Dans Les Reines du drame, son premier long-métrage sorti au cinéma ce mercredi 27 novembre, Alexis Langlois explore une passion conflictuelle entre deux chanteuses à succès aussi bouillantes que timbrées.
Cette année au Festival de Cannes, impossible de trouver plus queer que Les Reines du drame, sélectionné à la Semaine de la critique. Le premier long-métrage d'Alexis Langlois, dont on avait déjà remarqué les formats courts barrés De la terreur, mes sœurs ! ou encore Les Démons de Dorothy, reprend en effet sa recette savoureuse de folie douce mêlée de culture queer assumée.
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Au début des années 2000, Mimi Madamour, ado lesbienne dans le placard, participe à un télé-crochet façon Nouvelle Star dans l'espoir d'atteindre la gloire. Jackpot : en peu de temps, elle se retrouve catapultée au statut d'idole des jeunes. Une ascension express qui déplaît à Billie Kohler, sa petite amie qui se morfond de ne pas pouvoir assumer leur idylle passionnelle. Au fil des décennies, les rancœurs accumulées conduisent ces deux "drama gouines" en puissance à se déchirer sous le regard inquisiteur des paparazzis et de leurs fans.
Un film queer jusqu'à la moelle
Les Reines du drame opère comme un rêve fiévreux. On y discerne des éléments de réalité – les années 2000 sont reproduites via des clins d'œil (à Mylène Farmer, Britney Spears, Lorie...) et une esthétique savamment pensée – mais ceux-ci sont magnifiés par une mise en scène presque kistch qui mélange les genres tous azimuts. Excessif, le film flirte constamment avec l'absurde. Des décors au jeu des interprètes, il y a quelque chose de volontairement théâtral dans ce premier long-métrage à travers lequel Alexis Langlois s'impose comme l'enfant spirituel de John Waters – qui aurait eu Gregg Araki pour nounou.
Imprévisible, l'histoire d'amour entre les deux héroïnes – jouées par Louiza Aura et Gio Ventura – s'avère captivante. Comme dépendantes l'une de l'autre, Mimi et Billie soufflent tour à tour le chaud et le froid, souvent bouillantes mais toujours givrées. À travers elles, le film déploie une romance lesbienne décadente comme on en croise rarement au cinéma.
À la fin de la séance, le constat est frappant : on tient ici une œuvre radicalement queer. À l'écran, Bilal Hassani, dans un rôle méta de youtubeur botoxé complètement timbré, croise des figures notables du microcosme queer parisien comme Raya Martigny et Dustin Muchuvitz. Démentielle, la bande-son a quant à elle été confiée entre autres à Rebeka Warrior et Yelle, dont on retient un tube décalé et presque fleur bleue sur... le fist-fucking. Tel un patchwork tout en paillettes, le film assemble références et codes queers sans prendre la peine de prendre par la main un public cis-hétéro. On ne boudera pas notre plaisir.
Crédit photo : Les films du poisson