Deuxième exposition personnelle de l'artiste Jean Bosphore, Still moving évoque un sujet bien connu des gays : l'éveil de la sensualité à l'adolescence, quand le désir vient troubler l'ennui d'un été caniculaire… À voir à Paris, à la Sobering Galerie.
Collaborateur régulier de la Villa Noailles, centre d'art contemporain situé à Hyères, dans le sud de la France, Jean Bosphore, 28 ans, revient à la Sobering galerie, à Paris dans le IIIe arrondissement. Il y avait présenté l'année dernière sa première exposition solo, Slumber Party, un hommage onirique à la sensibilité masculine. Il y retourne cet automne avec les 17 peintures à l'huile qui composent Still Moving, une exposition plus personnelle où il aborde la naissance de son désir homosexuel au bord de la piscine de ses parents.
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La référence au peintre anglais David Hockney est inévitable, pour un tel sujet. Fils d'ouvriers britannique, Hockney est fasciné par le nombre de piscines privées qu'il découvre à Los Angeles au milieu des années 1960. Il en fait alors un thème majeur de son oeuvre, et y explore une certaine forme de sensualité masculine, que sa toile probablement la plus connue, "A bigger splash", vient appuyer à grands coups d'éclaboussures…
Désir en eaux turquoises
Hockney a sûrement observé, depuis les hauteurs de la Cité des anges, nombre d'adolescents alanguis autour des piscines de leurs parents. Probablement aurait-il aimé les rejoindre, leur parler, déceler les secrets de leurs jeunes têtes pensives… C'est justement ce que propose Jean Bosphore, qui explore le thème de l'intérieur. Pour se remémorer ces instants d'ennui, de désir mais aussi de frustration, l'artiste a peint la totalité de ses oeuvres chez ses parents, sur la Côte bleue près de Marseille, où ils habitent une maison pavillonnaire.
C'est là, au bord de la piscine familiale, que la sensualité de l'artiste s'est forgée. Les hommes sont donc présents dans toutes ses toiles, sous formes de personnages ou de représentation, par exemple sur des photographies, des posters ou encore des publicités intégrées à des natures mortes. Parce que le désir se crée également en projection, mais aussi parce qu'il se fige, souvent, sur quelques figures adorées…
"Il s'agit aussi de comment, aujourd'hui, je crée un fantasme par rapport à ça, comment je l'interprète alors que je n'en avais pas conscience à l'époque", confie Jean Bosphore, dont l'expérience intime renvoie aux premiers émois homosexuels en général, qui se vivent encore la plupart du temps en secret, et peuvent se doubler d'une mélancolie que l'artiste retranscrit avec justesse. La taille imposante des toiles (la plus grande fait un mètre sur 80 cm) permet au spectateur de se replonger dans la genèse de son désir, sous un soleil de plomb. Bonne baignade…
>> Still Moving, du 9 novembre au 5 décembre à la Sobering Galerie, 87 rue de Turenne (Paris, 3e)
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Crédit photo : Sobering Galerie