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histoirePride : l'histoire politique et festive de nos marches des Fiertés

Par Nicolas Scheffer le 16/06/2023
Marche des fiertés à Paris, en 1977.

[Article à retrouver dans le magazine têtu· de l'été disponible en kiosques] Bien sûr qu’on peut faire une marche des fiertés sans paillettes, sans chars, sans fanfares ni cotillons. Mais ce n’est pas pour rien que nos manifestations ont, très tôt, pris un aspect festif. Car si nos marches occupent la rue, nos fêtes ouvrent la voie. À nos droits, à notre liberté !

"Être gay c’est, je crois, non pas s’identifier aux traits psychologiques et aux masques visibles de l’homosexuel, mais chercher à définir et à développer un mode de vie.” Dans un entretien à Gai Pied, en avril 1981, Michel Foucault décrit l’aspiration d’une nouvelle génération à sortir du placard. L’intellectuel poursuit : “Il devrait y avoir un inventivité propre à une situation comme la nôtre et à cette envie que les Américains appellent coming out, c’est-à-dire se manifester.” Dans la foulée de cet entretien, le 4 avril 1981, en pleine campagne présidentielle, les homosexuels forment pour la première fois une marée dans les rues de Paris : 10.000 gays et lesbiennes défilent de Maubert – Mutualité à Beaubourg en passant par Bastille. “Nationalisez les usines à paillettes !” crient-ils, des crécelles à la main, avant une soirée de gala animée par Juliette Greco, et un bal jusqu’à l’aube. Le ton est donné pour les années à venir : pour faire entendre ses revendications, le militantisme homo passera par la fête.

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Dix ans plus tôt, déjà, des homosexuels faisaient partie des défilés du 1er-Mai. À l’occasion de la Fête du travail en 1971, une cinquantaine de gays et de lesbiennes du Front homosexuel d’action révolutionnaire (Fhar) manifestent pour la première fois au grand jour dans cette marche où l’on chante L’Internationale le poing levé, et où l’on danse en l’honneur de Che Guevara ou de Hô Chi Minh. Sous le regard pantois des passants, des homos forment un petit cortège où l’on affirme son orientation sexuelle malgré la persistance dans la loi française de dispositions infamantes faisant de l’homosexualité un “fléau social”. “Notre première revendication, c’était de sortir du placard, d’apparaître et de dire que nous existions. Ce n’était vraiment pas gagné, notamment dans une manifestation encadrée par la CGT qui, à l’époque, était particulièrement homophobe”, rappelle Alain Lecoultre, plus connu sous son nom de plume, Alain Sanzio.

La fête pour faire bloc

D’autant qu’au sein du défilé, le petit groupe des Gazolines, formé principalement de femmes transgenres, se fait remarquer par ses rires, son humour camp et ses cris de ralliement bien loin des slogans officiels : “Bite ! criaient-elles. Ah que c’est bon, de se faire enculer !” Elles s’amusent, veulent attirer l’attention et y parviennent. “Cent journalistes voulaient prendre en photo notre maquillage raté”, se souvient Hélène Hazera, ancienne journaliste et figure du mouvement, sur France Culture lors d’une rétrospective de sa carrière. “Dans les foules, les gens étaient un peu sidérés et amusés de voir des militants comme Pablo Rouy danser en robe et en voilette. C’était un mouvement très spontané, de révolution des normes et non pas de réforme de la société”, décrit Hervé Liffran, militant au sein de ce qui allait devenir le Comité d’urgence anti-répression homosexuelle (Cuarh).

“Danser, jouer la provocation en faisant les folles, c’était une manière de renverser le stigmate en définissant de nouvelles normes."

“Danser, jouer la provocation en faisant les folles, c’était une manière de renverser le stigmate en définissant de nouvelles normes. On voulait renverser la société et non pas la réformer”, ajoute Patrick Cardon, engagé auprès du Fhar d’Aix-en-Provence. Face à la rigueur de la gauche et de la plupart des organisations gauchistes de l’époque, les Gazolines prônent “le délire pour le délire, la rupture totale, ce qui n’est pas rien”, lit-on dans l’un des journaux du Fhar, L’Antinorm. Dans l’optimisme général des années 1970, “l’aspect camp – queer, dirions-nous aujourd’hui – le travestissement, la dérision et la radicalité politique faisaient partie du logiciel des personnes qui fréquentaient les Groupes de libération homosexuelle (GLH) à Paris et dans les grandes villes”, complète Jean Stern, cofondateur de Gai Pied et collaborateur aujourd’hui de têtu·.

Marche des fiertés à Paris, en 1977.
Crédit photo : STRINGER/AFP

Se sentant davantage militant homosexuel que révolutionnaire, Alain Lecoultre quitte avec ses amis la Ligue communiste révolutionnaire pour fonder en 1978 Masques, une “revue des homosexualités” de quelque 150 pages, vendue dans les cortèges du 1er-Mai. La publication rencontre un succès immédiat et se vend à 3.000 exemplaires, mais ça ne paye pas les dettes de rotatives. Pour éponger le passif, les rédacteurs ont l’idée de rassembler leurs lecteurs pour une fête à 30 francs l’entrée organisée au Bataclan, à Paris, en juin 1979. Tout en s’amusant, ils veulent rendre hommage à “Christopher Street, la première révolte des homos à New York en 1969”, dans le bar gay Stonewall Inn, à la suite d’une descente de police. Parce que commémorer cet événement ne pouvait pas être triste, un récital de la troupe de drag queens Mirabelles et un bal masqué et costumé font suite aux débats. “L’événement n’avait pas qu’une visée économique. Nous souhaitions sortir de l’enfermement et vivre enfin au grand jour ; on voulait draguer, s’amuser et… baiser au Bataclan !” confie Alain Lecoultre.

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Crédit photo : Clément/AFP

À Marseille, le premier bal gay organisé en 1978 est accueilli par les Renseignements généraux, qui infligent aux organisateurs une amende de 30.000 francs afin de décourager les organisateurs. “Alors qu’on s’émancipait, l’État était là pour nous étrangler. Mais on a tenu !” retrace Jacques Fortin, initiateur du GLH marseillais et de l’Université d’été homosexuelle, au cours de laquelle est fondé le Cuarh. Au milieu des années 1970, un bal est organisé quai de la Tournelle, en plein centre-ville parisien, chaque 14-Juillet. “C’était noir de monde, ça débordait de partout ! Nous sortions des backrooms pour faire la fête à la vue de tous. C’est ça, la libération !” se remémore avec enthousiasme Hugues Fischer, ancien président d’Act Up-Paris. “Comme de nombreuses personnes, j’ai été arrêté en raison de mon homosexualité. Faire la fête au vu et au su de tout le monde était un acte très fort et particulièrement émouvant, une forme de résistance dans une société qui ne voulait pas de nous”, témoigne Michel Chomarat, condamné pour outrage public à la pudeur dans l’affaire du Manhattan, après une descente de police dans la backroom de l’établissement parisien en 1977. “Nous nous constituions comme une force sociale puissante, la fête permettait de faire bloc et de nous rapprocher”, analyse Jacques Fortin.

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En 1980, la première marche d'envergure

En octobre 1980, le Cuarh appelle ceux et celles “qui refusent la répression et le racisme anti-homosexuel” à se mobiliser, et “la plus grande manifestation contre les discriminations anti-homosexuelles jamais vue en France” rassemble 3.000 personnes. “Les cortèges homosexuels du 1er-Mai cherchaient à célébrer l’homosexualité, un rapport à la différence. À partir de 1980, il y a de la joie mais la dimension revendicative est très importante pour défendre un droit à l’indifférence et à être entièrement inclus dans la société”, développe Mathias Quéré, auteur de la thèse Quand nos désirs font désordres, une histoire du mouvement homosexuel français de 1974 à 1986.

S’activant dans la France entière, des groupes d’homosexuels se retrouvent à Paris comme en pèlerinage pour cette manifestation nationale où l’on peut “se manifester”, comme le dit Foucault. À l’aube de l’élection présidentielle, la marche du 4 avril 1981 rassemble 10.000 personnes. Une semaine plus tard, Gai Pied organise une fête au Palace, où résonne encore le disco. Yves Navarre, lauréat du Goncourt un an plus tôt pour Le Jardin d’acclimatation, le récit d’un homosexuel de bonne famille ayant subi une lobotomie à 20 ans afin que son père puisse devenir ministre, lit un télégramme du candidat François Mitterrand : “Par ces quelques mots, je tiens à vous dire que je m’associe tant à la ferveur manifeste et nécessaire de votre marche nationale, quand vous défilez, qu’à votre fête ce soir. La cause doit aller avec la fête.”

“Pour beaucoup la marche était l’occasion d’une bouffée d’air, alors on voulait absolument la poursuivre le plus tard possible pour profiter de ce moment jusqu’au lever du soleil.”

Jack Lang, qui fut son ministre de la Culture, explique aujourd’hui : “François Mitterrand avait compris qu’il fallait lever les interdits et que cette énergie libérée s’exprimerait de façon collective. Il y avait un besoin d’aller vers les autres, de faire communauté.” Si l’authenticité du télégramme est discutée – Yves Navarre aurait inventé le message pour forcer la main au candidat socialiste –, une fois au pouvoir, la nouvelle majorité de gauche met bien fin à la répression légale de l’homosexualité : en décembre 1981, Gaston Defferre, ministre de l’Intérieur, signe une circulaire à l’attention des services de police pour faire cesser le caractère discriminatoire des contrôles, et en 1982, une loi portée par la députée Gisèle Halimi et le ministre Robert Badinter abolit le “délit d’homosexualité”, tandis que le ministère de la Culture lève la censure de livres et que celui de la Santé plaide pour que l’homosexualité soit retirée de la liste des maladies mentales de l’Organisation mondiale de la santé (ce sera fait en 1990).

Dès lors, tandis que pour la première fois de l’histoire le pouvoir est du côté des homos, il devient moins évident de mobiliser derrière une revendication politique. Qu’à cela ne tienne, la Gay Pride sera un moment de célébration de l’homosexualité. Gai Pied raconte l’avant-marche de 1982 : “Plusieurs bars ouverts tous les jours avaient fermé leurs portes pour permettre à leurs habitués de se rendre à la manif ; l’un, même, depuis une semaine, assénait au micro, entre deux airs de disco et trois demis de bière, le slogan qu’il modulait en fonction de l’ambiance du moment : « Samedi, rendez-vous à 15h à Montparnasse. Allez-y tous… On y sera. »” Après la marche, les boîtes de Pigalle, le Daytona ou la Loco, sont bondées ; ça baise au Manhattan pour éviter de se faire détrousser au jardin des Tuileries, et la vapeur des saunas du King Night est aussi chaude que les clients qui arpentent le lieu. “Mon copain de l’époque habitait la Picardie et lorsqu’il venait marcher à Paris, grâce à l’anonymat de la capitale, il pouvait enfin vivre comme il l’entendait et sortir, c’était très libérateur. Et puis on passait des après-midi entières à nous préparer et à discuter de comment on allait pouvoir provoquer”, se souvient Jean Stern. “La vie n’était pas toujours facile, pour beaucoup la marche était l’occasion d’une bouffée d’air, alors on voulait absolument la poursuivre le plus tard possible pour profiter de ce moment jusqu’au lever du soleil”, confirme Michel Chomarat.

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Crédit photo : PHILIPPE WOJAZER/AFP

Une jeep comme premier char en 1983

Les photos de 1983 montrent David Girard, entrepreneur propriétaire de lieux de plaisir et autoproclamé “Citizen Gay”, sur une Jeep, premier “char” attesté de la Gay Pride. “En 1981 et 1982, Gai Pied et Masques disposent de camionnettes, et en 1983 un char commercial accompagne pour la première fois une marche revendicative. Bien sûr, il s’agissait pour Girard d’une publicité pour ses établissements, mais cela plaçait des commerces de notre côté”, explique Alain Lecoultre. Cette sortie du placard accompagne l’essor d’un quartier gay à Paris, le Marais, où émergent de nombreux lieux de convivialité : Le Duplex, le Central, le Piano Zinc, le Coffee Shop… mais aussi la librairie Les Mots à la bouche. “Les lieux du Marais sont des bars militants où l’on trouve les journaux gays, alors que la plupart des clubs de la rue Saint-Anne refusaient les tracts et les affiches des associations”, développe le sociologue et journaliste Frédéric Martel dans Le Rose et le Noir.

Malgré ce soutien, le secteur militant regarde d’un œil torve l’arrivée de ces nouveaux acteurs qui structurent la vie gay au détriment des associations et des collectifs. Qualifié de “petit limonadier” par Guy Hocquenghem, David Girard, à la tête d’un début d’empire – deux saunas, une discothèque, deux répondeurs téléphoniques, un journal gratuit –, finance la Gay Pride de 1986. Le Cuarh refuse de participer à l’organisation de la marche, considérant qu’elle “ne serait qu’une affirmation du Gay Business”. Militant et responsable du Tango, l’une des plus vieilles discothèques de Paris, Hervé Latapie pointe à ce sujet : “Beaucoup ont attaqué David Girard, pensant qu’il ferait de la marche une boîte de nuit sans revendications, mais sans lui elle aurait disparu ! Et puis, en donnant une dimension très festive à la manifestation, il a au contraire permis d’attirer de nombreuses personnes vers le militantisme homosexuel, et a rassemblé des gens politiquement opposés.”

“L’arrivée de Mitterrand a étouffé l’esprit de 1968. Il ne s’agissait plus de révolution culturelle homosexuelle mais d’adapter l’existant pour faire une place aux homosexuels."

En ce sens, David Girard colle à cette période d’émancipation, celle d’une génération voulant profiter de la liberté conquise par les militants historiques. “L’arrivée de Mitterrand a étouffé l’esprit de 1968. Il ne s’agissait plus de révolution culturelle homosexuelle mais d’adapter l’existant pour faire une place aux homosexuels. Il n’y avait plus d’autre solution que de lutter pour des réformes étroites et s’insérer dans la loi”, remarque, nostalgique, Jacques Fortin. Si elles ont intégré l’homosexualité dans la société plutôt que de la révolutionner, ces “réformes étroites” ont tout de même abouti à de grands droits. Jan-Paul Pouliquen, mort en avril et fondateur d’Homosexualités et socialisme en 1983, est ainsi à l’origine de l’adoption en 1999 du pacs, une urgence pour protéger les couples, dévastés par le sida – avant l’adoption en 2013 du mariage pour tous.

Marcheurs LGBT lors d'une Pride lyonnaise
Crédit photo : Philippe Merle/AFP

Danser = vie, les années sida

Il pleut le 20 juin 1992 quand une dizaine de pom-pom boys & girls en jupes roses ouvrent le cortège d’Act Up-Paris avec le slogan “danser = vie”. Les convocations au cimetière parisien du Père-Lachaise sont devenues monnaie courante dans la communauté gay, et tandis que la maladie ne cesse de progresser, s’amuser, danser, rire et chanter deviennent des actes de révolte contre la mort. “C’était un acte profondément militant, un moyen de conjurer le sort, de nous réapproprier nos corps et de dire que nous n’étions pas condamnés à suivre des corbillards, mais au contraire que nous étions prêts à combattre”, retrace Hugues Fischer. 

36 982, 36 983, 36 984… Au Palace, ce soir de juin 1995, un compteur lancinant tourne toute la nuit. “Toutes les deux secondes, dans le monde, une personne est contaminée par le virus… En France, un nouveau cas de sida est déclaré toutes les heures. Toutes les deux heures, le sida tue une nouvelle personne”, martèlent les militants d’Act Up-Paris. L’association, fondée en 1989, organise alors une vente aux enchères afin de récolter des fonds pour la lutte contre le VIH. Catherine Deneuve s’y fait discrète, Muriel Robin, assise par terre, regarde un sketch intitulé “Air virus, la compagnie des allers simples”, tandis que Barbara a spécialement écrit une chanson, “Le Couloir” (celui de l’hôpital). “Act Up voulait alerter par tous les moyens, et ces fêtes étaient une occasion supplémentaire. Ce soir-là, alors que, pendant des années, on a tu l’épidémie, les militants étaient sur le devant de la scène et ils pouvaient l’ouvrir devant un public important venu les écouter”, soutient Hugues Fischer. 

“Au-delà du bruit, de la possibilité de se faire entendre, avoir un char était un moyen de mettre en avant les bénévoles de l’association en montrant au reste des manifestants qu’on était les plus cool.”

En 1995, Act Up-Paris dispose du plus gros camion de la marche annuelle, sur lequel le slogan “action = vie”, peint en blanc sur fond noir, saute aux yeux. Le message est d’autant plus visible que le char rivalise avec celui du Queen, discothèque tendance, qui fera davantage trembler les fenêtres du boulevard Saint-Germain. “Au-delà du bruit, de la possibilité de se faire entendre, avoir un char était un moyen de mettre en avant les bénévoles de l’association en montrant au reste des manifestants qu’on était les plus cool”, reprend Hugues Fischer. Dans sa tradition d’interpellation, Act Up imagine les die-in, des happenings où l’on s’allonge au sol dans un silence de plomb pour alerter sur la crise meurtrière du sida. Après quelques instants, une corne de brume retentit, et la fête recommence, encore plus fort. Mémoire et vie, l’effet cathartique du mélange est immédiat et exaltant.

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Crédit photo : Pascal Guyot/AFP

Une marche parisienne plus écolo

Cette année l’Inter-LGBT, organisatrice de la marche des Fiertés parisienne, a pris la décision de supprimer les chars, mettant en avant des raisons écologiques, logistiques mais aussi politiques. “Nos revendications se doivent d’être encore plus visibles et entendues. C’est en nous retrouvant tou·te·s au même niveau et dans cette horizontalité partagée que nous unissons davantage nos voix et nos fiertés”, écrit-elle dans un communiqué assurant que la Pride restera néanmoins une fête. Une décision saluée par plusieurs organisations, qui peinaient notamment dans la compétition à qui financera le plus gros char. “On apprécie évidemment d’avoir des alliés, mais c’est désagréable de voir nos slogans recouverts par le bruit d’organisations dont les revendications ne sont pas spécifiquement LGBTQI+”, résume Hervé Latapie, le trésorier du Centre LGBTQI+ de Paris. Dans les années 2000 et 2010, son char a justement accueilli des associations qui ne pouvaient pas s’en payer un.

“Face à La Manif pour tous, il ne faut pas oublier ce que la joie a apporté au mouvement militant pour ressourcer notre énergie."

Mais d’autres militants s’inquiètent d’un ternissement de nos cortèges. “Face à La Manif pour tous, il ne faut pas oublier ce que la joie a apporté au mouvement militant pour ressourcer notre énergie, rappelle Flora Bolter, codirectrice de l’observatoire LGBTI+ de la Fondation Jean-Jaurès. L’affirmation positive et joyeuse est également indispensable alors que le reste de l’année, nous devons déconstruire les stéréotypes de façon studieuse et souvent conflictuelle. Là, il s’agit d’être qui on est sans se préoccuper de savoir si on est respectable ou non.” Nous avons déjà connu des marches moins déjantées, comme en 2021, où les chars avaient été annulés pour cause de crise du Covid, ou encore en 2015 après les attentats islamistes de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher. Cette année-là, la Pride est particulièrement encadrée, avec des snipers postés sur les toits pour la protéger. “Malgré la tension sécuritaire, le changement du parcours de la manifestation et les fouilles des sacs à l’entrée de la marche, il y avait énormément de monde pour revendiquer nos couleurs et célébrer nos identités”, note Flora Bolter. En trente ans, nos Prides ont obtenu le mariage, la PMA pour toutes et quelques avancées pour les droits des personnes trans, alors, chars ou pas, souvenons-nous que la liberté d’être en fête ne s’use que lorsqu’on ne s’en sert pas !

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Crédit photo : François Guillot/AFP