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EuropeFamilles homoparentales : l'Europe propose un "certificat européen de parentalité"

Par Nicolas Scheffer le 07/12/2022
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INFO têtu· – Proposé par la Commission européenne ce mercredi, le nouveau document devra permettre notamment aux familles homoparentales d'être reconnues dans tous les pays de l'Union.

"Si vous êtes parent dans un pays, vous êtes parent dans chaque pays", déclarait la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, dans un discours important en septembre 2020. L'homophobie d'État de certains pays membres de l'Union européenne (UE) a pourtant conduit à des situations intenables où les parents d'enfants peuvent être reconnus comme tels dans certains pays, mais pas dans d'autres. Pour régler ces situations, l'UE va selon nos informations proposer ce mercredi 7 décembre la création d'un "certificat européen de parentalité" qui fera foi dans toute l'Union.

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L'insécurité juridique actuelle, qui concerneraient deux millions d'enfants selon l'exécutif européen, retire aux familles des droits très concrets quand les parents ne sont pas reconnus par un État membre : héritage, décision en urgence d'un traitement médical, inscription à l'école... Par exemple, malgré un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne, la Bulgarie refuse la nationalité à Sara, un enfant de trois ans né de deux mères en Espagne. Ainsi, Sara est devenue, par la force des choses, apatride.

Simplifier la vie des familles

Le "certificat européen de parentalité" proposé par le Commission européenne, optionnel pour les familles, permettra de prouver dans chaque pays de l'Union qu'un État a reconnu les parents. Jusqu'à présent, en cas de conflit, c'est aux parents de prouver que le lien de filiation a déjà été reconnu. Or, les actes de naissance sont délivrés après des procédures qui diffèrent selon les pays, dans des formats et des langues différents, ce qui complique les démarches. Résultat, les familles doivent faire reconnaître ces actes devant les tribunaux puis faire appliquer la décision judiciaire.

"Ce certificat européen de parentalité, spécialement pensé pour être utilisé dans d'autres États membres, va réduire le fardeau administratif des procédures de reconnaissance et abaisser le coût de traduction des documents pour toutes les familles", fait valoir le document de la Commission auquel têtu· a eu accès. L'exécutif européen estime que le coût des démarches pour une famille transnationale sera ainsi réduit de 71%, et même de 90% pour une famille dont les liens de parentalité sont complexes. Les administrations seront aussi gagnantes, avec un coût réduit de 54%.

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"Voyager ou s'installer dans un autre pays de l'Union doit être simple. Or, aujourd'hui, cela relève du cauchemar pour les familles homoparentales. Ce certificat européen de parentalité leur facilitera grandement la vie !", réagit auprès de têtu· l'eurodéputé Renaissance Pierre Karleskind, vice-président de l'intergroupe LGBTI. "La liberté de mouvement est l'un des piliers de notre Union et actuellement, certains en bénéficient plus que d'autres. Assurer que ces enfants ne perdent pas leur filiation quand ils traversent la frontière n'est pas seulement une clarification juridique, c'est un impératif moral", ajoute la co-présidente de l'intergroupe, l'écologiste néerlandaise Kim van Sparrentak.

Toujours pas de reconnaissance européenne du mariage

"Ce certificat permettra à un enfant d'apporter la preuve que ses parents sont reconnus dans un autre État membre", assure la Commission. Une fois délivré, il ne sera pas nécessaire de le traduire ni de le faire enregistrer par un autre État : ce certificat sera utilisable dans toute l'Union européenne (excepté en Irlande et au Danemark, régis par des règles particulières mais qui pourront adhérer à la proposition). Le document "inclut la reconnaissance de la parentalité d'enfant issu d'un couple de même sexe. (...) Le refus de reconnaître la parentalité au motif de protéger l'ordre public doit être utilisé exceptionnellement et à la lumière de chaque cas individuel ce n'est pas une raison abstraite suffisante pour refuser la parentalité à des familles homoparentales", insiste la Commission européenne.

Auprès de têtu·, la fédération européenne d'associations homoparentales Nelfa se dit "très contente de cette proposition, sachant que nous devons faire face à des compétences limitées de l'Union européenne en matière familiale". "Cette proposition sur la parentalité ne fait que répéter la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne sans créer de nouveaux droits. La Commission européenne pourrait pourtant agir de manière décisive en lançant des procédures d'infraction contre la Roumanie et la Bulgarie qui n'ont toujours pas exécuté les décisions de justice administrative en matière de parentalité", déplore auprès de têtu· Vincent Reillon, porte-parole de Forbidden Colours, une association LGBTQI+ européenne.

L'exécutif européen a surtout fait un pas en arrière par rapport à sa proposition de 2020 : les États hostiles pourront toujours refuser de reconnaître le mariage d'un couple de même sexe effectué dans un autre pays, de même que toute forme de Pacs. "Nous le regrettons, mais savons également que nous en sommes qu'au prémices des négociations", poursuit la Nelfa.

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