Un arrêt révoque une zone "sans LGBT" à Niebylec, dans le sud de la Pologne. La justice condamne une atteinte aux droits de l'homme.
On pourrait croire qu'il s'agit d'une déclaration de militants demandant la fin des zones "sans idéologie LGBT" en Pologne. Mais c'est bien la justice qui affirme qu'il "n'y a pas d'idéologie LGBT, tout comme il n'y a pas d'idéologie hétérosexuelle". Ce mardi 29 mars, le tribunal administratif du voïvodie des Basses-Carpates, dans le sud de la Pologne, a révoqué la déclaration "anti-LGBT" de la commune de Niebylec.
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Selon le tribunal, "la résolution dépasse le cadre des tâches et des compétences de la commune". Dénonçant l'utilisation du terme "idéologie LGBT", l'arrêt remarque que "la résolution utilise des termes ambigus alors que la résolution doit être sans ambiguïté dans son contenu". Au-delà de la forme, l'arrêt dénonce "une ingérence discriminatoire" à plusieurs niveaux : le respect et la dignité de la personne, le droit au respect de la vie privée, la liberté d'expression, le droit à l'éducation et au parents d'élever leurs enfants selon leurs croyances. Des droits fondamentaux protégés par la Constitution polonaise.
Des résolutions contraires au droit européen
Ce n'est pas une première, sept autres résolutions ont été annulées à Istebna, Klwów, Serniki, Osiek, Lupinki ou au conseil départemental de Tarnowski. Dans tous ces cas, les tribunaux administratifs ont reconnu que ces déclarations "portaient atteinte aux droits de l'homme et aux libertés". Ici, l'arrêt de ce mardi 29 mars juge en outre que "les résolutions sont également contraires au droit européen". "La justice polonaise se montre ici indépendante du pouvoir et nous conforte dans l'idée de continuer à demander à l'exécutif polonais des garanties de cette indépendance, et notamment, la suppression de la chambre disciplinaire", indique auprès de têtu· l'eurodéputé (affilié à En Marche) Pierre Karleskind, vice-président de l'Intergroupe LGBTI.
La Pologne est en effet dans le viseur de la Commission européenne pour avoir créé une chambre disciplinaire au sein de la Cour suprême. Cette chambre, dont les membres sont des proches de l'exécutif au pouvoir, a été jugée comme contraire au droit européen, la Cour de Justice de l'UE jugeant que cette chambre n'offre pas "toutes les garanties d'impartialité et d'indépendance" et qu'elle n'est "pas à l'abri d'influences directes ou indirectes des pouvoirs législatif et exécutif". Dans son bras de fer avec les institutions européennes, la Pologne a dit vouloir supprimer cet organe, le transformant en "chambre de responsabilité professionnelle". Plusieurs observateurs craignent qu'il ne s'agisse que d'un changement cosmétique.
Plusieurs résolutions ont également été retirée par la pression budgétaire. Alors que la Commission européenne a suspendu des fonds faute de garanties sur la lutte contre les discriminations LGBTQI+, trois régions ont retiré leur charte, en septembre, sous la menace de perdre des subventions. Parmi les 100 déclarations adoptées depuis 2019, de nombreuses ont ainsi été annulées ou rejetées. Mais plusieurs dizaines perdurent, alimentant un climat de défiance des personnes LGBTQI+ en Pologne.
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