La première série française originale d'Apple TV+ est un soap opera pleinement queer qui met en scène les conflits générationnels de notre temps.
Depuis son lancement en 2019, avec des fictions allant de For All Mankind à Loot, la plateforme de streaming Apple TV+ consolide, série après série, une réputation digne de gêner la concurrence. Sa première production originale entièrement française, La Maison, était attendue au tournant – en raison notamment de sa distribution quatre étoiles avec des noms comme Lambert Wilson, Carole Bouquet, Pierre Deladonchamps (L'Inconnu du lac) ou encore Zita Hanrot (césarisée pour Fatima, en 2016). Après dix épisodes, le verdict est sans appel : La Maison est un drame familial addictif qui parvient à dire des choses sur la notion d'héritage, sur le besoin de changement et sur des générations qui peinent à se comprendre.
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Dans une réalité alternative, deux mastodontes s’écharpent pour dominer le secteur de la haute couture en France. D’un côté, Rovel, désireux de gober la concurrence. De l’autre, Ledu, maison centenaire esquintée par les récents propos problématiques de son créateur phare. La montée en puissance de Paloma Castel, nouvelle prodige de la mode écoresponsable, va rebattre les cartes. Famille ou pas, tous les coups sont permis dans cette course au monopole dont les répercussions risquent de s'avérer fatales.
Famille en détresse
Scandales, vengeances, potins et manigances… Pas de doute, La Maison est la digne héritière des soap operas des années 80 comme Dallas ou Dynastie. Passé les premiers épisodes qui assoient l'intrigue, la série trouve enfin son rythme et le charme opère, notamment en raison des personnages, qu'on adore – et qu'on adore surtout détester. Mais contrairement à ce que pourrait laisser penser son thème, La Maison est aussi une œuvre éclairante sur les rapports familiaux et, à travers eux, le fossé qui se creuse entre générations.
D'un côté, le grand patron un brin boomer, Vincent Ledu (Lambert Wilson), qui s'attache à sa marque bien qu'il soit considéré par beaucoup comme dépassé. De l'autre, la jeune créatrice racisée, Paloma Castel (Zita Hanrot), qui tend à produire une mode engagée et durable. Désireuse de l'approbation de Vincent, Paloma tente d'honorer son héritage tout en essayant de faire évoluer les choses dans une direction plus éthique et inclusive. Leur relation complexe évolue ainsi au fil des épisodes, durant lesquels chacun va devoir faire des concessions.
Cet enjeu intergénérationnel se retrouve également entre deux autres personnages : Marie (Anne Consigny), la sœur froide et calculatrice de Vincent, et Robinson (Antoine Reinartz), son propre fils en manque d'attention. Ce dernier, ouvertement gay, n'hésite pas à convier son amant (Corentin Fila) à divers événements personnels comme professionnels. Quant à sa mère, elle est mariée depuis de longues années à un homme qu'elle n'aime plus et qu'elle trompe… avec une femme. Bien qu'amoureuse de sa maîtresse, Marie est incapable d'assumer sa vraie sexualité. À travers eux émerge un autre fossé entre une génération fière qui ne se cache plus, et une autre qui connu une société bien plus hostile.
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Crédits photos : Apple TV+