Avec une trame qui s'étend sur une quarantaine d'années, Une autre vie que la mienne retrace le parcours sinueux d'une femme trans en Pologne. Un récit décisif dans un pays où les droits LGBT+ sont largement bafoués. En salles ce mercredi 29 mai.
En compétition officielle à la Mostra de Venise l'été dernier, Une autre vie que la mienne fait partie de ces films qui paraissent une anomalie. Rapport à son sujet, l'histoire d'une femme trans en Pologne, pays membre de l'Union européenne marqué ces dernières années par une LGBTphobie d'État qui a notamment donné lieu à des zones anti-LGBT dans certaines parties du territoire. Si un espoir nouveau émerge depuis la prise de poste du Premier ministre Donald Tusk fin 2023, c'est donc dans un contexte assez sombre qu'est née l'œuvre solaire de Malgorzata Szumowska et Michal Englert.
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Durant plus de deux heures, Une autre vie que la mienne propose une narration qui suit la trajectoire d'Aniela sur une quarantaine d'années. Assignée homme à la naissance, elle passe une majeure partie de sa vie sous une identité masculine, répondant au prénom d'Andrzej et faisant deux enfants avec son épouse, Iza. Pendant tout ce temps, il est évident qu'elle est piégée dans un genre et une apparence qui ne lui ressemblent pas. Alors, après plusieurs détours et tergiversations, Aniela décide de franchir le pas et d'entamer sa transition.
La lumière avant tout
Si les récits d'ados trans en plein questionnement sont de plus en plus nombreux, rares sont les films à dépeindre avec autant de minutie une transition tardive. Le point fort d'Une autre vie que la mienne est le fait que sa protagoniste ne décide pas de faire son coming out avant la moitié du film. Le premier pan est ainsi dédié à son mal-être, illustré sans trop de pathos à coups d'instants de vie symboliques – comme cette soirée déguisée où Aniela se sent particulièrement à l'aise habillée en infirmière, ou ce rendez-vous médical quand elle confie à son docteur être "irrémédiablement attirée de l'autre côté" (du genre). Le film n'omet pas les obstacles auxquels elle doit ensuite faire face, qu'ils soient de nature légale, médicale ou sociale.
Dans le rôle principal, l'actrice cisgenre Małgorzata Hajewska-Krzysztofik irradie, trouvant un juste équilibre entre force et vulnérabilité. Quant au duo à la réalisation, il signe un projet queer jusque dans ses personnages secondaires dont un certain nombre – trans et cis – sont campés par des interprètes trans. La volonté du film est résolument optimiste, ce qu'illustre la relation entre Aniela et son épouse, ainsi que la photographie douce. En émane une belle tendresse, faisant d'Une autre vie que la mienne une œuvre rare et bienfaitrice.
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Crédit photo : UFO Distribution