un mot contre les militantes LGBT, jamais…", philosophe-t-elle. Seulement les mots sont inutiles quand les islamistes balancent, depuis le toit de bâtiments, des homosexuels vivants – souvenez-vous, c'était dans l’État islamique, type d'exaction également perpétré dans la Tchétchénie de Ramzan Kadyrov.
Les femmes et les personnes LGBTQI+ n’ont même pas à dire leur soutien aux Iraniennes, ni à Salman Rushdie, récemment attaqué au couteau par un islamiste pour avoir défendu la liberté : nous vivons de leur côté des oppressions et des persécutions. À l'opposé sont des "Frères" de tous pays et religions, anti-femmes, anti-LGBT, anti-libertés. Avec Mahsa Amini, avec Hadis Najafi, 20 ans, aussi tuée – par balles – lors d'une manifestation en Iran, nous leur disons : nos corps, nos choix ! Liberté et autodétermination, sans quoi point de salut.
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Absolument magnifique ! Bella ciao chanté par une Iranienne en persan. Ces femmes sont impressionnantes… Vive la liberté. #Mahsa_Amini #Iran pic.twitter.com/4CwUqtJTeH
— Farid Vahid (@FaridVahiid) September 24, 2022
Crédit photo : Mahsa Amini , via réseaux sociaux