interviewFront populaire : "Nous ferons le changement d'état civil sur simple déclaration"

Par Nicolas Scheffer le 13/06/2024

Andy Kerbrat, député sortant de La France insoumise (LFI), annonce à têtu· que le "Front populaire" de la gauche unie aux élections législatives des 30 juin et 7 juillet va intégrer dans son programme le changement d'état civil des personnes transgenres sur simple demande en mairie. Ouvertement gay, il appelle à un sursaut face à la possibilité de voir le gouvernement de la France confié à l'extrême droite "homophobe et transphobe".

Retour sur le ring électoral pour les député·es. Après le moment de sidération qui a suivi la dissolution de l'Assemblée nationale décidée par le président, Emmanuel Macron, devant la victoire du Rassemblement national (RN) aux élections européennes, une campagne éclair doit conduire aux élections législatives convoquées pour les 30 juin et 7 juillet. Député sortant de La France insoumise (LFI) en Loire-Atlantique, Andy Kerbrat est candidat à sa succession dans le cadre du nouveau "Front populaire" qu'a décidé de présenter la gauche unie (LFI, PS, Écologistes, PCF, etc.). Appelant à un sursaut face à la menace d'une France gouvernée par l'extrême droite, il annonce à têtu· que la coalition de gauche compte permettre dans son programme le changement d'état civil sur simple demande en mairie, et ce dans les 100 premiers jours de gouvernement.

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  • Quelle lecture faites-vous de la situation politique ?

Elle est extrêmement grave. Demain, le risque est de voir à l'Assemblée nationale une majorité homophobe et transphobe formée par le Rassemblement national qui s'appuiera sur des personnalités de Reconquête, le parti d'Éric Zemmour, et de la droite conservatrice la plus radicalisée du parti Les Républicains (LR). Le RN, c'est Jean-Philippe Tanguy [député RN de la Somme] qui lance une fatwa contre Act Up en voulant leur supprimer leurs subventions, c'est Marine Le Pen qui voulait revenir sur le mariage pour tous avant de changer d'avis… Mais il y a aussi une possibilité inverse : celle d'élire une majorité LGBT-friendly à la conquête de nouveaux droits.

  • Que dites-vous à un électeur homo tenté de voter pour le Rassemblement national qui lui promet la sécurité face aux agressions homophobes ?

Si le RN arrive au pouvoir, les homosexuels ne seront pas davantage en sécurité. S'il n'a pas une police LGBT-friendly, les dépôts de plainte ne seront pas pris en compte correctement. Or nous, nous souhaitons former la police pour qu'elle puisse accueillir les victimes correctement. Ce n'est pas en mettant des policiers dans les quartiers populaires qu'on répondra à la multiplication des guets-apens homophobes, qui sévissent principalement en ligne. Il nous faut une discussion avec les applis telle que Grindr, comme on avait commencé à le faire. Surtout, nous souhaitons porter un service social et de protection des personnes LGBTQI+ à la hauteur car l'insécurité réelle, c'est l'accès aux soins, à la PrEP… À l'inverse, le seul moment où on entend le Rassemblement national parler des problématiques qui touchent les personnes LGBTQI+, c'est pour taper sur les personnes trans.

  • Qu'est-ce que vous proposez sur le plan des droits LGBTQI+ ?

Le Front populaire que nous mettons en place est féministe et LGBTQI+. Je vous annonce que nous avons acté que dans notre programme pour les 100 premiers jours, nous mettrons en place le changement d'état civil sur simple déclaration auprès d'un officier d'état civil. Nous libérerons ainsi la vie des gens en supprimant les formalités judiciaires qui ne servent à rien. Face aux réactionnaires, nous sommes les candidats des libertés.

  • La gauche peut-elle rester unie au-delà des trois semaines de campagne électorale ?

Ma proposition de loi sur le changement d'état civil a été signée par l'ensemble de la gauche. Si on obtient une majorité, on a deux ans pour gouverner, donc on va mettre en place le socle qui nous rassemble : le pouvoir d'achat, avec l'indexation des retraites sur l'inflation, l'abrogation de la réforme des retraites de l'année dernière… Nous arbitrerons ensuite les points qui nous divisent à l'occasion de la campagne présidentielle de 2027.

  • Jusqu'où peut aller cette union ? Pourriez-vous travailler avec quelqu'un comme Bernard Cazeneuve ?

La question, c'est la centralité de ce que l'on porte. Si Bernard Cazeneuve est d'accord pour la retraite à 60 ans, le dégel du point d'indice, le Smic à 1.600 euros, la planification écologique, oui, je travaille avec lui sans problème.

  • Pour que la gauche gagne, ne faut-il pas faire en sorte que Jean-Luc Mélenchon, qui divise plus que jamais au terme de sa campagne européenne, n'incarne pas ce Front populaire ?

Jean-Luc est une figure essentielle de la gauche. C'est sûrement l'un des leader les plus engagés sur les sujets LGBTQI+, jusqu'à répondre à Ousmane Sonko, le Premier ministre du Sénégal, qu'il ne peut pas être humaniste en étant homophobe. C'est à lui de nous dire la place qu'il souhaite occuper. Je sais qu'il soutient la dynamique du Front populaire. Mon urgence, c'est qu'il n'y ait pas de député du RN en Loire-Atlantique.

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Crédit photo : Xose Bouzas Hans Lucas via AFP

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