Avec la sobrement nommée NYC, l'anthologie horrifique de Ryan Murphy s'ancre dans la réalité du milieu gay des années 1980 pour livrer un récit glaçant aux airs d'hommage. Une onzième saison qu'il serait dommage de rater.
Onze années au compteur et, malgré quelques moments d'égarement – on se rappelle la faiblarde saison 10 découpée en deux parties (Red Tide et Death Valley) aussi peu convaincantes l'une que l'autre –, la série American Horror Story prouve qu'elle est encore capable de séduire. Avec NYC, sa dernière saison désormais disponible en intégralité sur MyCanal, la série cocréée par Ryan Murphy et Brad Falchuk vire dans l'horreur psychologique. S'appuyant sur des faits réels, elle revient sur les débuts de l'épidémie de sida aux États-Unis pour réfléchir sur la façon dont les personnes LGBTQI+ ont été traitées à l'époque.
Attention, cet article contient des spoilers quant à la saison 11 d'American Horror Story.
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Une saison des origines
En 1981, à New York, Adam (Charlie Carver) est un jeune homme candide qui s'inquiète de voir ses amis gays disparaître dans des circonstances énigmatiques. De son côté, Patrick (Russell Tovey) est le seul flic des forces de police locales à vouloir enquêter sur une série de meurtres macabres ciblant la communauté homosexuelle. Tout comme Gino (Joe Mantello), son compagnon, un reporter bien déterminé à élucider ces affaires. En parallèle, la scientifique Hannah (Billie Lourd) étudie l'émergence d'un nouveau virus à l'origine inconnue et à l'impact dangereux.
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Pour commencer, cette saison d'American Horror Story installe une atmosphère angoissante qui fascine : l'action se déroule en grande partie la nuit, dans des clubs gays, parfois SM, ce qui crée un sentiment de danger permanent, un peu comme dans le film culte Cruising de William Friedkin avec Al Pacino. Puis, de fil en aiguille, la série inclut deux menaces distinctes : Mr. Whitely, un tueur en série découpeur d'organes, et "Big Daddy", un colosse bodybuildé dont le faciès est couvert d'un masque de cuir. Mais si l'un est en chair, l'autre, en revanche, n'est qu'un mirage.
Ou, plus précisément, une métaphore, rendue explicite à l'issue du huitième épisode lorsque Patrick pense avoir tué d'une balle "Big Daddy", son corps massif gisant à terre dans la maison qu'il loue à Fire Island. Mais, rapidement, son cadavre disparaît. L'antagoniste, qui est encore en vie, continue de terroriser de jeunes gays partout sur l'île, ainsi qu'à New York. Car "Big Daddy" n'est autre que la personnification de la maladie, le VIH, qui, au début des années 1980, a commencé à frapper la communauté gay.
American gay story
NYC joue également beaucoup sur la symbolique et la référence. Lors d'une scène onirique dans les bois, dont l'esthétique fait irrémédiablement penser aux travaux de James Bidgood, le jeune Theo (Isaac Powell) se retrouve attaché et encerclé par une multitude de minets portant des bois de cerfs sur le crâne. La figure du cervidé est d'ailleurs importante dans la série puisqu'elle renvoie à une des nombreuses pistes scientifiques concernant l'apparition du VIH, laquelle soutenait à l'époque que l'animal était à l'origine du virus. Enfin, et dans une moindre mesure, la figure de l'ange, également présente, évoque Angels in America, pièce de théâtre de Tony Kushner dont le sida est le thème principal.
En tout et pour tout, ce onzième tour de piste est le plus meurtrier. En effet, jamais une saison d'American Horror Story n'aura dézingué autant de personnages, principaux comme secondaires. Survit toutefois Adam, miraculeux rescapé de l'épidémie qui, après avoir perdu un grand nombre de ses proches, consacre son temps au militantisme et encourage ses camarades gays à utiliser des capotes. C'est une fin douce-amère qui rappelle à quel point le gouvernement américain a laissé la communauté LGBTQI+ livrée à elle-même lors de cette une crise sanitaire inédite... mais souligne malgré tout comment cette même communauté est parvenue à se mobiliser et à se serrer les coudes pour faire face à l'adversité.
Côté divertissement, NYC se situe tout de même un cran en dessous des meilleures saisons de l'anthologie, étant un peu moins surprenante et originale que, par exemple, Murder House et Asylum. Cependant, cet aspect est rattrapé par un réel propos en filigrane, quelques scènes bien gores que les amateurs apprécieront et, enfin, une photographie poisseuse qui donne l'impression de ressentir la honte et le dégoût qu'éprouvent certains des personnages de la saison. Alors si cette dernière n'est peut-être pas la plus réussie, elle est sans aucun doute la plus importante.
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Crédit photo : FX