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politiqueGuets-apens homophobes : la piste du bannissement des sites de rencontre rejetée

Par Nicolas Scheffer le 12/10/2023
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Porté à l'Assemblée nationale par le député Raphaël Gérard, un amendement proposait que les auteurs de guets-apens soient exclus des services en ligne (sites/applis de rencontre, tchat Coco…) où ils piègent leurs victimes.

"Rejeté", en lettres rouge sur le site de l'Assemblée nationale. Ce mardi 10 octobre, alors que les députés discutaient d'un texte pour "sécuriser et réguler l'espace numérique", un amendement visant à bannir des réseaux sociaux les auteurs de guets-apens tendus sur internet a été mis à la poubelle. Mais son auteur, le député Renaissance de Charente-Maritime Raphaël Gérard, ne désespère pas : "Je le représenterai sur d'autres textes", assure-t-il à têtu·.

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Les guets-apens homophobes sont un fléau, auquel nous avions encore consacré un dossier dans notre numéro du printemps (Mediapart a également réalisé un documentaire sur le sujet). Chaque semaine en France, un homme gay en est victime. Avec un mode opératoire bien connu : des hommes gays ou bi sont ciblés sur internet, notamment sur des plateformes comme Coco, puis agressés et dépouillés lorsqu'ils se rendent au lieu de rencontre convenu. Régulièrement, ces pièges homophobes se terminent dans un déchaînement de violence, les victimes étant passées à tabac voire assassinées. "Pourtant manifeste, on constate que la circonstance aggravante de l'homophobie ou de la transphobie n'est pas toujours prise en considération, faute d'être certains de pouvoir la prouver, rappelle Raphaël Gérard. L'objectif de cet amendement est de donner une nouvelle accroche aux enquêteurs et aux magistrats pour caractériser ce fléau."

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Un guet-apens homophobe par semaine

L'amendement du député avait pour but de créer "une peine complémentaire de bannissement temporaire d’un service en ligne lorsque celui-ci a été utilisé pour commettre des violences volontaires contre des personnes dans le cadre d'un guet-apens". Certes, les personnes condamnées pourraient sans doute toujours trouver un moyen de s'inscrire à nouveau sur les sites en question, mais "il y a une dimension symbolique importante pour tenter de limiter le phénomène", fait valoir le député. "Compte tenu du mobile discriminatoire lié à ces infractions, la gravité des faits qui s’accompagnent le plus souvent de faits de violences physiques contre des victimes, il apparaît opportun de prévoir la possibilité d’empêcher les auteurs de se recréer un compte et ainsi prévenir la récidive", argumente l'exposé des motifs de son texte.

L'amendement, adopté dans un premier temps en commission, a été rejeté en séance plénière, de crainte qu'il ne soit considéré comme hors sujet par rapport à l'objet de la loi, et ainsi invalidé. "L'objet du texte porte sur des faits délictueux en ligne, or mon amendement porte sur une infraction dans l'espace physique", explique Raphaël Gérard, qui souhaite retenter sa chance sur un autre texte.

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Crédit photo : Unsplash / Manuel Del Moral