Hit incontournable sur le territoire états-unien, This Is Us est désormais adaptée à la sauce bleu-blanc-rouge avec la série Je te promets. Mais cette version française est-elle aussi inclusive que le format original ?
Lorsqu'un remake est annoncé, la crainte est toujours au rendez-vous. Un fait d'autant plus remarquable avec Je te promets, la version française de This Is Us. Lancée en 2016 outre-Atlantique, cette fiction créée par Dan Fogelman réalise des cartons d'audiences depuis son lancement, redorant le blason de la série familiale à une heure de grande écoute. Épisode après épisode, elle narre les tribulations d'une même fratrie à travers plusieurs générations. Avec beaucoup de tendresse, d'émotion et d'humanité : les ingrédients clés de son succès, que l'on retrouve fort heureusement dans son adaptation chez TF1.
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Dans cette version hexagonale, des petites altérations sont apportées : Kevin, l'acteur de sitcom, devient ici Michaël, un footballeur en reconversion. Rebecca, la mère des triplés, a une sœur cadette. Quant au fameux trio au cœur de la série, il vient au monde le jour de l'élection de François Mitterrand, non plus de Ronald Reagan. Mais, remake oblige, les similitudes entre This Is Us et Je te promets sont légion. "On est effectivement assez proches sur les histoires et j'en ai conscience, reconnaît Aline Panel, productrice du projet. Et en même temps, le contexte est vraiment français. Le plus gros challenge, c'était de retrouver quelque chose de sincère tout en gardant l'âme de la série". Pour ça, la diversité était primordiale.
Car à l'image du format originel, Je te promets mise également sur un personnage principal noir, Mathis, très justement incarné par Narcisse Mame à l'âge adulte. Pour Aline Panel, cette inclusivité relevait d'enjeux majeurs au-delà du remake. "La France a une histoire avec le racisme et on raconte d'où il vient dans le onzième épisode, détaille-t-elle. Chez nous, c'est vraiment la question de l'immigration post-coloniale et de la pauvreté, ce n'est pas la même histoire que la communauté afro-américaine. C'est avant tout une histoire intime de famille mais derrière, il y a tout ça et c'était important de le raconter". Un parti pris qui réussit à la série.
Un projet intime
Mais il y a une autre liberté scénaristique que s'est permise cette adaptation. Dans This Is Us, William, le père biologique de Randall, souffre d'un cancer à l'estomac de stade avancé. Mais dans sa déclinaison française, le personnage devient Amidou (Bass Dhem) et est ici séropositif. "C'était très important car ça n'est pas dans la série américaine, évoque Aline Panel. C'est une histoire personnelle que je voulais absolument mettre en lumière car elle a marqué ces dernières années". D'ailleurs, l'existence même de ce remake est un projet de cœur pour sa productrice, qui s'est battue pour le mettre sur pieds.
"Il se trouve que j'ai vu cette série un peu par hasard à un moment très dur de ma vie, précise la productrice à l'égard de This Is Us. J'avais une épreuve familiale très forte à surmonter. Et cette série m'a vraiment consolée". Déterminée à l'adapter dans notre Hexagone, elle fait une première tentative, infructueuse, auprès des Américains. Puis, plus tard, un appel d'offres a lieu. Seule avec sa "petite" boîte de production, Aline Panel n'y croit pas. Elle est pourtant sélectionnée. "Ils m'ont dit que le projet avait plus de chances de se faire si c'était avec moi, continue-t-elle. Car je ne suis pas juste la patronne de ma boîte, je produis aussi moi-même. Je choisis mes auteurs, je travaille avec eux, avec les réalisateurs, au montage".
De la représentation LGBTQ+ ?
En tant que décisionnaire sur Je te promets, elle a ainsi opté pour ne pas inclure l'identité queer d'un personnage. Dans la version originale, on découvre au fil des épisodes la bisexualité de William, bien que ça reste très secondaire. Ici, Amidou est seulement représenté avec une femme. Si l'on était déçu d'assister au "straight-washing" du personnage, Aline Panel nous garantit que la réalité est tout autre. "La bisexualité n'est pas très traitée dans la série américaine, avance-t-elle. On voulait prendre le temps et l'espace de développer ce personnage qui sera homosexuel chez nous. Issu d'une famille traditionnelle africaine, ça n'a pas été la première chose qu'il a connu dans le sens où être gay n'était pas dans son champ de vision. Mais en fait, il l'a toujours été et il a notamment eu un grand amour que je ne veux pas spoiler".
"Ce n'est pas qu'on voulait mettre sa sexualité sous le tapis, poursuit la productrice. Au contraire, c'était pour lui donner sa juste place en saison 2, parce que la première saison est déjà intense sur la question de la reconnaissance, de la paternité". Dans le meilleur des mondes, Je te promets rencontre un succès – tout à fait possible – à l'antenne de TF1. Et nous comble ainsi avec un nouveau personnage LGBTQ+, encore trop rare dans le paysage audiovisuel français. "L'écriture est commencée, on attend les audiences pour avoir une confirmation", conclut Aline Panel. Il ne reste donc plus qu'à croiser les doigts et espérer.
Car, mine de rien, Je te promets mérite sa place. Dans le monde des séries, d'une part, mais aussi sur TF1, en prime-time. À l'image de la série dont elle s'inspire, elle s'impose comme un reflet captivant de notre société française à travers le portrait d'une famille à la fois atypique et pourtant délicieusement commune. Mais surtout, elle s'empare de sujets – le racisme ordinaire, la séroposivité, la grossophobie – que d'autres fictions n'osent même pas frôler du petit doigt. C'est un remake, certes. Mais un remake soigné et humain qui tend à mettre en lumière (et réparer ?) les fêlures de notre douce France. À regarder, donc.
Je te promets est diffusée ce lundi 1er février à 21h05 sur TF1, mais son intégrale est déjà disponible sur la plateforme Salto.
Crédit photo : TF1